Des frontières du Québec !

L'arbitraire de certaines de nos frontières ne doit pas nous effrayer ni nous troubler.

Canada-Québec - sortir ou rester ? <br>Il faudra bien se décider un jour...



J'ai beaucoup d'admiration pour les talents de cartographe de mon compétent collègue Léonce Naud, géographe, qui vient de [publier dans Le Soleil ses opinions->9925] au sujet des frontières du Québec, frontières qu'il qualifie d'artificielles, preuves à l 'appui.

Comme géographe spécialisé en géopolitique, l'étude systématique des États, des Statuts de facto, par opposition aux Statuts de jure, des pouvoirs permanents et des pouvoirs transitoires et de leurs frontières, qu'il me soit permis de corriger quelques-uns des termes employés par mon savant et très respectable collègue.

User du terme artificiel pour qualifier une frontière, c'est comparer les vies et les statuts collectifs à des plantes mortes comme les fleurs artificielles qu'on garde dans un endroit sans vie. En géopolitique, une frontière est soit naturelle, soit arbitraire. Elle n'est artificielle que lorsqu'on y plante une clôture qui n'a aucun rapport avec la réalité. Dans ce cas, la frontière est à la fois arbitraire et artificielle.

Une frontière naturelle correspond à la limite gravitationnelle d'une dynamique collective, que cette limite soit marquée ou non par une frontière juridique, dont le but vise le contrôle des impôts et des taxes. Par exemple, le Québec qui s'est naturellement développé à partir des basses terres du Saint Laurent, a peu à peu vu sa frontière prendre de l'expansion en dehors de ces basses terres, au fur et à mesure que les communications québécoises croissaient d'une manière tentaculaire vers les régions adjacentes aux basses terres du Saint Laurent, notamment les Laurentides dans le nord, puis, plus loin vers le Bouclier précambrien, d'une part, de l'autre, vers les Appalaches sur la rive sud, jusqu'à la limite des régions dont les communications et les pentes s'orientent naturellement vers le Saint Laurent.

La Grande Bretagne et le Canada des United Empire Loyalists et des Orangemen ont reconnu ces frontières, non pas en fonction du contexte territorial de la Nouvelle France, qui n'existait plus depuis le traité de Paris du 10 février 1763, mais des indéniables progressions territoriales accomplies par le peuple de colons demeuré sur place, envers et contre l'arbitraire imposé par les Anglais et ensuite par les Orangemen et Loyalistes qui ont décidé de faire leur fief de cet espace continental qu'on appelle Canada.

Lorsqu'une frontière est artificiellement imposée par une puissance régnante et dominante envers et contre les frontières naturellement tracées à la limite des communications internes d'une région oékoumène, cette frontière est arbitraire, ce qui veut dire imposée de force et par la force.

Un exemple est la frontière imposée aux Québécois à partir de l'Acte Constitutionnel de 1791, qui éliminait de fait et de droit toute influence québécoise dans les basses terres des grands Lacs, mais aussi dans la partie ouest des basses terres du Saint Laurent, de la frontière Québec Ontario actuellement en vigueur, jusqu'à la limite naturelle de ces basses terres, suivant la ligne générale Brockville-Pembroke. Cette ligne correspond à la limite des basses terres du Saint Laurent entre le Saint Laurent et l'Outaouais, limite naturellement renforcée à l'ouest par l'axe Frontenac, cette formation géologique précambrienne qui relie le Bouclier au nord et à travers le fleuve Saint Laurent, région qui se relève ensuite pour former les Adirondacks dans l'État de New York.

Cette portion trapézoide des basses terres du Saint Laurent, arbitrairement découpée, difficilement mesurable avec précision à cause de sa forme irrégulière, représente environ 10,000 kilomètres carrés de superficie. Pour les Orangemen et les United Loyalists, cette région est ce qu'en géopolitique et en stratégie d'État, en stratégie et en tactique militaire, on appelle un glacis. C'est une zone plate et assez basse pour être solidement tenue en possession, dans l'éventualité d'une progression trop forte de l'adversaire.

Bien entendu, l'adversaire c'est NOUS, Québécois descendants des colons de Nouvelle France et tous ceux qui sont venus vivre dans cet espace naturel que NOUS avons conquis par des centaines d'années d'exploration, de défrichements, de mises en valeur et de développement d'un capital autonome, indépendamment de la France, l'Angleterre et les Orangemen et leurs alliés United Empire Loyalists.

Nous sommes l'adversaire parce que non seulement nous avons survécu, envers et contre l'hostilité outrée des Anglais et de leurs héritiers Orangistes et Loyalistes, mais parce que, envers et contre le départ de la France, nous avons continué seuls et poursuivi notre progression territoriale jusqu'aux statuts reconnus de peuple de nation et d'État, frontières artificielles ou pas.

Dès 1791, les Anglais avaient constaté l'importance de concentrer leurs efforts de colonisation et de développements militaires dans les basses terres des grands Lacs, à plus de 500 kilomètres à l'ouest de Montréal. Avec la construction aux États Unis du canal Érié et son ouverture en 1825, suivie de la progression rapide de Buffalo, directement placé en face de la zone britannique des basses terres des grands Lacs, cette nécessité est devenue plus pressante. L'arrivée des chemins de fer a pressé encore davantage Anglais, Orangemen et Loyalistes à précipiter l'occupation et la mise en valeur de cette région entourée de lacs.

La construction et l'ouverture du pont Victoria à Montréal en 1860 et les migrations des Loyalistes hors Québec et vers l'Ontario méridional qui s'en suivit s'inscrit dans les mêmes continuités stratégiques, identifiées comme nécessités géopolitiques par les Anglais. Voyant que NOUS allions exploiter à notre avantage ce dégagement progressif hors de notre territoire, Anglais, Orangemen et Loyalistes ont donc décidé des prises de contrôles arbitraires, territoriales et politiques, qui faciliteraient le maintien de leur domination sur nous.

Entre l'arbitraire et la nature, c'est la nature qui finit par l'emporter. C'est ce qui arrive au Québec maintenant, qui possède les assises de la nation et de l'État. Nos frontières à l'est se sont consolidées, malgré la perte du Labrador. C'est bel et bien NOUS qui chevauchons solidement le Saint Laurent sur ses deux rives, jusqu'à la frontière New York-Ontario et nous avons les moyens stratégiques de défendre notre prise de possesion. Loin d'être un peuple de vaincus, NOUS avons gagné sur toute la longueur. À NOUS de poursuivre, frontières artificielles ou pas.


Nous n'avons qu'à prendre contrôle de ce que nous avons conquis dans le Saint Laurent à partir de la frontière ouest jusqu'aux limites des eaux territoriales de Terre Neuve, le Nouveau Brunswick, la Nouvelle Écosse et l'Ile du Prince Édouard, sans intervention d'Ottawa, dont la crédibilité géopolitique est nulle et qui est appelé à disparaître. Nous avons déjà un territoire aussi étendu que toute la Scandinavie, alors prenons charge de ce qui est là et on verra par la suite ce qui va arriver après qu'Ottawa sera éliminé.

Quant aux régions situées à l'ouest, il est évident que nous ne pourrons pas récupérer le glacis occidental des basses terres du Saint Laurent dans un avenir proche, mais en attendant, nous pouvons et devons passer des ententes au sujet des eaux du fleuve, avec New York, l'Ontario, la Pennsylvanie, l'Ohio, l'Ilinois, le Michigan, le Manitoba et le Minnesota, tous appelés comme le Québec, au statut d'États reconnus de droit comme de fait. Agissons avec les faits tels qu'ils se présentent, non avec les sentiments et ressentiments que nous transmet la littérature.

L'arbitraire de certaines de nos frontières ne doit pas nous effrayer ni nous troubler. Ces frontières ne sont pas inamovibles comme vous dites.

Salutations

René Marcel Sauvé, géographe et auteur de
Géopolitique et avenir du Québec



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René Marcel Sauvé217 articles

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J. René Marcel Sauvé, géographe spécialisé en géopolitique et en polémologie, a fait ses études de base à l’institut de géographie de l’Université de Montréal. En même temps, il entreprit dans l’armée canadienne une carrière de 28 ans qui le conduisit en Europe, en Afrique occidentale et au Moyen-Orient. Poursuivant études et carrière, il s’inscrivit au département d’histoire de l’Université de Londres et fit des études au Collège Métropolitain de Saint-Albans. Il fréquenta aussi l’Université de Vienne et le Geschwitzer Scholl Institut Für Politische Wissenschaft à Munich. Il est l'auteur de [{Géopolitique et avenir du Québec et Québec, carrefour des empires}->http://www.quebeclibre.net/spip.php?article248].





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3 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    4 mars 2011

    Bien.
    Vous ne dites mot du Labrador. Son rattachement à Terre-Neuve est fondé sur quoi ?

  • Archives de Vigile Répondre

    29 mai 2008

    Lire cela m'apaise et me donne vraiment le goût de continuer. Merci cher monsieur, pour ces précisions qui nous permettent de remettre les choses en perspective.

  • Archives de Vigile Répondre

    7 novembre 2007

    M. SAUVÉ TIENT LÀ UN VRAI DISCOURS DE GAGNANTS! LES QUÉBÉCOIS N'ONT RIEN À ENVIER À PERSONNE. CE TERRITOIRE, NOUS L'AVONS GAGNÉ CHÈREMENT. IL NOUS APPARTIENT EN TOUTE JUSTICE. M. SAUVÉ A RAISON DE LE DIRE ET DE LE RÉPÉTER.