Mais oui, la Terre est ronde !

La nation québécoise vue par les souverainistes québécois


Ne trouvez-vous pas révélatrice toute cette controverse actuelle, chez les fédéralistes, sur l'opportunité de reconnaître ou non la nation québécoise ? Personnellement, ça me fait penser à cet ancien débat où certains disaient que la Terre était ronde et tournait autour du Soleil alors que d'autres affirmaient le contraire, parce que le Grand manitou avait dit que c'était ainsi, tandis que d'autres, tout en admettant que, oui, elle était ronde, intimaient qu'il ne fallait surtout pas le dire ouvertement car cela pourrait favoriser les tenants de la science, voire même mettre en danger la foi du peuple...
N'est-ce pas ce qui se passe actuellement quand certains libéraux affirment que la nation québécoise n'existe pas (parce que Pierre Elliott Trudeau l'a dit et que le Canada anglais en est convaincu), alors que d'autres, au Québec surtout, ne pouvant s'empêcher de reconnaître qu'elle existe, ne savent pas trop comment on pourrait faire admettre la chose au reste du Canada ?
Rendons justice à ceux qui ont décidé de jouer franc jeu et de forcer tout le monde à mettre cartes sur table. Le Canada est-il prêt, oui ou non, à reconnaître que le Québec existait bien avant lui et qu'il constitue et a toujours constitué une nation dans tous les sens du terme ? Et, sur la base de cette reconnaissance, est-il prêt à se mettre à la table pour négocier de bonne foi une nouvelle relation avec la nation québécoise ? Car c'est cela, au fond, que soulève le débat actuel et qui lui donne un sens.
Par ailleurs, soulignons l'hypocrisie de tous ces fédéralistes qui, continuellement, font valoir aux Québécois la possibilité d'un renouvellement du fédéralisme canadien alors qu'ils sont convaincus que le reste du Canada ne veut absolument pas en entendre parler. En réalité, ce qui terrifie un grand nombre de nos fédéralistes québécois parmi les plus influents, c'est que la question du Québec revienne sur le tapis. « Cachez ce sein que je ne saurais voir » disait Tartuffe. On peut toujours en discuter entre nous, mais il ne faudrait surtout pas soulever la question auprès du Canada anglais, puisqu'il est presque assuré que celui-ci va tout simplement nous envoyer paître. Catastrophe, qui détruirait d'un coup toute leur argumentation. Car ce que ces chantres du fédéralisme canadien prêchent aux Québécois, c'est de faire confiance au renouvellement de la fédération. Soyez patients, nous disent-ils, et ça va changer... un air bien connu depuis que Pierre Elliott Trudeau a mis sa tête sur le billot en faveur du changement lors du premier référendum et que Jean Chrétien s'est engagé à promouvoir le caractère distinct du Québec lors du deuxième.
Déjà, il y a au moins deux enseignements qu'on peut tirer de ce débat, même s'il n'est pas encore terminé. Le premier, c'est qu'il révèle à quel point le reste du Canada reste présentement fermé aux aspirations du Québec. Pour ceux qui se rappellent l'échec des Accords du Lac Meech, il n'y a rien là de surprenant, mais quelques éternels optimistes pouvaient peut-être encore croire que les résultats du référendum de 1995 auraient pu provoquer une quelconque ouverture. N'y avait-il pas eu le grand « love-in » de la veille du référendum ? En réalité, tous les commentateurs sont unanimes à dire que la situation constitutionnelle est plus bloquée que jamais et que le reste du Canada éprouve à cet égard le même ras-le-bol que Jean Chrétien, ce qui n'est pas peu dire.
Le deuxième enseignement, c'est que la question du Québec, loin de s'estomper, comme plusieurs l'auraient souhaité, reste au centre même de la vie publique canadienne. Non seulement, on ne peut pas éviter d'y faire face, mais il devient de plus en plus évident qu'il ne pourra y avoir, si on veut la résoudre, que deux solutions possibles : soit une réforme en profondeur de la constitution canadienne pour répondre aux aspirations du Québec, soit la souveraineté québécoise telle que préconisée depuis quarante ans par le Parti Québécois. Car, si on veut pouvoir aller de l'avant, il faudra bien reconnaître un jour que la Terre est ronde et qu'elle tourne autour du Soleil.
Comme c'est embêtant ! Il serait tellement plus simple de continuer de croire que la Terre est plate. Pourquoi s'embarrasser de la réalité ?


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1 commentaire

  • Archives de Vigile Répondre

    1 novembre 2006

    Enfin, il me semble que lorsque l'on constate l'impossibilité de réformer le fédéralisme canadien à la satisfaction des aspirations profondes de notre peuple; que l'on condamne fermement l'hypocrisie des fédéralistes québécois en la matière; que l'on critique avec véhémence le refus du Canada anglais et de ses représentants de reconnaître la nation québécoise dans son entièreté; pourquoi alors conclure que deux solutions s'offrent aux Québécois, soit une réforme en profondeur du fédéralisme canadien, soit la souveraineté?
    Il me semble que l'histoire récente de l'échec de Meech et celui de Charlottetown démontre éloquemment qu'il n'y a qu'une seule voie possible pour l'avenir du Québec, soit celle de l'indépendance, seule solution qui rendra enfin notre nation libre de définir sa propre destinée.
    D'ailleurs, n'est-ce pas là la conclusion finale la plus importante du Rapport Bélanger-Campeau? Alors, qu'attendons-nous? Soyons courageux et cohérents, faisons la l'indépendance! Nul besoin d'en demander la permission au Canada.
    Éric Tremblay
    Avocat et fervent indépendantiste
    Auteur de plusieurs articles parus sur Vigile dont "CHAREST: LE ROI-NÈGRE DU FÉDÉRAL"(1er novembre 2005).

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