Parole de fou : brûlons le Coran

L’Empire - l'instrumentalisation du religieux

Oui, le pasteur Terry Jones, dont l’église ne compte qu’une cinquantaine de membres, à Gainesville, Floride, est un tata. Le pasteur, vous le savez probablement, compte brûler le Coran, le 11 septembre prochain. Il est temps, dit-il, que l’Amérique confronte l’islam radical. M. Jones a peur, semble-t-il, que l’islam prenne le contrôle de son pays.

Il n’en fallait pas plus pour que d’autres obscurantistes, à l’autre bout du monde, de ceux qui prennent le Coran au pied de la lettre, plutôt que la Bible, se sentent personnellement insultés. Manifs à Kabul et en Indonésie.

Oui, même pour un intégriste chrétien, Terry Jones est dans le champ, en plus d’être haineux et stupide : tu sais que t’es dans le champ quand le chef des armées de l’OTAN en Afghanistan, un « all-american hero » au-dessus de tous soupçons comme le général David Petraeus, affirme publiquement que de brûler des exemplaires du Coran met en danger la vie de troupes américaines…

Donc, Terry Jones est un illuminé. Mais Jones est aussi un symptôme, j’allais dire une excroissance, de notre époque hyper-informée, où il n’y a plus de cycles de nouvelles médiatiques à proprement parler, mais bien un monstre qu’il faut nourrir à chaque heure, chaque minute, chaque seconde. CNN, FOX, BBC, Twitter, les sites des journaux, les blogues perso, Facebook : tout cela constitue le monstre que je vous décris. Ce monstre qu’il faut nourrir, il trouve hyper-nutritif un bozo comme Terry Jones, parce que Jones donne de la bonne calorie au monstre, en faisant ses singeries. Le hic, c’est que le monstre donne bien sûr aux Terry Jones de ce monde une importance qu’ils n’ont pas.

Pensez-y : Terry Jones ne représente personne, sinon quelque 50 chrétiens de son église. Il ne parle pas au nom du gouvernement des États-Unis ni d’une importante association d’évangéliques. C’est un gars, dans une église, comme il en existe des milliers aux États-Unis. Mais l’époque donne une tribune démesurée, vertigineuse aux fous solitaires qui, jadis, auraient prêché dans le désert. Aujourd’hui, un fou peut en provoquer des milliers, sans même avoir à se déplacer, à l’autre bout du monde, par la seule force de cette tribune qui ne reflète pas la réalité. Formidable.


Laissez un commentaire



Aucun commentaire trouvé