En réaction à la chronique de Michel David parue dans Le Devoir du 30 janvier sous le titre Le pays flou, j’endosse entièrement la pertinence de ses propos notamment le cul-de-sac implacable auquel est confronté le Québec face à ses velléités identitaires, et cela malgré l’adoption de lois telles la Loi 96 sur le français, langue officielle et commune du Québec et la Loi 21 sur la laïcité de l’État.
Dans cette foulée, Michel David aborde l’épineux dossier de l’immigration en ces termes: «Depuis la création du ministère de l’Immigration du Québec, en 1968, on ne peut pas reprocher aux gouvernements successifs de ne pas avoir essayé d’expliquer aux immigrants que la société qui les accueille se veut résolument française et qu’elle est attachée à des valeurs qu’ils doivent respecter, à défaut d’y adhérer pleinement». En parlant du rapport «flou» de l’immigrant avec le reste du Canada, «comment le blâmer de ne pas y voir clair? À l’instar d’Elvis Gratton, de nombreux Québécois dits «de souche» ne semblent pas savoir eux-mêmes qui ils sont», lance le chroniqueur. Une question choc qui fait émerger toute la complexité identitaire des Québécois.
Depuis l’arrivée de la Coalition avenir Québec (CAQ) au pouvoir en 2018, François Legault clame sur tous les toits les avantages liés au «nationalisme» québécois soutenu par un gouvernement fortement majoritaire. Et pourtant, force est de constater les nombreux échecs que le premier ministre a dû encaisser à l’égard de ses demandes auprès d’Ottawa. Or «ce que l’ancien souverainiste qu’est M.Roberge ne veut pas dire est que le maintien du Québec dans la fédération le condamne à subir ce multiculturalisme «vicieux» —une «caractéristique fondamentale» du Canada, reconnue par sa Constitution», argue Michel David.
Les Québécois ont été consultés par deux fois sur leur indépendance et par deux fois, ils y ont apposé leur veto. En conséquence, «il est douteux que la loi-cadre élaborée par M.Roberge puisse renforcer la capacité d’intégration du Québec suffisamment pour y faire face sans un changement de paradigme qui lui permettrait d’échapper aux contraintes que lui impose son appartenance à la fédération canadienne», allègue Michel David. Dans le cas contraire, le Québec sera condamné inexorablement à une mission impossible.
https://www.ledevoir.com/opinion/chroniques/837316/chronique-pays-flou
Henri Marineau, Québec
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1 commentaire
François Champoux Répondre
2 février 20252 février 2025
Bonjour M. Marineau,
Un Québec souverain, si un jour les Québécoises et les Québécois osent se voter le pouvoir d’une indépendance politique (comprendre de faire naître un pays qui s’appellera «Québec») sera nécessairement multiculturel.
La mission impossible dont vous faites référence est celle de voir naître un pays «Québec» qui ne serait pas multiculturel : il serait d’une seule culture, sans respect aux autres cultures du monde entier, aux autres races humaines nées de la mixité des personnes et leurs nuances ethniques.
Il faut bien réaliser (c’est-à-dire nous conscientiser à la réalité du monde planétaire) que les humains ne sont pas tous des blancs purs, au langage unique du français. Pas même la France est un pays sans l’existence de plusieurs cultures. Il faut cesser cet aveuglement volontaire et faire face à la réalité, sinon, nous nous enlisons dans un dangereux racisme et nous devenons des colonialistes pires encore que les colonialistes d’antan en notre propre terre, en notre propre coin de «pays». Souvenons-nous ce que nous avons fait aux cultures autochtones.
Comme me l’a bien enseigné Dany Laferrière et Pierre Vallières (et certainement beaucoup d'autres), nous sommes toutes et tous des Nègres, et si nous refusons de le reconnaître, nous nous prétendons alors de ces races dites «supérieures» et nous nous enfermons dans notre croyance. Nous nous berçons d’illusions de penser et de discourir que d’autres doivent nous libérer : qui sont ces autres? La liberté, c’est à chacune et à chacun de nous de la faire vivre en tout respect de tout un chacun et quotidiennement. Ça, ce n’est pas une mission impossible, mais un devoir d’humanité. Sans ce devoir à accomplir tous les jours, sans cet effort de compréhension à faire, nous nous encroûtons mutuellement dans cette foi de l’impossible mission : nous nous prétendons supérieurs et d’une culture unique et seule à faire vivre. Là est cette mission impossible, et là est une erreur de constitution d’un pays.
La mission est possible; d’autres pays dont leur population est semblable à la nôtre la font vivre chaque jour. C’est cette volonté d’une constitution qui respectera tout un chacun qui fait ces pays où il fait bon vivre, multiculturel et respectueux : en paix. Dire que nous sommes en face d’une mission impossible, c’est dire officiellement qu’un Québec souverain sera toujours impossible sans une race unique, une culture unique, et une langue française unique.
Il est possible de proclamer cette langue française officielle pour le pays «Québec» comme base de respect mutuel d’échange communal, national et langagier, mais il faut aussi proclamer une constitution qui saura respecter le multiculturalisme : le monde entier deviendra cela, ou sera une planète irrespectueuse et en guerre totale permanente.
Les États-Unis qui est un pays multiculturel est sur la voie de perdre ses acquis difficilement réalisés depuis la fin officielle de l’esclavagisme. Leur fragilité sera aussi la nôtre, pays officiel ou non; n’en doutons jamais.
La paix des pays est un travail quotidien, tout comme la vie d’une constitution d’un pays. Nous sommes tous des voisins, des «racistes» comme Dany Laferrière nous y a sensibilisés, et qui ne s’ignorent pas ou sinon, nous nous faisons la guerre et la paix se meurt.
François Champoux, Trois-Rivières