Perche tendue à Dominic Desroches

Un Québec foutu ! (2)

Penser le Québec - Dominic Desroches

Pour mon 70e article, je reviens au Québec foutu :
Dans cette opinion, je faisais ressortir trois textes pouvant suggérer que le sort du Québec était perdu. L’un d’entre eux était :
Dominic Desroches - La politique spectrale. Or l’auteur a bien voulu réagir en laissant ce message :
« Je n’ai pas écrit littéralement que le Québec était foutu. »
Si les Vigilants sont comme moi, ils reverront ici la publicité télévisée de ce fêtard arrêté par une grosse police en train de le menotter machinalement. Dans une articulation légèrement « éthylique », le prévenu, en costume-cravate, argumente mielleusement :
« J’ai pas dit que vous étiez un peu sévère… j’ai dit que vous étiez un peu sévère…
J’emprunte cette forme de fable parce qu’elle sied bien au style de M. Dominic Desroches. Sa série Penser le Québec se continue aujourd’hui par :
Le fantôme de Shakespeare - To be, or not to be... in French ?
Je suis toujours d’avis que la nouvelle formule de notre Tribune libre fait défiler les titres trop vite : au bout de 2 jours, ils tombent en désuétude comme les quotidiens de papier… Pour cette raison, plusieurs n’ont pas pris le temps de lire le matériel de ce philosophe de notre système collégial. J’aime bien le ramener ici en discussion, aussi parce que certains peuvent trouver que son style métaphorique (les fantômes) les porte à passer outre. Je cite donc simplement sa conclusion, qui le poussera peut-être à intervenir plus longuement sur le sort du Québec.
Enfin, le problème de l’esprit de la langue est récurrent et se pose aussi ailleurs. Il faut cependant oublier l’idée que l’avenir est tracé. Au contraire, nous sommes tous libres de parler la langue que l’on veut. Le problème de l’esprit de la langue ne se gère pas de la même manière quand l’État est souverain, comme au Danemark d’où provient Hamlet. Les Danois apprennent volontiers l’anglais sans craindre la disparition de leur langue nationale. L’esprit de la langue demande simplement s’il vaut la peine de poursuivre les efforts de nos grands-parents. L’esprit de la langue dit qu’il y a un prix à payer – politiquement - pour être libre chez soi. Il dit aussi, et sur cette question sans réponse se termine le quatrième acte : « To be, or not to be in French ? »
Dominic Desroches

Département de philosophie

Collège Ahuntsic

Je voudrais aussi l’interroger respectueusement à la suite de sa phrase, qui parle des séquelles de la Commission Bouchard-Taylor : « La scène III tournera au vinaigre lorsqu’on réalisera, sur le tard, que les commissaires-espions, devenus des « spécialistes de la peur », matière dont ils tiraient savamment profit théoriquement et financièrement, s’en sortiront indemnes en donnant des conférences dans le monde entier. »
Dans la foulée de cette série Penser le Québec, où il témoigne d’une peur d’être que les Québécois se transmettent comme génétiquement, Monsieur D.D. suit certainement de près les assemblées qu’on tient actuellement pour dénoncer les diktats de la Cour Suprême sur la langue française. Il se réjouit sans doute de voir des salles pleines de Québécois en train de se départir de la peur pour organiser une marche de milliers de citoyens sur l’Assemblée nationale en vue de réveiller au moins les partis d’opposition. Pour cette offensive citoyenne libératrice, envisagerait-il d’influencer les étudiants du collégial pour qu’ils viennent gonfler les rangs de ce réveil qui les concerne au plus haut point ?

Squared

Ouhgo (Hugues) St-Pierre196 articles

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Fier fils de bûcheron exploité. Professeur retraité d'université. Compétences en enseignement par groupes restreints, groupes de réflexion, solution de problèmes. Formation en Anglais (Ouest canadien), Espagnol (Qc, Mexique, Espagne, Cuba), Bénévolat latinos nouveaux arrivés. Exploration physique de la francophonie en Amérique : Fransaskois, Acadiens, Franco-Américains de N.-Angl., Cajuns Louisiane à BatonRouge. Échanges professoraux avec la France. Plusieurs décennies de vie de réflexion sur la lutte des peuples opprimés.





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7 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    24 novembre 2009

    Cher Ouhgo,
    Chère Jeanne (qui est loin d'être sacrifiée ou folle...)
    je prends huit secondes pour remercier mes huit lecteurs, et deux en particulier. Je n'en ai pas beaucoup - je n'en aurai plus bientôt - cela est vrai, mais je me consolerai en disant que les miens sont forts et puissants. Cela signifie que les lecteurs et les auteurs sont des complices. Le premier commentaire, celui de Jeanne, résume toute ma pensée, alors que le dernier, celui de l'auteur du Québec foutu, résume mon parcours récent et mon dernier vol. Il sait non seulement utiliser Internet, mais aussi dresser le portrait de l'auteur de La politique spectrale. Il va loin, très loin, trop loin (?), mais je l'en remercie. Avoir de tels lecteurs et de telles lectrices est un privilège duquel il ne faut jamais abuser.
    J'en profite pour saluer aussi mes quarante et un lecteurs secrets (j'inclus les lectrices et j'ai même un faible naturelle pour elles...), ceux qui, à l'occasion, se blessent l'égo sur mes textes et me voit comme un arrogant, un être imbu et qui, trop polis, ne me l'écrivent pas sans la Tribune. Je vous remercie, car un auteur sans lecteur secret n'est pas un véritable auteur.
    Dans les pires textes, dans les textes les moins lus, ceux des prétentieux, des universitaires sans chaire, des auteurs partis à la recherche du public absent ou qui le boude avec justification, on peut encore apprendre quelque chose si on fait un effort.
    Avec tout mon respect,
    Dominic Desroches

  • Ouhgo (Hugues) St-Pierre Répondre

    22 novembre 2009

    Il appert que le professeur Desroches a plus de lecteurs qu’il ne croyait… Il a, bien sûr, manifesté un brin d’impatience vis-à-vis de notre réponse un peu timide à sa participation assidue à Vigile.net mais il continue quand même à nous livrer des cadeaux comme ce récent : « Petit essai de météorologie politique québécoise. »
    Encore une fois, il nous demande de tout laisser de côté pour pouvoir le lire en saisissant bien la portée de son message. Évidemment, comme il séjourne actuellement en Europe pour travailler avec de grands philosophes en France, Espagne et Suisse, il n’a pas pondu ce texte sur le coin de sa table de cuisine pour nous épater. Ce thème de « météorologie politique » fait partie intégrante des intérêts qu’il échange actuellement aux semaines annuelles de la philosophie, à Lille (France). Il y fait office de répondant à M. Daniel Innerarity, professeur espagnol de philosophie, chroniqueur au journal El Païs et au journal basque El Correos. Ensemble, ils ont participé à publier récemment « Éthique de l’hospitalité » aux Presses de l’Université Laval. Ces deux professeurs partagent des intérêts de pensée comme : Nouvelles voies pour la politique, ou La gauche doit soirtir du pessimisme. Comme deux vedettes, ils s’échangent des expressions comme « chronopolitique » ou "climatologie politique". Pour mieux connaître l’envergure du professeur Dominic Desroches, sachons aussi qu’il agit présentement comme chercheur invité au Séminaire de M. Philippe Grosos à l’Université de Lausanne en Suisse, dont l’intérêt majeur se centre sur Fichte, de l’époque de la Révolution française, mais qui aurait servi de « précurseur » aux idées allemandes construisant le national socialisme. Je coupe les coins ronds comme un journaliste de Gesca.
    Cette mise en situation (obtenue par la magie d’Internet) peut expliquer que l’homme, actuellement à un sommet de sa carrière universitaire, vit intensément des échanges intellectuels qui le poussent à son maximum. Pour organiser sa pensée au quotidien à tels niveaux, il ne peut sans doute pas simplifier son articulation aux préoccupations terre-à-terre qui sont souvent les nôtres ici, qui courons au plus pressé. Bien qu’il aime se tenir près des siens en leur faisant profiter de sa formation spécialisée, il s’attend peut-être à ce que nous fassions l’effort de compréhension d’une pensée élargie. J’espère ne pas fausser ici complètement le sens de cette distance qui n’est sûrement pas méprisante.
    Alors, faisons nos devoirs vis-à-vis de sa métaphore climatopolitique. Il entre en matière par le résumé de ses derniers envois : Les fantômes, Hamlet, les peurs québécoises. Il nous fait son premier reproche à l’effet que ces contributions n’ont pas eu d’échos significatifs… mais il tempère en reconnaissant une certaine aridité au discours. Et il prend à témoin notre grand révolutionnaire Pierre Vallières, qui voulut tuer notre peur d’avoir peur. Comme un "stand-up comic", il pique son auditoire dès le début en comptant les spectateurs déjà endormis aux premières rangées, raillant ceux qui s’impatienteraient déjà de son vocabulaire : fantômes, épouvante climatique, essai de météorologie, météo politique appliquée.
    Le virtuose « clenche » aussitôt sur « l’atmosphère » politique. Il tente de nous semer : l’atmosphère correspond à l’air que nous respirons tous ensemble, donc public ; l’atmosphère politique contient l’azote, a un discours public, possibilité de parler et de respirer ; l’atmosphère est stratifiée, chaude au sol, froide en hauteur : vapeur d’eau, précipitations, chute des corps vers le sol, à vitesse variable, selon la résistance, comme en politique ; la nature aime envoyer des messages sous forme de précipitations
    Usant d’autodérision, D.D. pense à la réflexion des lecteurs : « L’auteur est fou, ou il en fume du bon… » Mais ceci lui sert de blocs de départ du sprinter : les spectres se forment au-dessus de nos têtes, qu’ils ont des messages à livrer ; en politique, un spectre est un nuage qui se promène au-dessus de nos têtes : noir, annonce un malheur, haut, froid glacial, bas (niveau du peuple) :brouillard politique ; harmonisation entre la coalescence des gouttelettes et l’effet Bergeron dans les nuages cumuliformes…grêlons, courant ascendant, tout le monde sait cela dans nos collèges, me semble que la chose est claire…
    Par compassion, il nous en lance une facile : " …quand il pleut, il faut se replier et attendre le retour du beau temps. Et c’est exactement ce que le Québec connaît dans l’heure : un ciel nuageux, menaçant, des perturbations politiques au quotidien, qui n’échappent à personne et la formation constante de brouillard au sol au moins depuis 2004."
    La classification des spectres est valable pour toutes les politiques du monde. La seule différence entre ceux de l’Allemagne, de la France, de Palestine, d’Arménie… et du Québec, c’est que ces pays sont des États, sont souverains.
    Les météores amènent le conférencier au sommet de son art :
    « Si, pour quelque raison que ce soit, des lecteurs assidus ou occasionnels réclamaient une suite, nous nous proposerions alors de préciser le statut et le rôle des « perturbations » dans la vie politique québécoise… » Alors, chers collègues, montrons au professeur que nous avons bien suivi : Encore ! Encore ! Il cabotine un peu, à la Martin Matte, ne soyons pas avares d’applaudissements : Oui, monsieur Desroches, nous voulons la suite !…
    Mais le philosophe reprend vite son sérieux : la difficulté à décoder les messages des météores. Exemple simple : tornade, phénomène rare, formé par la force des vents. Politiquement, quand la foule est mobilisée et qu’elle veut quelque chose, rien ne reste sur son passage…s’offre un petit tourbillon soudain qui change toute son histoire !
    Au Québec, un lieu nordique et froid, les tourbillons et les tornades sont rares, tellement rares…

    Tout cela pour dire que la météorologie politique peut nous apprendre encore beaucoup et qu’il convient d’analyser sérieusement le temps qu’il fait si nous voulons tirer des leçons du Québec spectral.
    Mais pourquoi notre ciel politique est-il gris, laissant filtrer seulement quelques météores ? On ne le sait point. Mais ce que l’on sait en revanche, c’est que les « perturbations des systèmes » ne manquent pas et que les spectres n’ont pas réussi à se faire comprendre chez nous ( ?), la preuve : nous sommes plus de 7 millions et nous avons encore peur de sortir sur la rue
    N’est-ce pas qu’il finit fort ? Pour un prof qui n’ose pas dévoyer ses étudiants du programme pédagogique pour aller manifester…
    Québec : perturbations politiques au quotidien…
    …pays souverains
    la foule qui se fait tornade, événement rare au Québec… d’un petit tourbillon soudain, peut changer son histoire !
    Sept millions ! (mettons 5 millions d’adultes d’expression française) qui avons peur de sortir sur la rue…
    Et l’homme prétend que le Québec n’a pas besoin de lui !

  • Archives de Vigile Répondre

    22 novembre 2009

    Cher Monsieur Boivin,
    je vous remercie pour votre commentaire. Je le comprends et tente d'y répondre d'emblée. Toute personne qui écrit un texte commet un acte public et doit accepter les critiques. Et formuler des critiques suppose aussi la possibilité que la personne critiquée décide de répondre... C'est ce que je ferai aussi brièvement qu'amicalement, comme d'habitude.
    Concernant l'impossibilité de formuler des commentaires sous mes textes, je ne dirai pas qu'il s'agit là de censure ou d'un refus de dialoguer. En vérité, j'aimerais que la personne qui lit mes textes et ose les critiquer soit en mesure d'écrire au moins 40 mots en lignes dans un article. Au lieu de subir les sautes d'humeur, j'aimerais devoir répondre aux arguments de fonds. N'êtes-vous pas d'accord avec moi jusqu'ici ?
    Quant à ma prétention, je dirai qu'elle n'a pas changé. Lisez mon texte sur les écorchés, vous verrez que je n'ai pas changé et que je continue de dénoncer les textes de course publiés sur Vigile. Mon style est le même et mes textes antérieurs témoignent - vous pouvez le vérifier aisément - du même engagement pour le Québec. J'ai simplement relevé que Vigile carbure aux opinions d'une journée, aux lettres d'indignation, aux lettres inutiles adressées aux éditorialistes qui ne les liront pas, et qu'en bout de ligne, cela revient toujours au même problème. Ai-je tort ? Je ne crois pas.
    Certes, je ne vous visais pas en particulier - j'ai toujours apprécié vos commentaires - mais je trouve que Vigile ressemble parfois à un concours de réactions épidermiques issues des nouvelles de la télévision et de la radio. C'est mon idée. Si vous ne la partagez pas, j'accepterai aussi. S'il y a plusieurs niveaux d'analyse, je suis d'accord avec vous évidemment, les nouvelles quotidiennes me suffisent et je ne ressens pas le besoin d'en aviser les internautes au deux jours. À quoi servent au demeurant toutes ces crises d'amour qui, au jour le jour, finissent par se contredire ?
    Si je lis peu les commentaires et les lettres d'humeur, c'est qu'ils reviennent toujours à la même rengaine : le fédéral est méchant et nous, les bons, nous sommes incompris. Mes textes, pour peu que je puisse leur attribuer une valeur, tentent de sortir de ce cercle et de s'élever afin de comprendre le Québec en dehors du repliement et des diagnostics médiatiques immédiats. Êtes-vous en mesure de m'accorder cela ?
    Enfin, il est toujours possible de répondre à mes textes dans la Tribune libre. Je ne refuse aucune discussion, ni sur le contenu, ni sur mon style. La preuve : je vous réponds immédiatement et je retiens vos remarques, qui sont loin d'êtres insensées. Toutefois, loin de me situer dans une classe à part - si vous saviez à quel point je travaille ailleurs à d'autres niveaux - l'ensemble de ma production témoigne de mon humilité. Il me semble que je fais preuve d'ouverture depuis mes débuts sur Vigile.
    En espérant ne pas vous avoir trop déçu,
    Dominic Desroches

  • Gaston Boivin Répondre

    22 novembre 2009

    Excusez-moi, il apparait que j'ai oublié de signer le troisième commentaire au texte de O..
    Gaston Boivin

  • Archives de Vigile Répondre

    22 novembre 2009

    Monsieur Desroches, d'ordinaire, j'aime beaucoup vous lire, mais, dans votre commentaire au texte d'O, même si on y retrouve toujours le même intelligence et luicidité, il me semble que s'y est ajoutés une certaine prétention et un mépris non caché pour certains intervenants de Vigile que vous qualifier de souffrant(s) dans leurs interventions et comme donnant plus d'importance aux manchettes qu'au contenu. Je trouve cela dommage! Mais cela ne me surprend pas, car votre nouvelle façon de nous pondre vos textes ex-cathedra en refusant les commentaires, m'avait fait présumer que vous vous situiez dans une classe à part.
    Pour quelqu'un qui lit peu lui-même les contributions sur Vigile, il faut croire que vous le faites suffisamment pour être en mesure d'y faire l'appréciation personnelle que, des lettres personnelles addressées à la Tribune libre de Vigile, on n'y retrouve rarement la distance et la hauteur qu'exige la pensée mais la plupart du temps des lettres d'indignation et de souffrance individuelle, et ce sans compter tous ceux qui se limiteraient aux manchettes des journaux et qui continuent à se plaindre sur la tribune libre de Vigile(Me semble que mieux vaut le faire là qu'à la Tribune(libre?!)de la Presse ou de Dominic Desroches, puisque les gens ont la conviction que, généralement, ils pourront y être entendus, même s'ils n'ont pas la même opinion que les autorités détenant les pouvoirs au Québec ni non plus toutes les finesses et la justesse de la philosophie et même si cela peut les exposer au jugement de certains qui pourraient les taxer de porter attention plus aux manchettes des journaux qu'à leur contenu.
    La parole comme l'expression peut être de bien des niveaux: Analytique, synthétique,imaginative, logique, constructive, solutionnante, critique,positive, négative,dénonciatrice, plaignarde, rigoureuse, superficielle,etc. Elle est préférable quand elle est globale, consistante et progressiste mais on ne doit pas pour autant, au nom de la distance et de la hauteur qu'exigerait la pensée, rejeter ou mépriser la manifestation d'aucune de ses composantes, sinon, dès lors, ce qu'on accepte ce n'est que son droit d'exister en totalité, lui refusant celui d'exister en partie.

  • Archives de Vigile Répondre

    21 novembre 2009

    Je profite de cette tribune pour laisser un message à monsieur Desroches ne pouvant le faire sous son artible ''Le fantôme de Shakespeare''
    Magnifique mélange de la science politique et de l'art, quel plaisir pour l'esprit. Que dire...vous êtes génial.
    Bravo, continuez d'écrire vous le faites si bien.
    Entre être ou ne pas être, je choisi d'être.
    Et lorsqu'on choisi d'être on naît.
    Jeanne du Lys

  • Archives de Vigile Répondre

    21 novembre 2009

    Cher Ouhgo,
    je vous félicite d'abord pour votre 70e article paru sur la Tribune libre. Si vous en écrivez encore une centaine, vous aurez une place au Panthéon des scribes de Vigile. Plus sérieusement, je suis très heureux d'avoir un second lecteur.
    Or, je répondrai rapidement à votre texte en disant ceci : mon style peut laisser croire que mon pronostic sur l'avenir du Québec est négatif, mais ce n'est pas tout à fait juste. Car si je présente une théorie politique des fantômes, c'est pour nous obliger à reconnaître la peur, la dépasser, afin d'envisager sereinement l'avenir - qui reste à configurer - loin de l'émotion et des emportements.
    Au sujet de la conclusion non métaphorique de mon texte sur Shakespeare, je veux montrer que le spectral est une idée intéressante pour développer notre rapport à la pensée politique contemporaine au Québec. Nous sommes toujours sujets, je le crois, au retour des revenants. Si les lecteurs passent outre mes contributions au nom de la métaphore et de mon style, et bien tant pis pour eux ! Je lis peu de contributions sur Vigile moi-même, alors pourquoi exiger des autres qu'ils me lisent ? Je crois parfois que j'écris aux fantômes directement. Peut-être eux, me lisent-ils ? J'espère leur faire peur afin d'éviter des souffrances chez les miens. Quant à ceux qui n'aiment pas mes textes au nom du style, je crois qu'ils sont nuls en science politique, surtout s'ils levent le nez sur des mots sous prétexte qu'ils ne parlent pas directement des propos rapportés dans les journaux et les médias. La pensée exige la distance et la hauteur, ce qui est assez rare - je mesure mes mots - dans les lettres personnelles adressées à la tribune libre, la plupart du temps des lettres d'indignation et de souffrance individuelle.
    Cela dit, le problème du Québec, c'est qu'il semble incapable de sortir de son passé. L'idée de la peur signifie que de nombreux Québécois - pas tous, évidemment - se laissent berner par le discours de l'autre qui cherche à le réduire et à le faire disparaître.
    Si on applique cette idée à la langue, on voit que la pièce de Shakespeare, Hamlet, peut nous apprendre beaucoup des choses sur nous-mêmes. Pour comprendre mon propos donc, cela prend de la sensibilité et des souliers... pour marcher dans la ville de Montréal et écouter la langue parlée.
    Aussi, je suis heureux que des Québécois combattent la peur. Toutefois, je ne peux pas encourager mes étudiants à manifester parce que je suis en sabbatique, mais aussi parce que, comment dire ?, diriger l'esprit des étudiants dans une direction qui n'est pas affichée dans le plan de cours est non pédagogique et aux limites de l'éthique...
    Quant à la Commission, la vérité sortira bien un jour. On réalise déjà mieux aujourd'hui à quel point ce cirque n'a rien réglé et combien les commissaires, encore plus riches et célèbres sur le dos des pauvres, "apparaissent" ailleurs. Leur discours est un discours d'affolement culturel ; ils ressemble à de l'intolérance à l'égard des gens qui n'ont pas de maîtrise universitaire et de cours multidisciplinaire, comme la bioéthique ou l'histoire comparative des grenouilles nordiques avec les grenouilles septentrionales. Loin des études comparatives sans fondements, je défends la thèse voulant que cette commission soit apparue dans un climat d'incertitude identitaire et que le problème ne s'est pas réglé, et qu'il ne sera pas réglé demain, car il est politique. J'ajoute que les présidents du cirque ont joué avec les mots pour culpabiliser encore le peuple et que, somme toute, ils se sont comportés comme d'autres espions, je pense à ceux du fédéral, qui font tout tomber sur le dos du Québec. Les Québécois ont le dos large, est-ce trop métaphorique ?
    Merci de votre attention.
    Dominic Desroches
    Nota: si j'ai la force d'écrire un autre texte - j'en doute toujours plus à tous les jours que la vie m'apporte -, je rédigerai un petit essai de météorologie politique qui aura pour ambition d'expliquer la formation des nuages et du brouillard au Québec. Seuls les lecteurs les plus curieux - je vous donne raison - et les plus puissants sur le plan des idées accepteront de discuter d'une telle théorie. Je n'ai pas d'idées aussi bonnes que l'auteur de La gauche efficace, mais cela ne me déplaît pas. J'aime bien lire cet auteur, c'est tellement inspirant. Quant à ceux qui se limitent aux manchettes des journaux., ils continueront à écrire des lettres et à se plaindre sur la tribune libre de Vigile. Le monopole n'est pas seulement l'affaire de la SAQ et de Power... Sans eux, à quoi ressemblerait Vigile ?