Une solution à portée de la main

Une réduction des taxes fédérales constituerait une solution équitable au déséquilibre fiscal.

Déséquilibre fiscal


Claude Castonguay
_ Ancien ministre de la Santé sous Robert Bourassa et maître d'oeuvre de la mise en place de notre régime d'assurance maladie, l'auteur est fellow invité au groupe Cirano.
Le premier ministre Stephen Harper vient de déclarer qu'il n'y aura pas de solution au problème du déséquilibre fiscal tant qu'il n'y aura pas de consensus entre les provinces. Aussi bien dire qu'il reporte aux calendes grecques la solution de cette question. En effet, les provinces ont des points de vue différents selon qu'elles se situent au-dessus de la moyenne nationale en terme de richesse, telles l'Ontario et l'Alberta, ou en dessous, tel le Québec. Les provinces plus riches, dont les dépenses par habitant sont inférieures à celles du Québec, n'acceptent pas non plus que le gouvernement fédéral prenne en ligne de compte les choix plus dispendieux des Québécois.
Le besoin d'un consensus au niveau des provinces donne l'impression d'un faux fuyant car cette question, dont on exagère l'importance et la complexité, est loin d'être insoluble. Quelle est la nature exacte du problème? Selon une récente étude réalisée conjointement par le Mouvement Desjardins et Cirano, le déséquilibre fiscal est attribuable au gouvernement fédéral dont les impôts sont trop élevés en regard des responsabilités qui lui sont propres.
Deux voies s'offrent au gouvernement fédéral pour régler la question. Il peut soit prendre la voie de l'augmentation des paiements de transfert aux provinces, soit prendre celle de la réduction de ses taxes et impôts.
La voie des transferts signifie inévitablement l'accroissement des dépenses fédérales dans des champs de juridiction provinciale tels la santé, l'éducation et les infrastructures. Elle exige la conclusion d'ententes qui limitent inévitablement la liberté de choix des provinces quant à leurs priorités. De plus, les négociations qu'elle nécessite inévitablement, comme c'est le cas présentement, créent des tensions stériles entre les deux ordres de gouvernement.
Réduction des taxes
La seconde voie, celle de la réduction des taxes et impôts par Ottawa, ne nécessite pas l'accord des provinces ni la conclusion d'ententes. Elle réduit le quémandage et la dépendance des provinces auprès du gouvernement fédéral. Elle laisse pleine liberté aux provinces de faire leurs choix quant à leurs priorités. Les provinces ont pleine liberté d'occuper en tout ou en partie l'espace fiscal libéré par le fédéral. Enfin, ce qui est très sain, elle responsabilise les provinces en les obligeant à fixer le niveau de leurs impôts en fonction de celui de leurs dépenses.
En plus de ses avantages évidents, la voie de la réduction des impôts est beaucoup plus simple à mettre en oeuvre. Elle évite les longues négociations et les affrontements desquels chaque partie prétend sortir gagnante. Le gouvernement Harper a d'ailleurs pris cette voie en réduisant la TPS de 1 % et en libérant ainsi, selon les données de 2005, un espace fiscal de l'ordre de quelque 1,3 milliard par année. Il a également pris l'engagement d'apporter une autre réduction de 1 % ce qui signifie au total l'évacuation d'un espace fiscal de l'ordre 2,6 milliards par année pour le Québec et de quelque 9 milliards pour l'ensemble du pays. Ce qui n'est pas négligeable.
Le gouvernement Charest devrait normalement militer en faveur de la correction du déséquilibre fiscal au moyen de la réduction des impôts fédéraux. Cette voie s'inscrit pleinement dans le sens des positions traditionnelles du Québec visant à limiter les intrusions du gouvernement fédéral dans ses champs de compétence. Québec pourrait occuper sans tarder l'espace fiscal libéré par les réductions de la fiscalité fédérale, notamment de la TPS. Il pourrait même commencer immédiatement et prendre avantage de la première réduction de cette dernière et augmenter la TVQ de 1 % avec crédit pour les plus démunis.
La marge de manoeuvre ainsi dégagée pourrait être utilisée pour réduire l'impôt sur les revenus de la classe moyenne et les impôts sur les entreprises, notamment le très négatif impôt sur le capital. Cette dernière réduction aurait pour effet de stimuler les investissements privés et la création d'emplois au Québec qui ont chuté de manière inquiétante. (...)
Solution durable
Une réduction des taxes fédérales constituerait une solution durable et équitable au déséquilibre fiscal. Elle a l'avantage de traiter toutes les provinces sur le même pied de même que tous les Canadiens sans égard à leur lieu de résidence. Elle présuppose cependant que le gouvernement fédéral donne suite à la réforme de la péréquation. Le cabinet fédéral connaît bien les points de vue des provinces sur les deux questions et il a tous les éléments en main pour prendre des décisions éclairées.
Il faut souhaiter que le premier ministre Harper et son gouvernement continuent dans la voie du respect de l'autonomie et des compétences des provinces. Une solution juste et équitable de la question du déséquilibre fiscal constituerait un autre solide argument en faveur du fédéralisme.


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