On savait déjà que le gouvernement Trudeau déposera un projet de loi ce printemps pour réviser sa loi sur l’aide médicale à mourir. Le ministre de la Justice David Lametti va plus loin et se dit ouvert à de nouvelles clauses, notamment en ce qui concerne les adultes en pertes cognitives et certains mineurs.
En septembre, la Cour supérieure du Québec a déclaré inconstitutionnelle la clause sur la mort raisonnablement prévisible inscrite à la loi fédérale et a ordonné à Ottawa de changer sa loi au plus tard au mois de mars.
En entrevue avec Radio-Canada, mercredi, M. Lametti a indiqué vouloir remuer ciel et terre
afin de respecter cet échéancier.
Il ne faut jamais oublier, quand on parle d'assistance médicale à mourir, qu'on parle de gens malades, en train de mourir
, a-t-il lancé d'emblée.
Plus encore, le ministre de la Justice a dit jongler avec l’idée de permettre aux gens qui souffrent de maladie neurodégénérative, comme la maladie de Parkinson, de demander l’aide médicale à mourir de façon anticipée, soit avant d’être incapable d'exprimer leur consentement.
La possibilité que des jeunes gravement malades et âgés de 14 à 17 ans puissent avoir recours à l’aide médicale à mourir, avec des balises psychologiques en place, est également envisagée.
Il faudra voir si on a un fort consensus. Les sociétés canadienne et québécoise de 2019 ne sont pas les mêmes qu’en 2015. Il y a une évolution, une acceptation plus grande de l’aide à mourir au Canada.
Le ministre a reconnu du même souffle que la tâche est colossale. Il se dit ainsi prêt à demander une extension aux tribunaux, s’il est incapable de réformer la loi dans les délais prescrits.
Longue route à suivre
Il y a toutefois beaucoup d’étapes à franchir avant de réclamer une extension. Le gouvernement doit démontrer qu’il agit de bonne foi et qu’il est sur la bonne voie, avec une marche à suivre bien définie. Il n’y a pas de normes fixes à respecter pour demander une extension, explique le ministre. C’est plutôt une interprétation juridique de ma part.
L’autre option sur la table est de régler la question de la mort raisonnablement prévisible à temps pour le 11 mars, tout en gardant une révision en profondeur de la loi pour cet été. Le gouvernement avait promis de revoir la loi tous les cinq ans, une échéance qui arrive en juin.
Les partis d’opposition ne sont pas contre l’idée d’avoir plus de temps pour débattre d’un dossier aussi délicat.
Je pense que c'est l'occasion ou jamais de soulever toutes les pierres pour être sûrs que cette fois-ci, on fait bien le travail
, explique Alexandre Boulerice, député du Nouveau Parti démocratique.
Le député conservateur Alain Rayes souhaite pour sa part que le gouvernement prenne son temps, afin de respecter la sensibilité de cet enjeu et des êtres humains qui sont touchés
.
J'imagine qu'ils vont nous consulter, encore plus avec un gouvernement minoritaire, pour qu'on puisse en discuter ensemble autour de la table.
Le député bloquiste Luc Thériault, lui, espère que les libéraux vont créer un comité spécial pour étudier la question aux Communes.
Ça nous permettrait d’avoir une démarche transpartisane où tout le monde peut faire avancer la discussion. Peut-être même que Jody Wilson-Raybould, responsable de la première mouture de la loi, pourrait participer
, propose-t-il.
La tâche qui attend le ministre de la Justice n’est pas simple, s’il veut respecter les délais imposés par la Cour. Il doit agir rapidement, pour alléger les souffrances des uns, mais aussi de façon réfléchie pour apaiser les craintes des autres.