On le fait exprès à la commission Bastarache pour tourner en rond, poser des questions inutiles, s'attarder au futile tout en évitant soigneusement de pousser plus loin l'enquête quand enfin on traite de la nomination des juges?
Et où est Michel Bastarache dans cette commission qui porte son nom? Il n'intervient pas, sauf à mauvais escient, laisse les avocats s'acharner quand il s'agit de discréditer la version de Marc Bellemare, mais bâcler les interrogatoires ou les noyer sous les détails quand les parties mises en cause par l'ancien ministre de la Justice s'expriment.
La journée d'hier a été exemplaire à cet égard. L'avocat du premier ministre, André Ryan, a longuement asticoté l'ancien sous-ministre associé Georges Lalande, qui avait déjà témoigné de nombreuses heures la veille, en y allant de questions aussi peu pertinentes que de savoir si, lorsqu'il a croisé Marc Bellemare cet été, c'était sur la terrasse ou à l'intérieur d'un restaurant, ou si, en cette ère du courriel, il est venu lui-même porter au Devoir un texte d'opinion qu'il souhaitait voir publié!
Heureusement, ces niaiseries ont fini par finir. Le témoin suivant, le ministre Norman MacMillan, est allé droit au but: oui, il a appuyé l'avocat Marc Bisson, fils d'un collecteur du parti, qui souhaitait devenir juge. Enfin dans le vif du sujet! Erreur: en vingt minutes, M. MacMillan avait vidé son sac et fermé ses documents, visiblement pressé de partir. Cela tombait bien: les avocats n'avaient rien d'autre à lui demander alors son témoignage, contradictoire, restait à explorer.
Scénario inverse dans l'après-midi, où le collecteur de fonds Charles Rondeau a, à la demande de l'avocat de la commission, longuement détaillé ses activités de financement, jusqu'au nombre de personnes qui peuvent entrer dans une salle lors d'une soirée-bénéfice. «Ça fait une heure quinze qu'on jase», a fini par objecter, au grand soulagement de tous, Me Ryan. Le commissaire Bastarache, lui, ne pipait mot alors qu'en matinée, il ne s'était pas gêné pour bloquer des questions de l'avocat de Marc Bellemare sous prétexte qu'il revenait sur des faits établis...
L'intervention de Me Ryan a donc permis de faire déboucher la jasette sur de vraies questions et on a su que M. Rondeau était intervenu pour l'une des nominations controversées, celle du juge en chef adjoint Michel Simard. Donc, M. Bellemare avait raison? Non, car il s'agit maintenant de tout banaliser. Des pressions indues? Pas du tout, plutôt le travail d'un bon député ou d'un militant dévoué, ont dit les témoins hier, en précisant même que c'est M. Bellemare qui a, à leur surprise, finalisé les nominations qu'ils n'avaient eux-mêmes que suggérées en passant.
Pourtant, tout ceci renvoie exactement aux propos de Marc Bellemare en avril qui, alors que le Québec s'interrogeait sur les liens entre le financement du Parti libéral, des secteurs comme la construction et l'attribution de contrats ou de nominations, avait simplement révélé l'influence des collecteurs de fonds auprès du gouvernement. L'actuelle commission est une perte de temps, mais ce qu'elle laisse entrevoir confirme qu'il y a bien plus vaste à explorer.
Commission Bastarache
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