La Presse dévoilait il y a quelques jours qu’Ottawa prolongeait l’existence du Programme de contestation judiciaire (PCJ), une nouvelle qui aurait dû avoir plus d’écho. Celui-ci est en fait une arme politique parfaite pour les fédéraux. Les rafales qu’il tire sont silencieuses, camouflées sous une fausse vertu de protections des droits fondamentaux. Créé par le fédéral mais géré par l’Université d’Ottawa, le PCJ sert à nier l’existence de notre nation en finançant des contestations judiciaires en vertu de la charte. Création de Pierre Trudeau, il sert à instrumentaliser les tribunaux fédéraux à des fins politiques.
Trudeau a toujours rejeté l’idée des deux peuples fondateurs. Le Canada devait être un pays bilingue et multiculturel. Étant donné la présence de Canadiens anglais au Québec et de Canadiens français ailleurs au pays, il était hors de question que le gouvernement québécois obtienne un statut particulier du fait qu’il représentait une nation. La solution passait par la mise en place du bilinguisme, notamment en insérant dans une charte le droit fondamental à l’école anglaise au Québec et française dans le ROC. Or l’éducation en français ou en anglais n’est pas un droit mais plutôt une compétence exclusive des provinces. Or, avec la charte, Trudeau a inventé de faux droits et a donné le pouvoir aux juges fédéraux d’imposer le bilinguisme en éducation. Ainsi, les magistrats d’Ottawa peuvent ordonner au Québec d’élargir l’accès à l’école anglaise et aux autres provinces de faire de même avec les écoles françaises.
Dans cette perspective, toutes les provinces sont bilingues, donc égales, ce qui permet de nier l’existence de notre nation, tout comme le multiculturalisme, un principe inclus dans la charte et en vertu duquel les Québécois sont réduits au rang d’une minorité parmi d’autres.
C’est ici que le PCJ entre en scène. Le taux d’assimilation des minorités francophones hors-Québec est dramatique. La fiction du Canada bilingue résiste mal à cette réalité. Le PCJ donne donc de l’argent aux minorités linguistiques pour aller en cour. Ainsi, les Canadiens anglais du Québec peuvent contester la loi 101 et bilinguiser la province. Les francophones du Yukon, pour prendre un exemple de 2015, ont reçu des sous du PCJ pour obtenir des tribunaux qu’ils forcent leur gouvernement à leur donner des écoles françaises. Évidemment, ce gain ne change rien au fait que la langue de Molière au Yukon relève du folklore. Il permet toutefois aux fédéraux et aux médias comme Radio-Canada de présenter le tout comme une grande victoire pour le bilinguisme.
Le PCJ opère de la même façon quand il s’agit de défendre le multiculturalisme. Sous couvert de défendre les droits de la charte, il finance par exemple les minorités qui veulent obtenir des accommodements religieux, le tout au détriment de nos valeurs laïques.
L’un des volets du programme consiste à financer des études de faisabilité. Est-ce que telle affaire peut faire l’objet d’une contestation? Il ne s’agit pas de lancer une démarche formelle mais juste de voir s’il y a effectivement assez de motifs pour aller de l’avant. C’est à ce titre que j’ai moi-même demandé de l’argent, l’automne dernier, dans le but éventuel de contester un renvoi de la Cour suprême datant de 1982, lequel a privé le Québec de son droit de veto. Mon livre, La Bataille de Londres, a dévoilé qu’au moins deux juges ont passé de l’information confidentielle au gouvernement fédéral, ce qui est illégal.
On a refusé ma demande. Il y a deux ans pourtant, le PCJ a versé de l’argent à la commission scolaire English Montreal pour contester la loi 21. Le fait qu’un tel organisme accepte ces fonds constituait une violation des lois québécoises, situation que j’ai dénoncée et qui a forcé l’institution à reculer. Cette infraction ne posait aucun problème pour le PCJ. Par contre, on dit non à un historien qui lui respecte la loi.
Tout ça peut sembler ironique de la part d’un organisme administré par des juristes. Cela s’explique toutefois quand on comprend que son rôle consiste à défendre le régime, même quand des gestes illégaux sont commis.