Proportionnelle, coalition souverainiste et autres tâches politiques

Que les opposants à la proportionnelle le comprennent : nous sommes rendus ailleurs

2011 - actualité souverainiste

Le scrutin britannique/canadian uninominal à un tour : une formule devenue caduque
Plusieurs persistent à croire que la proportionnelle nuirait au long travail consenti depuis des décennies à l’émancipation de la nation. Le socle sur lequel s’appuie cette résistance s’effrite cependant à chaque jour un peu plus.

Le 2 mai, au Canada, s’il y avait eu proportionnelle, le Bloc aurait aujourd’hui 18 députés au lieu de 4, et le NPD 32 au lieu de 59. Le Bloc serait le deuxième parti au Québec, et serait reconnu comme parti officiel.

S’il y avait des élections aujourd’hui, au Québec, et si Legault était de la partie, le PQ se retrouverait avec trois ou quatre députés, QS peut-être avec deux. Au mieux, six pour les deux. Avec la proportionnelle, la différence serait de taille : les deux partis auraient ensemble environ 35 députés sur 125, et le PLQ serait bon dernier avec 27 ou 28 députés.
Que les opposants à la proportionnelle le comprennent : nous sommes rendus ailleurs.
L’heure est venue de se doter d’un mode de scrutin républicain, de jeter par-dessus bord l’héritage de 1867.
Conséquemment, la construction de la nation prend une autre tournure. Celle d’agir sur notre propre terrain. Et ce terrain, il se cultive par nous-mêmes. Évident, mais pas simple.
Scrutin uninominal à un tour : le PQ persiste
Le PQ a longtemps jonglé avec l’idée de la proportionnelle, mais sans jamais oser réformer le système. Il est vrai que le système uninominal à un tour l’avantageait, une façon comme une autre de contrer la fameuse « primes aux urnes » dont profite toujours le PLQ (ce fameux vote homogène anglophone perpétuellement en sa faveur). QS, on le sait, est un ardent défenseur du scrutin proportionnel. Pour permettre à la gauche d’être mieux représentée. C’est de bonne guerre.
Pour ma part, je suis en faveur, depuis un certain temps déjà : la proportionnelle, compte tenu de l’évolution politique du Québec, peut maintenant s’avérer un outil aidant pour créer la république – ou à défaut, construire la nation -, pas seulement pour assurer une meilleure représentation de la gauche ou d’une droite libertarienne. Mais cela n’est pas pour demain, et pour cause.
Les temps ont changé, et quitte à me répéter une énième fois, nous sommes bel et bien entrés dans une nouvelle ère. Plusieurs le constatent, mais toujours nombreux sont ceux qui croient que nous ne vivons qu’un creux de vague.

Le PQ ne rallie plus qu’une partie de la gauche indépendantiste, et la droite tente depuis un bon bout de temps de faire son lit ailleurs. Nous le savons, mais la nomenklatura du PQ est convaincue que le parti peut encore coaliser en son sein toutes les tendances, au point d’évacuer la question de la proportionnelle de son programme lors de son dernier congrès. Le PQ persiste à croire qu’il EST la coalition arc-en-ciel souverainiste. Ce qui n’est plus le cas depuis 1995. Compte tenu de la nouvelle conjoncture, une telle omission (éjecter la proportionnelle du programme) exprime en soi une profonde tendance suicidaire.

Le PQ n’est pas la vérité, la solution ultime. La dialectique de la vie politique nous force à redéfinir l’action. Si l’outil d’émancipation qu’a pu être le PQ tourne à vide, c’est que le citoyen ne s’y reconnaît plus. Loin sont derrière nous la Grande Noirceur, la Révolution Tranquille, le référendum de 1980, le rapatriement de la Constitution, la Nuit des longs couteaux, le fiasco de Meech, le « peak » de 1995. Le PQ traîne avec lui une image qui génère de plus en plus une perception négative. Le temps use.

Constituer une coalition indépendantiste large résolue à prendre le pouvoir
Lions ce qui précède à ceci : dans un texte récent intitulé « Un nouveau parti indépendantiste? », Patrick Bourgeois, s’inspirant de l’expérience de la Catalogne, prône l’existence de plusieurs partis indépendantistes. Non pas une multitude de partis sectaires, mais bien un bloc de partis indépendantistes capables de rejoindre des segments importants de la population. Un QS à gauche, un PQ social-démocrate branché sur la gouvernance souverainiste, et pourquoi pas un parti de purs-et-durs (les « pressés »).

Je suis partiellement d’accord avec Bourgeois, sauf que dans le système électoral actuel, le mouvement indépendantiste se retrouverait totalement marginalisé politiquement et sur le plan de la visibilité. Le scrutin proportionnel, s’il existait, permettrait de créer des alliances, voire même élaborer un programme commun. Malgré un Legault-CAQ ayant « le vent dans les voiles », nous pourrions espérer une députation plus que respectable. Or, la proportionnelle n’existe pas. Existe seulement le mode uninominal à un tour, le système le moins démocratique qui soit en termes de représentativité.

Alors, que faire?
Faire de la politique autrement, j’en suis. Reconstruire le mouvement – toutes tendances confondues- en tenant compte de la réalité concrète d’aujourd’hui, c’est ce qui importe. Mais qui pourra reconfigurer tout cela?
Le PQ, aujourd’hui force stagnante, pourrait très bien survivre à une mort appréhendée s’il comprenait un tant soit peu la dynamique du mode de scrutin actuel. D’abord, il lui faut comprendre que le bipartisme « à la britannique » ne sert plus que l’ordre établi. L’accepter lui permettra de jouer un rôle essentiel dans le processus de notre émancipation. Mais il ne sera pas le seul à le faire. Ça aussi il lui faudra l’accepter et procéder aux rapprochements qui s’imposent.
QS brille tout autant par son entêtement : des politiques de gauche, ce n’est possible que si on dispose de tous les leviers pour les rendre effectives, et en ce sens, l’indépendance est nécessaire pour que l’État puisse agir. Si le Québec se louisianise, QS ne pourra espérer rien de plus que de devenir un NPD provincialiste au sein d’un État canadian ayant réalisé – et une fois pour toutes – l’essentiel de son « nation building ». QS doit choisir : le Canada ou œuvrer à construire l’État de la nation. On ne peut espérer bouffer à deux râteliers sans risquer de s’écarteler jusqu’à ce que mort s’ensuive. Que les indépendantistes de ce parti se lèvent et parlent fort.
Je suis de ceux qui croient en la capacité de l’humain, collectivement parlant, de se surpasser, en autant qu’il accepte de quitter un tant soit peu son univers de confort et d’indifférence, tel que défini par Arcand au lendemain de la défaite référendaire de 1980. Legault est de ceux qui pensent que cette acceptation tranquille de notre infériorisation s’avère un obstacle insurmontable. Baisser les bras quand d’autres alternatives sont envisageables? S’enferrer et se figer dans un système créé par d’autres qui par essence nous condamne à avancer nos pions sur un échiquier conçu dès l’origine pour nous mater? J’y vois là plus de défaitisme que de lucidité.
Il faut donc innover, se libérer du carcan néocolonial de 1867. La proportionnelle n’est pas pour demain, alors forçons le jeu. Pensons à créer un bloc historique, non pas dirigé par un seul parti, mais constitué de toutes les composantes de la nation, incluant les partis.

Par exemple, les démissionnaires du PQ (je ne parle pas de Benoît Charrette), pourraient s’impliquer au sein d’un mouvement visant à constituer une coalition. Curzi semble ouvert à l’idée, Lapointe et Beaudoin, moins. Jean-Martin Aussant, à mon avis, se situe dans une classe à part. Il a l’étoffe du leader intellectuel, et idéologiquement il se situe au centre. On le dit ouvert à la création d’un nouveau parti, mais à mon avis il aurait intérêt à énergiser l’idée de créer une coalition. Avec Curzi (je ne présume rien des relations qui existent entre les deux hommes), pourrait-il constituer le chaînon manquant? Ce chaînon n’étant rien de moins que l’émergence d’une société civile apte à se définir et à devenir agissante sur le plan politique. Imaginons un seul instant l’impact que pourrait avoir une coalition combinant PQ, QS et un rassemblement unifié de la société civile connecté avec le citoyen (je pense ici à Cap sur l’indépendance). Et que dire si un homme de la trempe de Gilles Duceppe se décidait à œuvrer pour le déploiement et l’unification de cette société civile? Je rêve.
Utopie diront certains. Voie obligée, affirmeront les audacieux. Une coalition intelligente porteuse de changements durables pourrait-elle voir le jour d’ici les prochaines élections? C’est en toute tristesse que je meurs de rire… Pourtant, c’est à partir d’aujourd’hui qu’il faut la construire cette coalition qui intègrera tant les partis que la société civile. Si elle ne voit pas le jour d’ici le prochain scrutin, le mouvement risque de se retrouver au fin fond des limbes de l’insignifiance, en termes de représentation à l’Assemblée nationale. Peut-être nous faudra-t-il collectivement aboutir à ça, comme nation, pour comprendre que notre résilience n’est pas éternelle, et que cette même résilience – il faut le dire – nous confine à la médiocrité et à notre disparition dans un contexte de mondialisation irréversible où les lois seront dictées par les oligarques soucieux avant tout de réduire la démocratie en un rien passéiste où le citoyen aura le statut d’Intouchable.
Mais pour faire cette coalition, les partis et les forces coalisées devront accepter de faire les compromis qui s’imposent en l’absence de proportionnelle. Tiraillages en perspective. 250 ans de colonialisme britannique et de néo-colonialisme canadian, que nous avons par trop intégrés en nos gènes, nous prédisposent mal à reconfigurer un jeu qui serait à notre avantage. Profondes sont les racines de la domination, dures ou subtiles, quand on n’a jamais connu l’indépendance.
Vigile : un espace dédié au changement ou à la détestation des chefs du PQ et de QS?
Nous sommes plusieurs à croire sur Vigile en la nécessité de constituer une coalition qui irait chercher les meilleurs d’entre-nous pour qu’ils s’associent à l’élaboration d’un programme commun. L’idée fait son chemin, mais les résistances sont opiniâtres. Oscar Fortin, dans son texte du 22 juin sur Vigile, est de ceux qui souhaitent dépasser les vieux paradigmes :
« Il faut, me semble-t-il, ne rien négliger pour qu’une véritable coalition soit formée dans les meilleurs délais. Que quelqu’un, quelque part, prenne l’initiative de réunir les principaux acteurs et actrices de ce grand projet de l’indépendance. Qu’ils aient tous et toutes l’opportunité de s’exprimer, que des comités « ad hoc » approfondissent les divers points de vue et que des propositions soient apportées pour résoudre les différents (sic). Ce sera un premier exercice de faire de la politique autrement et de démontrer ce dont nous serons capables une fois indépendants. »
Un cri du cœur, une volonté de bâtir la citoyenneté, un profond désir que les partis fondent leur action autrement. En impliquant la société civile. Oscar Fortin n’est peut-être plus jeune, mais il se situe plus loin que ces « vieux jeunes » du PQ qui ont demandé à Parizeau de leur faire confiance. Quand on est député du PQ, on ne fait pas carrière, on lutte pour l’indépendance avant tout, et on assume la raison d’État par devoir, et on gère l’État non pas comme gestionnaire, mais comme élu responsable chez qui domine l’idéal : construire la nation sans compromis. Surtout, on lutte pour la république, celle du citoyen qui au gré du temps forgera son État, avec ses hauts, ses bas, ses coups de gueule et ses révoltes.
On dit du PQ qu’il devrait s’investir de l’instinct du tueur. Le PQ n’a jamais vraiment eu cet instinct, car il est à l’image de ce que nous sommes : peuple conquis, mais en même temps affadi par nos gains durement gagnés, entourloupé dans un pattern de confort et d’indifférence. Cessons de taper sur le messager comme s’il était le responsable de notre incapacité collective de choisir une bonne fois pour toutes la république. Nous, les Québécois, sommes responsables, point à la ligne. Et si le PQ se décide une fois pour toutes à assumer son programme de gouvernance souverainiste – programme légitime et en phase avec un certain Québec - moi, je dis oui. La voie unique n’existe pas et le pragmatisme n’exclut pas des gains, en autant que ce pragmatisme soit tactique et non pas le fondement de la stratégie. Le puriste détestera, mais rien ne l’empêche de s’investir dans ce qui lui semble le mieux. Pour ma part, tout comme l’Engagé qui l’a affirmé sur ce site, je peux très bien appuyer un projet de charte pour la laïcité proposé par le PQ le samedi et soutenir le lendemain Cap sur l’indépendance.
Je préfère la dialectique aux confrontations dichotomiques.

Quant à QS, je dis que ce courant doit exister, mais il s’égare lui aussi en propos partisans souvent teintés de dogmatismes délétères. Oui, dans un système uninominal à un tour, QS divise et affaiblit le mouvement, donc la nation. Donner corps à la gauche, politiquement parlant, ne garantit en rien la venue de la république. Au lieu de stigmatiser ce parti, exigeons de lui qu’il oublie la partisanerie qui l’habite – ce qui le place au même niveau que les « vieux partis » - en l’incitant à réfléchir sur le bien-fondé d’une coalition nationale : une gauche intelligente y trouverait son compte. Il y a des gens ouverts à ça chez QS, encourageons-les à poursuivre le débat.

Conclusion
À court terme, et d’ici les prochaines élections, j’estime que rien de constructif ne pourra s’accomplir. Je suis pessimiste. Deux ans, c’est court en politique, mais pour prendre acte de la donne actuelle, i.e. nous sommes dans une nouvelle ère, c’est peu pour modifier nos paradigmes, et ensuite mobiliser une nation éclatée, morose, pour ne pas dire devenue cynique. Pour mobiliser une nation, cela prend du temps. J'espère seulement me tromper...
Le mouvement indépendantiste doit prendre acte de la réalité. Doit-il investir pour reconstituer le Bloc? Réinvestir le PQ pour le radicaliser? Construire la gauche via QS? Créer un nouveau parti? Mobiliser la société civile en construisant Cap sur l’indépendance? Et qu’en est-il de l’idée de créer des États généraux pour l’indépendance, idée pas si bête qui nous obligerait à faire le point dans le temps pour s’ajuster et comprendre que le combat pour la république s’inscrit désormais dans une perspective d’indépendance des États face aux oligarchies qui traînent à chaque jour un peu plus dans la boue « du non-être » la représentativité politique des peuples? Tout cela réclame des énergies colossales, mais au lieu de prioriser, on se cherche, on part à la chasse aux coupables, et ainsi les énergies se perdent. Les egos se confondent, l’anathème est de mise. Khadir est un crypto fédéraliste, Marois est une misère de l’esprit, Aussant est un génie, sans Parizeau point de salut. Basta! Ce défoulement de gérants d’estrade en épuise plus d’un. Les Brutus n’ont jamais ramené la république à Rome, bordel!
Qu’on accepte aussi que le PQ, avec sa gouvernance souverainiste, constitue un élément du tout. Accepter ne veut pas dire mettre un terme à la critique, s'entend. Bien des éléments de son programme pourraient s’inscrire dans un programme commun (Constitution québécoise, charte de la laïcité, indépendance énergétique…). Qu’on cesse aussi de démoniser QS : le 10% de la population qui se reconnaît en lui est constitué en très, très grande majorité de souverainistes. Et si on se doit de les critiquer – PQ et QS -, ce sera pour forcer l’establishment des deux partis à se concerter. Ras-le-bol des « mon père est plus à gauche que le tien », « Non aux partis, pour un mouvement populaire! » et autres «gouvernance souverainiste = affirmation nationale ». La ligne droite en politique, ça n’existe pas, sauf quand survient le moment ultime, celui d'asséner le coup de grâce.
On prend le temps qu’il faut : on se concerte, on développe une doctrine de l’État qui nous est propre (le Canada en a une, lui), on élabore une stratégie souple, on évalue la pertinence de créer une coalition qui inclurait la société civile et le citoyen, et on fait tout pour isoler les forces de l’inertie avec pour objectif de mettre en branle processus d’accession à l’indépendance. Au pire, à défaut de pouvoir réaliser l’indépendance en dépit d’une prise du pouvoir (50% + 1 non atteint, par exemple), restera tout de même la possibilité de mettre en œuvre des éléments forts d’un programme commun : main mise sur nos richesses naturelles, contrôle du territoire, redéfinition du rôle des régions, constitution québécoise transitoire, charte de la laïcité, scrutin proportionnel, politique de développement durable, indépendance énergétique, politique d’immigration, culture et langue, et ainsi de suite.

Pour ce faire, beaucoup de maturité politique est exigée. J’ai comme l’impression qu’il faudra attendre après les prochaines élections avant que quelques têtes s’allument...
Michel Gendron


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4 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    2 septembre 2011

    Avant de faire la promotion du modèle à deux tours, vous devriez voir le type de politiciens que ce modèle a engendré en France.
    Honnêtement, ce serait changer pour du pire.
    Ça vous tenterait pas un modèle politique ou les politiciens pourraient être renvoyer pour avoir mentie aux électeurs pendant la campagne? Et j'entends par mentir, promettre quelques choses qu'ils savent être irréalisable.
    À un ou deux tours, cela reste un système où l'image est prime sur les idées. Si vous désirez vraiment un changement, il faut un système qui supporte le concept de 'recall'. Encore là, la solution est dans la démocratie directe.

  • Gilbert Paquette Répondre

    11 août 2011

    M. Gendron, plusieurs têtes sont allumées déja et l'évolution des esprit peut aller plus vite qu'on le pense. Votre article est à la fois lucide et inspirant.

  • François Ricard Répondre

    7 juillet 2011

    Vers une plus grande démocratie
    Les deux principes essentiels de la démocratie sont le débat et l’égalité. Et son fonctionnement optimal réside en une nette division des pouvoirs : législatif, judiciaire et exécutif.
    Débat
    Qui dit débat, dit information. Un citoyen, pour débattre d’une question, doit être informé. Il a même un droit fondamental à cette information. Le droit à l’information est le droit fondamental de l’individu et de la collectivité de savoir et de faire savoir ce qui se passe et qu’on a intérêt à savoir.
    Le citoyen aujourd’hui est mal informé. Les grands organes de presse sont souvent la propriété de financiers pour qui la liberté de presse consiste uniquement en la liberté de publier ou non ce que l’on veut, où l’on veut et de la manière que l’on veut pourvu que cela rapporte économiquement et politiquement. Heureusement que l’internet, du moins jusqu’à maintenant, permet de pallier les conséquences de cette information souvent tendancieuse.
    Egalité
    En une véritable démocratie, chacun doit avoir le même poids, la même influence.
    Le principe en cause : une personne, un vote.
    Il faut que toutes les opinions majeures soient justement représentées lors du débat, c’est-à-dire à l’Assemblée nationale ou au Parlement.
    Il faut aussi que le représentant ou député jouisse de la plus grande liberté possible afin qu’il puisse faire valoir les opinions non seulement de son parti mais aussi, et surtout, les opinions de ceux et celles qui l’ont élu.
    L’égalité veut aussi dire que personne, soit un individu ou un groupe d’individus, ne peut s’accaparer du système pour le dominer.
    Que se passe-t-il dans la vraie vie?
    A peu près toutes les démocraties existantes souffrent de carences soit dans l’application des principes soit dans le mode de fonctionnement ou soit dans les deux.
    Je veux m’attarder principalement aux systèmes canadien et québécois.
    Le système de style britannique
    Une gouvernance véritablement démocratique fait une nette différence entre les trois pouvoirs : législatif, exécutif et judiciaire. Le système britannique est totalement bancal et fait du premier ministre un vrai monarque .Il dirige les législateurs (ses propres députés, à cause de la ligne de parti, ne sont là que pour endosser ses mesures); il supervise l’exécution du tout en nommant ou en dégommant les ministres. De plus, il a une certaine influence, sinon une influence certaine, sur la nomination des juges. C’est en fait un véritable dictateur pour la durée de son mandat.
    Le système américain
    Le système américain fait une nette distinction des pouvoirs. Les politiques et les budgets sont votés par le Congrès, ou par le Sénat, ou part le Congrès et le Sénat. Cependant les députés ou sénateurs, bien qu’appartenant à des partis politiques, ne sont pas tenus de voter selon une ligne de parti mais bien plutôt selon leur conscience et selon les préoccupations de leurs électeurs.
    Pour cette raison, le système américain est démocratiquement supérieur au système britannique.
    Le financement des partis
    Le système américain fait une nette distinction des pouvoirs. Malheureusement ils ont perdu le contrôle de leur système à cause des caisses électorales. Eisenhower en 1958 avait averti ses compatriotes que le complexe militaro-industriel était à faire main basse sur leur gouvernement. Tous ses successeurs ont préféré ignorer son avertissement. Aujourd’hui, quand on y regarde de près, les Etats-Unis d’Amérique ne sont plus une démocratie mais une ploutocratie. Tout ce qu’il leur reste est le simulacre électoral qui est dominé par l’argent.
    Nous retrouvons le même phénomène au Canada, bien qu’à un degré moindre. Seules les personnes peuvent financer un parti et ce, à hauteur de 3 000$ annuellement. Au Québec, ce seuil est maintenant fixé à 1 000$.
    Combien, de la classe moyenne, surtout avec une famille, peuvent se permettre de donner 3 000$ ou même 1 000$ à un parti politique? Fort peu. Ce sont les riches qui donnent. Et non pas dans un but philanthropique. Et en plus ces riches reçoivent des crédits d’impôt qui, automatiquement, amènent la classe moyenne à défrayer une partie de ces dons sans qu’elle ne le sache.
    Si l’on veut tendre vers une certaine égalité pour tous, il faut accepter un financement public des partis et, sinon une interdiction de tout don, du moins une limitation qui empêche les riches de s’accaparer du tout. Le Parti Québécois propose 100$ comme plafond. C’est déjà beaucoup mieux que 1 000$. C’est le prix à payer pour avoir une véritable démocratie.
    Le débat
    Pour le débat, nous sommes représentés par les députés que nous nous donnons lors d’élections.
    Il est primordial que cette députation soit un éventail le plus riche possible de toutes les opinions les plus importantes qui ont cours, des régions économiques qui forment notre État et des personnes (hommes et femmes) qui peuplent notre pays.
    Notre système uninominal à un tour avec pluralité simple des voix crée des distorsions qui font que des pans entiers de la population sont sous-représentés ou pas représentés. On en trouve des exemples dans toutes les élections, aussi bien canadiennes que québécoises. Il permet aussi à un parti qui obtient 40% des suffrages, et même moins, d’obtenir une majorité de sièges soit au Parlement soit à l’Assemblée nationale et devient donc le gouvernement majoritaire pour cinq ans et le premier ministre, dictateur pour cinq ans. Pourtant tout ce beau monde, qui ne représente même pas 50% de la population, va imposer ses vues et ses façons de faire à l’État tout entier.
    Des changements nécessaires
    Nous nous devons de bonifier notre système démocratique. Si nous croyons véritablement en la démocratie, nous n’avons pas le choix. C’est devenu une nécessité.
    Donnons-nous une constitution qui établit une nette distinction des pouvoirs : législatif, exécutif et judiciaire.
    Élisons notre président, ou chef de l’état, au suffrage universel.
    Permettons à nos députés de voter selon leur conscience et selon les besoins de leurs commettants.
    Revoyons le financement des partis politiques afin qu’ils demeurent la propriété de la population et non des machines au service des riches.
    Donnons-nous un système électoral (à deux tours, ou une proportionnelle, ou une combinaison des deux) qui permettra d’avoir une députation vraiment représentative de toute la population.

  • Jean-Pierre Bouchard Répondre

    7 juillet 2011

    J'écrivais justement cela hier dans une autre tribune sur le net.
    Mme Marois joue le conservatisme électoral du parlementarisme britannique avec des éléments de programme intéressant sans s'apercevoir qu'elle ne passe pas dans la population. La cause de la langue française, le pays possible un jour avant toute chose.
    Très bon texte ainsi qui rappelle que sans coalition des PQ et QS simulant l'absence de proportionnelle mixte, ce sera l'abattoir électoral futur (4 sièges) du PQ et un QS limité à 3 sièges. Actuellement, le néant politique est au menu au Québec avec une dizaine de députés NPD de Québec qui déplore de n'avoir pas étés invités à une cérémonie princière de la couronne britannique pendant que le mouvement Legault tente de créer une Union Nationale de nouvelle droite libérale fédéraliste.
    Les Québécois vont t'ils s'écraser de nouveau politiquement pour 30 ans!