François Legault a été accueilli cette semaine à l’Élysée par le président français, Emmanuel Macron, pour discuter essentiellement de deals et de chiffres. Cette rencontre confirmait plutôt le lent déclin du lien fraternel que la mère-patrie entretenait avec le Québec.
La rencontre ressemblait davantage à la rencontre entre deux technocrates, qu’à celle de deux cousins entretenant des liens privilégiés et familiaux.
Il y avait le comptable Legault se demandant comment augmenter ses exportations en France et accéder aux marchés européens. Le banquier Macron voulant consolider sa part du marché nord-américain.
Le Québec et la France n’étant plus rien d’autre que des partenaires économiques, au même titre qu’ils le sont avec les États-Unis, le Mexique, le Royaume-Uni, l’Allemagne, ou la Chine.
À la suite de cette rencontre, force est de constater que notre premier ministre discutait avec un chef d’État parmi tant d’autres, sans qu’il y ait d’affection particulière ou de vision partagée. Legault aurait pu discuter avec le premier ministre de la Belgique que nous n’aurions pas vu la différence.
Croissance, échanges commerciaux, innovation, économies, voilà la langue que parlait les deux technocrates à l’Élysée. Le poids de notre histoire commune ne les pesait pas, ne les intéressait pas.
Histoire
La preuve a été faite à maintes reprises que le Québec ne doit compter que sur lui-même pour se tailler une place sur la scène internationale et y défendre ses intérêts.
Le Québec n’a jamais pu vraiment compter sur le Canada pour ce faire et ce n’est pas un demi-siège au sein de la délégation canadienne à l’UNESCO qui change quelque chose.
Le poids démographique du Québec au sein de la fédération canadienne fait que les intérêts du Québec sont plus souvent qu’autrement noyés dans les intérêts pancanadiens avec tous les compromis et compromissions que cela comporte.
Pour les adeptes des théories du complot, ce n’est pas un coup monté contre le Québec. C’est mathématique et politique. Lorsque le Canada parle de francophonie sur la scène internationale, il le fait certes au nom du Québec, mais aussi au nom des Acadiens et des francophones hors Québec.
Nous sommes aux yeux des dirigeants étrangers une des communautés linguistiques minoritaires du Canada. Rien de plus.
Et même si un océan nous sépare, le rayonnement du Québec à l’extérieur de nos frontières a souvent passé par des liens étroits et stratégiques entretenus avec la France. Quoiqu’en pense ceux qui voient petit, le Québec a un rôle à jouer sur l’échiquier mondial, et particulièrement à l’intérieur de la Francophonie.
À ce titre, les liens vitaux que nous avons déjà cultivés avec la France sont primordiales. Et doivent le redevenir.
Les relations entre le Québec et la France ont certes évolué au cours des ans, les dirigeants français adoptant la plupart du temps le principe du ni-ni, « non-ingérence » et « non-indifférence ». Ce principe a parfois été transgressé que ce soit par De Gaulle en 67 et Chirac à quelques semaines du référendum de 95.
Plus récemment, ce fut le président Sarkozy qui avait transgressé la loi non-écrite. Sarko choisissant l’unité canadienne, laissant derrière lui une France du « Vive le Québec libre » à un « Vive le Canada uni » !
C’est à partir de ce moment que les liens sont devenus davantage économiques que politiques.
Qu’espère-t-on de Legault ?
Il ne s’agit pas ici d’espérer que François Legault fasse un plaidoyer souverainiste ou change le cap de la politique internationale québécoise, aussi limitée soit-elle dans le contexte actuel.
La doctrine Gérin-Lajoie, le discours de Lévesque à l’Assemblée nationale française et la marche de Parizeau au côté de Chirac sont issus d’un contexte politique différent.
Il ne s’agit pas non plus de faire croire que les Québécois ne sont rien d’autres que des Français du Canada. Ce serait de la nostalgie malveillante.
Il s’agit ici d’affirmer que l’histoire du Québec, ainsi que son destin, seront toujours étroitement liés à celui de la France. Et que cette relation fraternelle ne se limite pas seulement à la conclusion de deals entre les deux nations.