En vrac, sans plan de texte, avec le coeur et la tête

Voter "stratégique" peut aussi s'avérer "authentique"

Tribune libre

Voter avec son coeur, en concordance avec ses valeurs, versus le vote stratégique: voilà un débat qui triture les méninges de plusieurs souverainistes ces jours-ci. À gauche, surtout.
Pour ma part, j’ai voté PQ en 73 et 76. La question du vote stratégique ne se posait pas pour moi à l’époque, même si à l’époque je m’identifiais à la gauche marxiste. J’avais trop en tête « Urgence de choisir » du regretté Pierre Vallières, et c’est pour cela que j’ai voté PQ. Oui, j’étais de ceux qui furent heureux de voir « le parti bourgeois nationaliste » prendre le pouvoir.
Je n’ai pas voté pour le PQ en 82, ni en 85, ni en 89. En 94, non plus : les sondages étaient favorables au PQ, et dans mon comté – Gouin -, il était assuré de la victoire. Toutes ces années, j’ai voté pour des partis groupusculaires, en fonction de mes « valeurs ».
La défaite référendaire de 1995 m’avait fichu en l’air, rien de moins. J’ai alors décidé de devenir membre du PQ, sans pourtant y militer activement. J’ai assisté à quelques assemblées, sans plus. Disons que la morosité y était fortement pour quelque chose. J’ai toujours voté PQ depuis, mais sans grande conviction. Oui, j’aurais pu voter pour l’Union des forces progressistes, l’organisation politique en qui je me reconnaissais encore un peu, mais je ne l’ai pas fait. Pourquoi? L’élection partielle dans Mercier dans les années 90 m’avait convaincu de voter « stratégique » dorénavant : la division du vote avait permis à la libérale de se faufiler et de gagner l’élection. Aussi chic fille qu’était la libérale en question – une intervenante auprès des jeunes de la rue -, il n’en restait pas moins que son parti ne représentait pas mes valeurs.

J’ai pourtant voté PQ en 2003, 2007 et 2008. Stratégiquement, bien entendu. Mais aussi pour la social-démocratie, ou du moins pour ce qu’il en restait au PQ. Il y avait aussi une volonté du PQ de poursuivre les investissements amorcés en 1999 pour revitaliser les quartiers défavorisés au-delà de la leur banale gentrification. Comme intervenant en développement social urbain, j’ai pu constater la grande différence qu’il y a entre le PLQ et le PQ. L’arrivée au pouvoir du PLQ nous a enlevé une bonne part de nos moyens, notamment en termes de fric. Et je parle ici de dizaines de millions, pas de grenailles.
Dans les quartiers où j’interviens, la pauvreté n’est pas un mot vide de sens. Nous faisons de notre mieux pour améliorer la qualité de vie des gens, sans en avoir vraiment les moyens. Quand je dis nous, je parle de tous ceux qui étaient et sont impliqués dans ces projets de revitalisation : des institutions, les tables de concertation, des OBNL, et bien des citoyens. Le PLQ n’a octroyé que des miettes. Oui, j’ai voté « stratégique », mais en même temps pour mes valeurs, celles que mon travail me permettait de mettre de l’avant : développer la participation citoyenne dans les quartiers défavorisés, développer des infrastructures communautaires, lutter contre l’exclusion sociale, favoriser la croissance du logement social de type coopératif, faire des parcs en milieu défavorisé des lieux plaisants pour tous. J’aurais pu voter UFP, ou par la suite pour Québec solidaire. Mais pour pouvoir mettre en œuvre mes valeurs, je souhaitais l’élection du PQ en dépit de sa décrépitude qui a suivi 1995. Je devenais tout simplement pragmatique et j’avais la conviction de ne pas me trahir moi-même, même s’il me fallait un peu me pincer le nez, comme dit le dicton.
Cette année, si nous n’avions eu devant nous ce gouvernement libéral corrompu, ce gouvernement qui nous impose son idéologie néolibérale en cachette et à petites doses (la passe de l’île Anticosti, les frais de scolarité, les défusions municipales, son refus de soutenir le français, son multiculturalisme et tout le tralala), j’aurais peut-être voté pour un tiers parti résolument indépendantiste et dont le programme n’hésite pas à promouvoir la reconstruction de l’État, cet État mis à mal par le PLQ depuis qu’il est au pouvoir. Le PLQ n’est plus le parti libéral d’antan. Il ne lui reste plus rien de l’époque de Jean Lesage, ni de celle de Robert Bourassa, faut-il le préciser. Ultra fédéraliste, il démantèle, vend au moins offrant. Néo-libéral « soft », il n’en reste pas moins néo-libéral. Ce parti se situe très loin de mes valeurs.

Le PQ, me dira-t-on, n’est guère mieux. Pourtant, les bouchardiens ne sont plus de la partie, on les reconnaît à la CAQ. L'équipe du PQ fait sens. Marois prône la gouvernance souverainiste, ce que plusieurs lui reprochent. Pour ma part, je préfère cela à la promesse de tenir un 3e référendum perdant. Le mouvement souverainiste doit se reconstruire, et pour ce faire, il faut pouvoir créer un rapport de force. Sans ce rapport de force, nous ne pouvons vaincre. Le PQ, en prenant le pouvoir, peut contribuer à bâtir ce rapport de force. Je dis contribuer, pas plus, car il n’est pas le seul joueur.
D’un autre côté, est apparue la CAQ, une ADQ plus attrayante, pourrait-on dire. Le vieux fond « bleu » du Québec s’en réjouit. Une nouvelle Union Nationale est née. Honnie à Montréal, la CAQ plaît à une certaine population des régions rurales ou semi-rurales. Et bien sûr à Québec, et dans le 450, jusqu'à un certain point. C’est un fait incontournable : comme QS est là pour rester, la CAQ/ADQ représente un courant bien réel, loin d’être marginal. Ce courant prouve à lui seul que nous avons été conquis. Il est l'expression achevée de cette médiocrité qui nous colle à la peau et qui fait que nous n'osons pas. Un peuple paisible, ainsi nous définissait Duplessis. Quitte à faire matraquer les révoltés de l'époque par la tristement célèbre Police Provinciale pour assurer la paix des "paisibles". Il en reste plus que des traces, de ce vieux Québec bougonneux, mais soumis. Ils ont beau plastronner du haut de leur Duchesneau, Legault, Barette et autres Roy, il n'en reste pas moins que les caquistes-adéquistes pressent la nation vers le bas, pour quelle finisse au fond d'un cul-de-basse-fosse dont il sera difficile de s'extirper. Le provincialisme triomphant ne peut s'avérer une alternative au PLQ, aussi anti-corruption soit-elle cette CAQ. Je me retiens, je risque de devenir méprisant, si ce n'est déjà fait.
Au moment où j’écris ces lignes, tout ce qui est à droite et fédéraliste est assuré d’obtenir 55% des voix, si ce n’est plus. Eux aussi sont divisés, mais nous pouvons compter (j'ironise) sur leur solidarité le moment venu. Un PQ minoritaire ne pourra pas abroger la loi 12, par exemple, car le PLQ et la CAQ voteront contre, c’est certain. Et ce n’est pas les un ou deux députés de QS qui les empêcheront de le faire. Démobilisation et lutte jusqu'au-boutiste s'ensuivront, avec en prime répression accrue et davantage de démagogie. C'est le Printemps érable qui perd sa sève. Pas de sirop, pas de tire, pas de sucre. Que la loi et l'ordre, et que voilà une grande victoire pour le peuple victorieux qui juge ses enfants trop gâtés, mais qui en appelle à L'État pour leur inculquer le sens du devoir citoyen! Tu utilises, tu paies, tu fermes ta gueule. Je dis non, non et non. Il me plaît de savoir que nous sommes une méchante flopée à vouloir dire non.
Cela dit, je voterai avec mon cœur, en fonction de mes valeurs, mais aussi avec ma tête. Le gouvernement du PLQ a tout fait pour affaiblir le Québec. Son but est clair : favoriser le privé au détriment de la collectivité, faire du Québec un État faible en limitant au possible ses moyens, nous enliser dans notre dépendance séculaire. Davantage de Jean Charest, de néolibéralisme larvé, de provincialisme de gestionnaires, de fédéralisme centralisateur, de Harper tout court, ce n’est pas ce que je nous souhaite. Mon cœur me dit de penser au Québec tout entier, soit-il plus à droite qu’à gauche, plus fédéraliste que souverainiste, pas seulement en fonction de ce que je crois être ma vérité.
Comment voter alors? Ce qu’il faut faire est simple, mais en même temps extrêmement difficile. Mes concitoyens ne pensent pas tous comme moi. L’idéal serait que chacun prenne le pouls des intentions de vote dans son comté. Le PQ est assuré de gagner là où vous êtes? Si le PQ n’est pas votre choix, alors votez QS ou ON. Le PLQ est assuré de faire élire son candidat? Même chose : vous votez pour votre premier choix. Si QS ou ON peut gagner sans que le libéral ou un caquiste se faufile, pas de problème. Mais si le partage du vote risque de faire élire un caquiste ou un libéral, pensez-y bien. Songez seulement à ce qu’on va continuer à endurer si l’un ou l’autre gagne, avec en prime le soutien de l’autre. Être stratégique là où ça compte, mais ce simple constat semble difficile à saisir. Mais on peut aussi voter pour un candidat, plutôt que pour un parti, pour la simple raison qu'il est bon, nous rejoint, et qu'il est un plus pour les citoyens du comté, compte tenu de sa capacité réelle d'agir. Vous aimez vraiment votre député, mais vous ne le trouvez pas suffisamment "authentique"? Il faut y songer avant de se sentir moche au moment d'apposer son X. Penser aux autres et à soi, sans se confiner dans son petit "Moi", voilà le défi auquel est confronté tout citoyen qui s'identifie quelque part à notre grande famille dysfonctionnelle, dont les membres souffrent le plus souvent d'un grand déficit d'attention.
Je passe et poursuis, tout en radotant, parce que radoter est une façon d'insister. Mon cœur et mes valeurs me dictent de jeter dehors la bande à Charest. Mais il n’y a pas que cette bande là : il y a aussi ces provincialistes patentés et ces populistes de la CAQ/ADQ qu’il faut contrer. Et il ne faut pas que ceux-là puisse bénéficier de la balance du pouvoir, advenant l’élection d’un PQ minoritaire. Je peux m’accommoder du PQ, mais pas de la droite fédéraliste, celle de Desmarais et du provincialisme fini. Mais si les horreurs commises par le PLQ ne nous émeuvent pas au point de nous faire réaliser qu’il y a péril en la demeure, peut-être avons-nous du cœur, mais encore faut-il s’assurer que ce cœur soit à la bonne place. Il n’est jamais plaisant de se découvrir comme étant un allié objectif de ce qu’on déteste. Mais il y en a qui détestent tout, et qui aiment ça, c'est vrai. La certitude du juste ne se prête pas au débat ni au questionnement.
Enfin, si certains croient en la possibilité d’une vague « orange » souverainiste de gauche (ou de gauche souverainiste pour satisfaire certains), ils seront amèrement déçus. Nous sommes entrés dans une nouvelle ère, mais il faudra beaucoup de temps pour articuler tout ça. Il n’y a rien à faire, et nous devons accepter cette phase de transition, une phase où il faudra demeurer actif pour reconfigurer notre mode d’action, mais avant tout notre intelligence. L’évolution de ce que nous sommes fera que, comme nation, nous gagnerons ou nous perdrons. Si nous plions les genoux, parce que trop imbus d'individualisme ou de partisannerie, il appartiendra aux générations futures de se fondre dans le grand tout canadian. Durham aura sa statue et la vie continuera pour ce qui sera devenu la « Grande Louisiane du nord ». Et de république, point il n'y aura.
Voilà ma contribution à cet épineux débat qui fait que bien des chemises connaissent une fin prématurée ces jours-ci. Les exégètes de la question ne manqueront pas de souligner le parcours tortueux, mais pourtant clair, de mon opinion. Grand bien leur fasse, je compte sur eux pour qu'ils nous disent ce que je voulais vraiment dire et ce que j'ai omis de nuancer.
Au fait, quelqu'un aimerait savoir quel parti - ou quel candidat! - je vais voter? Et pourquoi? La réponse est dans ce qui précède, dans ce clair-obscur où réside l'évidence même.
Bons doutes, bonne réflexion. Vivre libre c'est pouvoir choisir, tout en ne pensant pas qu'à soi. Ma fêlure sartrienne pas totalement assumée, sans doute.
Michel Gendron


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6 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    3 avril 2013

    Michel Gendron, il est temps que tu quittes ce parti. Je suis certaine que tu es authentique, mais là, avec les propositions de Maltais, un homme de gauche ne peut plus rester dans ce parti qui n'est même plus social-démocrate. L'indépendance comme projet mérite mieux que ça.
    Hélène Morin, une ancienne amie
    P.S.

  • Marcel Haché Répondre

    17 août 2012

    Un très bon texte M. Gendron. Je vous lis avec plaisir depuis longtemps. Je crois que vous êtes plus péquiste que moi, et plus péquiste que vous ne semblez l’affirmer. Je veux dire « péquiste » ici dans son sens fort, noble, c’est-à-dire branché dans le réel, mais capable et assez fort pour garder espoir sans rien renier. Sans rien renier.
    De gauche ? Assurément. Mais la gauche pour espérer quoi, M. Gendron ? Je me hasarde à vous suggérer la mienne, mon espérance : pour que les besoins réels de tout un peuple (incluant ceux et celles qui se croient au dessus de notre peuple) soient enfin pris en charge. L’idée de l’Indépendance est une bonne idée qui fait encore le tour du monde. Nous avons ici un « besoin » urgent d’état, d’un état complet, ce qui n’est pas la même chose qu’avoir « besoin » de plus d’état (et de ses fonctionnaires), qui est un faux besoin sur lequel surf une gauche devenue folklorique.
    Au mois d’Août 2012, il se peut bien que notre besoin collectif le plus essentiel passe par l’élimination électorale du P.L.Q. Manifestement, toutes les générations tâtonnent et cherchent à reprendre de quelque façon un élan brisé il y a longtemps, sans doute quelque part en 1995.

    Il n’y a que Nous, en définitive, (chacun de nous, en votant stratégique, et même au prix de se pincer le nez), qui pouvons choisir d’appliquer un électrochoc à notre société, et tout particulièrement à l’électorat du West Island qui, encore une fois, hélas, mille fois hélas, ne votera pas avec Nous, pour qu’enfin le Québec puisse sortir du blocage dans lequel il est enlisé au profit des libéraux. Une société bloquée n’est pas une situation normale.
    En s’appuyant sur le West Island pour s’accaparer du pouvoir, les libéraux ont finalement ghettoisé et même emprisonné un électorat minoritaire, en même temps qu’ils ont agit auprès de la majorité- c’est Nous ça, la majorité- à la manière d’un verrou. Radio Canada et La Presse sont complices de cette trahison. Et toutes les « enquêtes » de l’une et la bien-pensance de l’autre n’excuseront jamais pour le blocage occasionné à notre société.
    Derrière le « on est tous des québécois et des québécoises » se cache une autre de ces fanfaronades, une de plus, bien davantage qu’une conviction. À gauche comme à droite, mais plus à gauche qu’à droite, cela consiste à intérioriser l’idée parmi Nous qu’il est tout à fait normal que le West Island puisse voter ethnique (il le fait d’ailleurs depuis des temps immémoriaux), mais qu’il est hautement suspect que Nous votions simplement stratégique, plusieurs à gauche étant persuadés d’être là dans l’antichambre du vote ethnique. Pensez-y ca-ma-ra-des ! Le vote eth-ni-que ! Pfiou ! En serions-nous rendus là, camarades ? Il y a pourtant chez-nous, tout près, un vote anti-Nous que la gauche historique et ses bien-pensants s’appliquent à ne pas nommer, quand ce n’est pas à nier, et qui préfèrent de loin dénoncer du plus loin qu’elle peut la grosse, l’énaurme, mais très lointaine drette de l’Alberta du Canada.
    Le vote « stratégique » (favorable au P.Q.) est incontournable si on espère que les vrais « besoins » priment un jour sur les faux. Il faut bien commencer quelque part, en effet, dans le réel. Tel est le lot ingrat, infiniment ingrat, des souverainistes et des indépendantistes avec la gouvernance souverainiste. C’est aussi, en corolaire, le lot de tous les peuples minoritaires qui hésitent, ou qu’on fait hésiter à devenir majoritaires. Comme les ancêtres, les indépendantistes sont appelés à se serrer les coudes et les dents…
    Quant à moi, une vieille gauche retardataire manque présentement à tous ses devoirs. M’en crisse, finalement, qu’elle ait bonne conscience. Qu’elle soit certaine d’avoir raison. M’en crisse qu’elle se croit pure et qu’elle « résiste » selon les savantes élucubrations de Pierre Foglia, surtout, qu’au nom du progressisme, elle traite le nationalisme de la même manière que les fédéralistes, comme si c’était une source intarissable de problèmes. Qu’elle se regarde, loin dans le passé, cette gauche retardataire, pas toujours solidaire mais très souvent sectaire, et qu’elle regarde autour d’elle maintenant, elle qui se croit si révolutionnaire, elle verra qu’elle a été accompagnée et prise en charge depuis longtemps, surtout qu’elle est sur la même barricade que La Presse et Radio Canada. Le printemps érable aura été symptomatique, infiniment.
    Il faut voter « stratégique », en effet, parce que notre tour est venu. C’est le prix à payer pour cesser d’être loosers ! Ce n’est déjà pas rien !



  • Luc Bertrand Répondre

    16 août 2012

    Monsieur Gendron,
    Je partage avec vous votre aversion des libéraux et des caquistes qui ne sont essentiellement là que pour servir les intérêts de l'Oligarchie, qui cherche à éradiquer le Québec français et nous fondre dans le tout canadian. Pour eux, il n'y a que la business et les colonnes de chiffres qui comptent, ils n'usent à l'occasion de la fibre nationaliste que pour nous diviser. Ils n'ont rien à cirer de qui nous sommes ou de ce que nous serions capables de faire si nous nous unissions comme peuple. Ils ne vivent qu'au présent et n'aspirent qu'à gérer le Québec au jour le jour, jusqu'à ce que la différence québécoise (langue française, État-providence) s'estompe. Selon eux, c'est cette différence qui est responsable de notre soi-disante non-compétivité et de l'instabilité de leur "plusse meilleur pays du monde".
    Je n'ai jamais voté pour ces deux partis et ne le ferai jamais. Pour moi aussi, ils sont à l'opposé de mes valeurs et, à cause de la minorité anglophone et des groupes ethniques qui s'y intègrent, en plus des 30-40% de French Canadians de service qui s'obstinent à nier leur aliénation dans ce pays de juges qu'est devenu le Canada, le PLQ - le parti du pouvoir - est assuré de ne jamais disparaître de la carte électorale.
    Cependant, monsieur Gendron, je ne suis pas d'accord avec votre théorie de vote stratégique envers le Parti québécois dans l'espoir de nous rapprocher de l'indépendance. Lisez ma réplique à Robert Barberis-Gervais à son article http://www.vigile.net/quelques-conseils-a-Pauline-Marois. Aucun rapport de force n'est possible avec un PQ qui n'est intéressé qu'à la gouverne provinciale, encore moins lorsqu'il est dirigé par un chef manquant de crédibilité auprès de l'électorat comme Pauline Marois.
    Selon moi, il y a deux manières de chasser les libéraux de Jean Charest du pouvoir. L'une, immédiate, ne nous conduirait à peu près nulle part, l'autre, à moyen terme (1-2 ans) pouvant nous conduire à une élection décisionnelle décisive pour la réalisation de l'indépendance.
    La première serait l'élection d'un gouvernement majoritaire péquiste. Avec un tel scénario, oubliez votre rapport de force. Une Pauline Marois triomphante devant ses dénigreurs et les dissidents du PQ fera passer les intérêts de ceux à qui elle devra sa victoire (les bénis-oui-oui l'ayant appuyée envers et contre tous, au détriment de l'unité des indépendantistes) avant ceux de la nation québécoise. Même si elle tenait un nouveau référendum sur la souveraineté, que le Canada intervienne ou non, nous le perdrions à coup sûr, à cause de l'afflux des quelque 850 000 immigrants installés au Québec depuis 1995. Je ne dis pas que ceux-ci voteraient systématiquement NON, mais suffisamment pour contrer le vote des jeunes électeurs qui se seront ajoutés depuis le dernier référendum et malgré le décès d'une part importante des vieux sympathisants du NON (et du OUI) dans l'intervalle.
    Le second est l'élection d'un gouvernement minoritaire, libéral ou caquiste, avec la balance du pouvoir aux mains d'Option nationale ou Québec solidaire. Une défaite, oui, mais pour mieux rebondir après. Après la nécessaire et inévitable remise en cause et de la stratégie et des acteurs portant dorénavant la mouvance indépendantiste.
    Avec ce second scénario, après une quatrième défaite d'affilée dont deux sous l'égide de Pauline Marois (une première depuis René Lévesque) et son échec à rapatrier les "brebis égarées" de QS, d'ON et de la CAQ, le PQ n'aurait d'autre choix que de changer de chef. Advenant que les chefs d'Option nationale, de Québec solidaire et d'autres nouvelles figures se soient particulièrement signalés lors de l'élection du 4 septembre, l'espoir renaîtrait chez les indépendantistes et on pourrait assister à une véritable relance de l'idée d'indépendance avec de nouveaux porte-étendards à la fois enthousiastes et crédibles (puisque jamais corrompus au pouvoir provincial ou discrédités pour des appuis à des décisions controversées) auprès des indépendantistes et de la population. Les "pressés" et les "gauchistes" détenant le pouvoir de provoquer la chute du gouvernement, cette fois ce ne sera plus le PQ qui sera en position de force dans les négociations visant à refaire l'union des forces indépendantistes. D'ailleurs, les Jean-Martin Aussant, Amir Khadir, Françoise David et autres nouveaux ténors auront libre cours pour dénoncer l'échec des solutions provincialistes et empreintes de favoritisme du gouvernement libéral ou caquiste et les opposer concrètement à ce qui serait possible dans un Québec débarrassé de la tutelle d'Ottawa. La table serait ainsi mise pour une élection décisionnelle décisive sur l'indépendance au moment que la balance du pouvoir (les nouveaux porteurs du mouvement indépendantiste) jugera favorable.
    Donc, monsieur Gendron, cette fois-ci vous pouvez voter selon votre conscience, car nous n'avons pas ni la cheffe, ni le parti disposant de la crédibilité ou de la sympathie des électeurs pour décourager l'appui aux libéraux, aussi arrogants et verreux soient-ils. Pour réussir l'indépendance, nous avons besoin à la fois d'un chef rassembleur (Pauline Marois est tout sauf cette rassembleuse) et d'un repoussoir (Jean Charest, la vision froidement comptable de François Legault et le Canada de Harper). Puisque nous n'avons pas le cheval qu'il nous faut le 4 septembre prochain, il faudra une nouvelle défaite pour forcer son remplacement et attendre la prochaine fois pour atteindre notre but.
    Pensez-y et faites partager votre réflexion à votre entourage! Nous y gagnerons à coup sûr!

  • Archives de Vigile Répondre

    15 août 2012

    À quelque part, c'en est rendu ridicule de devoir voter stratégique pour éviter que ne soit élu un libéral ou un caquiste.
    Est-ce que les "bons Canadiens-Français pure laine" et "Québécois de souche" de la grande région de la ville de Québec vont voter stratégique eux?
    Non, ils vont voter libéral ou CAQ. N'est-il pas là le problème, c'est à dire dans le fait qu'une bonne partie des Québécois de souche préfèrent être colonisés, surtout lorsqu'ils ont un emploi et un salaire leur assurant une "belle vie" sans problèmes?
    Si quand tout va bien, on est incapable de s'identifier à nos compatriotes du Québec et à la nation québécoise dans son ensemble, eh bien too bad pour le Québec, la souveraineté et tout le reste...
    On est rendu à passer à autre chose quand dans la région de ce qui serait notre capitale nationale, on ne veut plus rien savoir du PQ, de QS de ON et de la souveraineté.

  • Archives de Vigile Répondre

    15 août 2012

    Merci, Michel Gendron, pour ce texte puissant, car vrai en soi, appuyé sur l'authenticité de votre démarche, et juste par l'honnêteté de son récit, et réconfortant par l'espoir qu'il fait naître, à savoir que tous les indépendantistes convaincus de l'importance et de l'urgence de l'indépendance voteront pour le Parti québécois, enfin porteur, avec Pauline Marois, de notre idéal.
    Andrée Ferretti.

  • Archives de Vigile Répondre

    15 août 2012

    Merci de l'avoir si bien dit vous aussi. C'est très clair, du moins pour ceux qui pensent d'abord et avant tout au Québec, et à la suite des choses.
    Le temps n'est plus à la rancune, et Pauline Marois peut en surprendre plusieurs.
    AVe