Roman canadien: la crise d'Octobre, vue de Toronto

On se demande lequel est le plus stupide: l'auteur, son éditeur ou son marché torontois? Ou le journaliste qui nous présente cette merde avec l'air de ne pas y toucher ?

Le nom de l'auteur de ce premier roman, Michel Basilières, sonne bien français, mais l'écrivain vit à Toronto. Il a choisi comme sujet la crise d'Octobre, et son portrait des Québécois a dû faire rire les Torontois.


Basilières a inventé la famille Desouche, qui ressemble pas mal aux Bougon de la série télévisée. Les Desouche sont un mélange d'Anglais et de Français - rien d'étonnant avec ça dans le Montréal d'aujourd'hui - mais l'auteur nous les présente comme des phénomènes de cirque.
Le grand-père et l'oncle sont des pilleurs de tombes. Les parents n'ont jamais connu le travail, tandis que leurs deux enfants, Marie et Jean-Baptiste, sont des paumés qui vont se retrouver au milieu de la fameuse crise.
Au début, les Desouche se contentent de faire de la petite délinquance. Ils creusent un tunnel jusque dans le sous-sol du salon mortuaire en face pour s'alimenter en gaz, car ils manquent d'argent pour payer la note. Mais Basilières va exiger encore plus de ses personnages. Grâce, la corneille qui fait office d'animal domestique, arrache un oeil au grand-père, qui deviendra une sorte de visionnaire avec son oeil de verre.
Arrive ensuite la politique. Marie se joint aux felquistes et se met à poser des bombes. Les felquistes, menés par un certain Hubert, sont des illuminés machistes qui manoeuvrent gauchement le vocabulaire marxiste. On sent que Michel Basilières écrit pour Toronto. Rien de plus naturel - c'est quand même son marché.
Malgré le fort côté macho d'Hubert, Marie tombe amoureuse de lui. Hélas, il est fauché par la voiture du premier ministre séparatiste du Québec, dans une parodie de l'épisode impliquant René Lévesque et un itinérant, sur Côte-des-Neiges. Comment interpréter cette entorse à la réalité, lorsqu'on sait que Lévesque n'était pas au pouvoir en 1970?
Basilières continue à tordre la réalité que nous connaissons. Poussé par son amour pour la «Noble Cause», Marie enlève le diplomate britannique John Cross, et le cache dans son sous-sol. Oui, vous avez bien lu: l'homme en question s'appelait James Cross, mais chez Basilières, il change très légèrement de nom. Dans son livre, Cross est moins chanceux que dans la vraie vie. Fâchée par son apparence pitoyable, Marie l'étrangle avec sa chaîne dans une «parodie» de la mort de Pierre Laporte.
Basilières continue son gai chemin: les pilleurs de tombes volent le coeur du frère André pour le vendre au Docteur Hyde (vous pigez la farce?), qui a l'habitude de leur acheter des cadavres. Hyde implante le coeur dans le corps d'Hubert et le réanime à coup d'électrodes... Le monstre qui en résulte devient un tueur. Et ainsi de suite.
Oui, c'est de l'humour noir. Je ne sais pas si Toronto a ri. Il faudrait demander aux lecteurs de là-bas.
**1/2

L'oiseau noir

Michel Basilières, traduit par Jean Chapdelaine Gagnon.

XYZ Éditeur, 219 pages


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