25 ans, minimum

Le rapatriement de brevets n’est qu’un exemple d’une politique résolument indépendantiste

Tribune libre - 2007


« La logique et le droit permettent donc aujourd'hui d'affirmer que le
pacte confédératif, par ses origines et par le cours de l'histoire, est nul
et périmé. » - Manifeste du RIN, Octobre 1960
***
Les gestes de souveraineté sont très souvent appliqués à des enjeux
nationaux. Traiter de ces enjeux est nécessaire. Cependant, il est tout
aussi important de traiter d’enjeux concrets. Trop souvent, le parti
québécois a adopté un discours loin d’être concret, face aux enjeux de
l’indépendance.
Le gouvernement fédéral est expansionniste. Ottawa n’a cessé, depuis 1867,
d’émietter le gouvernement québecois. La prise du pouvoir par un
gouvernement indépendantiste sonnera la fin de la récréation fédérale. Ce
sera le temps de la contre-offensive.
Des pouvoirs qui lui sont déjà conférés par l’article 91, peu sont bien
gérés ou gérés en fonction des priorités des Québécois. On n'a qu’à penser
aux relations avec les amérindiens, la citoyenneté et l’immigration,
l’assurance chômage… excusez assurance-emploi, les pêcheries, la politique
monétaire. De ces pouvoirs, les brevets ne font pas exception.
Les brevets, un exemple patent
Les brevets et au sens plus large, la propriété intellectuelle, forment le
fer de lance de l’économie du savoir et de la créativité. Sans de tels
outils, nos artistes, nos créateurs, nos inventeurs et scientifiques
seraient exploités. Sans de tels outils, nos marchés seraient envahis par
des contrefacteurs issus des économies émergentes.
Parmi les formes de propriété intellectuelle, il y a les brevets. Les
brevets sont des lettres patentes, soit des simili lois, délivrés par le
gouvernement fédéral. Les brevets sont valides pour une période de 20 ans,
si l’on se conforme à la loi et que l’on paie une taxe annuelle que l’on
appelle annuité. Les brevets ont une durée de 20 ans dans les pays
industrialisés.
Malheureusement, les brevets canadiens ne sont publiés que dans une seule
langue officielle. Cette infraction linguistique crée une situation où
seulement 5 % de la population canadienne dépose en français.
Essentiellement, il n’y a que les inventeurs indépendants qui choisissent
de déposer en français. Les Québécois, comptant pour 24 % de la population
canadienne, sont donc assimilés. Des entrepreneurs d’ici pourraient se
faire poursuivre en vertu de simili lois dont ils ne comprennent pas un
traître mot. Pire encore, la population québécoise est tenue dans la
noirceur la plus totale face à cette mine de connaissances primordiales que
sont les brevets.
Le dépérissement du français dans les brevets n’est que la pointe de l’iceberg. Le registre des dessins industriels, le registre des marques de
commerce sont d’autres exemples patents où l’unilinguisme règne. Face à
cette situation dramatique, il y a urgence d’agir.
Un gouvernement national agirait. Sous l’égide d’une constitution
nationale, un gouvernement national québécois pourrait adopter une loi sur
les brevets. Brevets délivrés en français, cela va de soi. Il serait
intéressant, par le fait même, de consacrer l’importance de la culture et
de l’innovation pour la société québécoise, en faisant de cette loi une loi
unique au monde. L’unicité de cette loi proviendrait du monopole conféré :
25 ans, comparativement à 20 ans partout ailleurs. Cette période accrue
pourrait donc être très convoitée par les compagnies en haute technologie.
On pourrait également rallonger la période pour les droits d’auteurs, les
dessins industriels, les obtentions végétales, par exemple.
Stratégiquement, une telle politique aurait plusieurs emplois.
• Premièrement, les compagnies et les inventeurs utilisant le brevet
québécois auraient un avantage certain. Briser cet avantage, donc briser la
constitution québécoise serait contre-productif. Les compagnies seraient
beaucoup plus réticentes à voir leurs monopoles brisés. Elles seraient donc
plus réticentes à appuyer le système canadien.
• Deuxièmement, un tel geste amènerait des rentrées fiscales. L’an passé,
l’OPIC a fait un résultat de 6.4 millions. Sans aucun doute, l’allongement
de la période de protection à 25 ans permettrait d’engranger des revenus
d’annuités supplémentaires.
• Troisièmement, un tel système serait un incitatif à utiliser le système
judiciaire du nouvel ordre constitutionnel québécois. Une cour suprême
québécoise, par exemple.
• Quatrièmement, une telle politique amortirait le « choc
post-indépendance ». Une loi sur les brevets québécoise pourrait déjà être
harmonisée avec la convention de Paris, le traité de coopération en matière
de brevets et les divers traités internationaux (TRIPS), avant leur
ratification « officielle » par l’état du Québec. Une voie d’entrée «
canadienne » pourrait aussi permettre aux titulaires de brevets canadiens
de déposer des brevets québécois. Ainsi, les étrangers pourraient déposer
au Québec sans tracas. Le choc créé par l’indépendance serait donc minimal.
Il ne suffirait que de ratifier les diverses conventions et le tour serait
joué. La situation De Facto sera confirmée De Jure.
• Cinquièmement, cela créerait des centaines d’emplois dans la région de
Québec. Quelques centaines en fonctionnaires, et pratiquement tout autant
d’agents de brevets et adjoint(e)s juridiques. Des emplois hautement
rémunérés, en pleine sphère technologique.
Conclusion
L’Indépendance et la constitution québécoise doivent créer des emplois, de
la richesse, bref, des avantages. Nous avons le devoir, nous,
indépendantistes, de penser dès maintenant à ces avantages. Nous avons le
devoir de rendre le projet indépendantiste concret. Ces avantages doivent
être tels que les québécois, s’ils y renoncent, ils se feraient tort à eux-mêmes.
Le rapatriement de brevets n’est qu’un exemple d’une politique résolument indépendantiste. Encore faut-il avoir le courage d’avoir cette
politique résolument indépendantiste.
Frédéric Picard

St-Jean-Sur-Richelieu

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Membre de l'Union démocratique pour l'indépendance du Québec (UDIQ)





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1 commentaire

  • Archives de Vigile Répondre

    11 juillet 2007

    Voilà comment doit-on s'y prendre pour expliquer les pourquoi et la nécessité de l'Indépendance nationale du Québec, tout en y démontrant un des aspects de son urgence économique.
    Voilà comment doit-on s'y prendre pour montrer à la population et aux diverses forces de la société civile et leur démontrer jusqu'à quel point il peut être avantageux d'être une nation libre de ses choix, maître de son destin politique.
    Alors que certains attendent les bras croisés en baillant aux corneilles, jusqu'au jour où les sondages indiqueront le temps de parler de souveraineté et de la réaliser, d'autres sont à pieds d’œuvre pour faire la démonstration de l'urgence d'agir maintenant pour faire advenir ce pays du Québec.
    C'est ce que j'ai déjà décrit comme étant l’art de se rendre maître de la réalité politique !
    Monsieur Picard je vous lève mon chapeau pour ce travail !
    Normand Perry
    Chroniqueur à Vigile.