Le taux de chômage au Québec

Des lendemains qui déchanteront

Chronique de Peter Benoit

Le gouvernement Couillard pavoise alors que le Québec a maintenant le taux de chômage le plus bas au Canada avec 6,2% avec la plus grande création d'emplois au Canada. Apparemment, ce serait du jamais vu ! Bref, une performance historique du gouvernement Couillard avec l'effet libéral dans toute sa splendeur. Qu'en-est-il vraiment ?
Comment peut-on créer autant d'emplois avec une croissance aussi anémique qui est largement inférieure à 2% ?
En regardant la différence entre décembre 2015 et décembre 2016 de la population active au Québec, d'après l'Institut de la statistique du Québec, il n'y a eu qu'environ 35 000 emplois de plus. La création d'emplois annoncée apparaît donc comme un simple rattrapage "statistique". Mais il y a plus encore:
Un indice qui ne trompe pas est la perte de quelques milliers d'emplois dans le secteur manufacturier névralgique. Le gouvernement Couillard emprunte de 5 à 6 milliards de $ par année pour des projets d'infrastructures, ce qui maintient ou "crée" environ de 15 à 17 000 emplois par milliard investi, soit environ 100 000 emplois par année. D'où les nombreuses pancartes du gouvernement qui nous rappelle que, à l'approche de chantiers routiers, la construction c'est 100 000 emplois au Québec...
Puisque ces emplois font partie du paysage statistique depuis quelques années déjà, l'augmentation de la population active de 35 000, en l'absence de développement industriel d'envergure, n'est due qu'aux impacts de la construction du pont Champlain, soit environ 1,5 à 2 milliards qui seront investis par année en 2016 et 2017. Ce rare investissement du fédéral au Québec, probablement un des derniers, est ponctuel et se terminera quelque part en 2018, juste avant les élections québécoises...
Qu'a t'il marchander Couillard pour obtenir ce fameux pont Champlain "sans frais" et des pinottes pour Bombardier? La rumeur veut qu'il ait cédé à une Commission pancanadienne sur les valeurs mobilières qui sera installée à Toronto avec la destruction appréhendée de l'AMF. Et qu'est-ce qui prendra la relève du pont Champlain une fois qu'il sera terminé en 2018 ? Pourquoi pas un REM bâclé, qui va servir essentiellement les anglophones, pour prendre le relais dès 2018, n'est-ce pas ?
Mais revenons à la création fabuleuse d'emplois au Québec. La promesse de Leitao en 2014 de créer 250 000 emplois n'était pas le fruit du hasard: c'était une prévision assez conservatrice de la mise au rancart des baby-boomers par ce qu'on appelle la retraite. Avec un âge moyen à la retraite de 58 ans et une pointe entre 1946 et 1966 (une médiane en 1956), plus de 50% des retraites seront prises entre 2010 et 2018. Ce phénomène va graduellement s'estomper pour s'éteindre en 2026.
Bref, on assiste à un remplacement des baby-boomers par des jeunes dans la plupart des domaines; ceci est appuyé par le faible taux de chômage des jeunes à environ 10%, un des plus faibles en Occident. Comme ces jeunes seront payés moins chers parce qu'ils sont au bas des échelles salariales, l'effet libéral est double: Le taux de chômage est bas et les dépenses budgétaires du gouvernement sont minimisées. Pour être certain que les baby-boomers prendront leur retraite, quoi de mieux que de les menacer d'étirer l'âge de la retraite à 67 ans ou de changer le mode de calcul en prenant plus d'années comme Coîteux l'a fait et que Morneau s'apprête à faire... Déjà, cela explique probablement les 15 à 25 000 retraites supplémentaires au Québec en 2016.
Enfin, comme le taux de chômage est bas, le Québec a donc besoin de beaucoup d'immigrants !
Qu'arrivera-t-il après 2018 lors du fléchissement des mises à la retraite ? On va assister à une forte remontée du chômage comme durant le début des années 1980 après la récession de 1981-1982; après tout, un jeune prof qu'on embauche en 2016-2017 est là au moins jusqu'en 2050...Pas de place pour de nouveaux profs avant 30 ou 35 ans !
Évidemment, tout maintien ou hausse du seuil de l'immigration ne feront qu'aggraver l'ampleur du phénomène.
Si on fait l'hypothèse que Couillard est réélu en 2018, que fera-t-il donc pour contrer ce phénomène ?
Attendez-vous à un saccage de l'État québécois comme vous ne l'avez jamais imaginé: Une attaque en règle contre le système de santé où la clientèle "plutôt nationaliste des baby-boomers" se trouve et une privatisation massive des actifs du Québec pour dégager la marge de manœuvre financière pour ... emprunter davantage et poursuivre l'immigration à toute vapeur !


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3 commentaires

  • Marcel Haché Répondre

    11 février 2017

    Du temps qu’il était ministre responsable d’Emploi-Québec, celui qui se vante de faire encore partie « du club », c’est-à-dire la gang à Charest devenue la gang à Couillard, le ministère de Sam Hamad avait fait imprimer à l’époque des pamphlets qui prédisaient qu’à partir de 2012, conséquence du départ à la retraite des boomers, le Québec se dirigerait pratiquement vers le plein emploi. Nous y sommes. Nous y sommes selon le chef de la gang, P. Couillard. Mais le sommes-Nous vraiment ?
    Si Nous y sommes vraiment, en plein emploi, quelle utilité de parler de discrimination « systémique » à l’emploi au Québec ?
    Le taux de chômage relevant du sondage et de la perception, normalement, le ministre actuel de la même gang devrait plutôt pavoiser sur une baisse radicale du nombre d’assistés sociaux « au Québec », plutôt que déplorer avec sa gang de braillards la discrimination « systémique » faite à son électorat naturel…captif. On jase.

  • Peter Benoit Répondre

    11 février 2017

    @ Gaston
    Toutes les méthodes de calcul sont présentées sur les sites fédéraux. Grosso modo, un chômeur est défini comme quelqu'un qui se cherche un emploi et non quelqu'un qui ne travaille pas. Il n'y a pas de distinction entre les emplois à temps partiel ou à temps plein créés.
    J'ai simplement voulu tracer quelques grandes lignes sur l'emploi au Québec et il est certain qu'il y a plusieurs nuances ou ajouts à faire.
    Chose certaine, le remplacement des baby-boomers, un phénomène surtout nord-américain, est bien réel. Il permet d'expliquer le comportement de la jeune génération actuelle qui vit dans un régime de plein emploi, de bas taux d'intérêt (ce qui tend habituellement à l'opposé), de crédit facile, de nouvelles technologies, de diversité culturelle et de réseautage.
    Cette génération ne comprend pas pourquoi il faut devenir un pays parce que tout va bien et qu'il y a abondance de ressources, et de l'argent ! L'indépendance est au mieux un sujet secondaire discuté par des gens amers et chicaniers; discours doublement renforcé par la propagande médiatique fédéraliste presqu'à sens unique.
    C'est dommage qu'il faille attendre que le système craque pour qu'ils se réveillent. Les gouvernements Trudeau et, surtout Couillard, travaillent main dans la main à détruire la nation québécoise. Toutefois, le climat "exubérant" actuel tire à sa fin pour la simple raison qu'on ne peut vivre continuellement sur une bulle démographique et d'endettement.

  • Gaston Carmichael Répondre

    10 février 2017

    Quand on parle d'emploi, on parle de poste de travail. Quand on parle de population active, ou taux de chômage, on parle de personne.
    Si je remplace un poste à temps complet par deux postes à temps partiel, je viens de créer un nouvel emploi, et mis une nouvelle personne au travail. N'est-ce pas merveilleux?
    Ma question: Quand on calcule le taux de chômage, est-ce qu'on utilise des équivalents à temps plein, ou simplement le nombre de personne travaillant, indépendamment du nombre d'heures travaillé par semaine?