Le Québec comme le Texas

Rabaska


La découverte sur la rive sud du Saint-Laurent d'un gisement de gaz naturel potentiellement important a fait bondir les actions des entreprises impliquées. Mais, hormis notre collègue Philippe Mercure, les médias ne s'y sont pas beaucoup intéressés. Les politiciens non plus, tout à la fièvre du hockey et à la reconstruction du manège militaire de Québec. Les écologistes ne sont pas montés aux barricades.
Pourtant, cette découverte pourrait bouleverser le profil énergétique du Québec. Si le potentiel décelé par l'américaine Forest Oil et son partenaire québécois Junex s'avère, le Québec pourrait devenir, d'ici quelques années, un producteur et exportateur de gaz naturel de premier plan.
On sait depuis longtemps que la formation rocheuse des basses terres du Saint-Laurent, les schistes de l'Utica, abrite du gaz naturel. Jusqu'à récemment, on ne disposait pas des moyens techniques pour libérer ce gaz. Forest Oil a développé l'expertise nécessaire en explorant une formation similaire, les schistes de Barnett, au Texas. Les deux puits qu'elle a forés l'été dernier, l'un dans la région de Bécancour, l'autre dans celle de Contrecoeur, l'ont convaincue qu'il pourrait se trouver, dans ces seuls secteurs, quelque 4000 milliards de pieds cubes de gaz. C'est 20 fois la consommation annuelle du Québec. Si ce potentiel est confirmé par les prochains forages, on peut s'attendre à ce que les activités d'exploration de l'Utica s'intensifient considérablement. L'impact sur l'économie du Québec et sur les finances du gouvernement provincial pourrait être considérable. Et les Québécois se trouveraient confrontés à un dilemme, déchirés entre l'exploitation de cette nouvelle richesse et leur conscience écologique.
Nous nous sommes toujours targués d'avoir fait "le choix" d'une énergie propre, l'hydroélectricité. Or, il ne s'agissait pas du tout d'un choix: nous avons développé la source d'énergie que la nature nous avait léguée.
Voici que, pour la première fois, le Québec pourrait devenir un producteur d'énergie fossile. Certes, la combustion du gaz naturel produit moins de gaz à effet de serre (GES) que celle du pétrole et du charbon. Il reste que le gaz est à l'origine d'un cinquième des émissions de GES dans le monde. On sait que les Québécois ont refusé que soit construite la centrale du Suroît parce que celle-ci aurait fonctionné au gaz. Les projets de terminaux méthaniers ont aussi fait face à une vive opposition. Accepterons-nous sans rechigner que le Québec devienne producteur d'un carburant polluant?
À cela s'ajoutera une autre préoccupation environnementale. Si elle ne produit pas de quantités importantes de GES, l'extraction du gaz naturel de formations complexes comme l'Utica exige l'injection à haute pression de millions de litres d'eau. On sait combien la population québécoise est sensible quand il s'agit de l'eau. Elle le sera d'autant plus quand elle apprendra qu'une bonne partie de l'eau utilisée pour libérer le gaz serait perdue à jamais et que seule une petite proportion de l'eau récupérée pourrait être recyclée, le reste étant injecté dans des puits de stockage.
De notre point de vue, il ne fait pas de doute que si d'importantes quantités de gaz naturel sont découvertes dans le sous-sol québécois, il faudra exploiter cette ressource. Les Québécois seront forcés de laisser tomber le mythe du "choix" de l'énergie propre. Et peut-être cesseront-ils de regarder de haut les Albertains, qui n'ont pas davantage choisi les sables bitumineux que nous avons choisi les rivières.
apratte@lapresse.ca

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André Pratte878 articles

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[une chronique intitulée « Tout est pourri » (critique de Anne-Marie Gingras) ->http://books.google.fr/books?id=EZWguAMXAtsC&pg=PA27-IA27&lpg=PA27-IA27&dq=pratte+Tout+est+pourri&source=bl&ots=MUti9NTQuH&sig=h2zgJlLgOg844j5ejxnUl4zH2_s&hl=fr&sa=X&ei=73RrT8aQEqnh0QHuh4GyBg&ved=0CEEQ6AEwBQ#v=onepage&q=pratte%20Tout%20est%20pourri&f=false]

[Semaine après semaine, ce petit monsieur nous convie à la petitesse->http://www.pierrefalardeau.com/index.php?option=com_content&task=view&id=30&Itemid=2]. Notre statut de minoritaires braillards, il le célèbre, en fait la promotion, le porte comme un étendard avec des trémolos orwelliens : « La dépendance, c’est l’indépendance ». « La soumission, c’est la liberté ». « La provincialisation, c’est la vraie souveraineté ». « La petitesse, c’est la grandeur ». Pour lui, un demi-strapontin à l’Unesco est une immense victoire pour notre peuple. C’est la seule politique étrangère qu’il arrive à imaginer pour le peuple québécois. Mais cet intellectuel colonisé type n’est pas seul. Power Corp. et Radio-Cadenas en engagent à la poche.





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