Réponse à Benoit Pelletier

Faire la démocratie

Tribune libre

Monsieur Pelletier,
J’ai été profondément touché par la candeur de votre lettre ouverte du 6 octobre 2010 dans La Presse, intitulée [« une grosse fatigue »->31233]. Dans le passé, j’ai déjà été extrêmement actif dans la poursuite du dossier national. J’étais impliqué et indépendantiste. Je suis toujours indépendantiste. Je crois toujours à un rapatriement de tous les pouvoirs exercés par le gouvernement fédéral. Une vision rejetée par René Lévesque même …
Malheureusement, ce projet a été combattu par tous les partis politiques majeurs du Québec, jusqu’à ce jour. À force de lutter contre vents et marées, je suis devenu las et profondément cynique de la classe politique. Plus loin que les scandales politiques qui éclaboussent tous les partis, pourquoi ce cynisme ?
Résumons :
Nous avons les projets suivants pour l’élection québécoise du 8 décembre 2013 :
1) Ne rien faire, tout en rouspétant lorsque le fédéral met ses grosses pattes sur la juridiction du Québec (Parti Libéral).
2) Rouspéter contre le fédéral, sembler faire quelque chose, tout en respectant le cadre de la juridiction imposée par le BNA Act. (Parti Québécois)
Vous comprendrez alors pourquoi j’utilise le « j’étais impliqué ». Je suis désormais profondément désillusionné de nos partis politiques. Ces derniers n’offrent qu’une variation sur le même thème. Il y a une raison à cela. Nos partis politiques sont totalement autonomes des idées de la population. Ce sont des institutions d’administration publique. Ils ont perdu leurs rôles de faisceaux d’idées.
Les partis politiques vivent parfaitement sans l’implication de la population, à même les généreuses contributions du DGE.
Aux cinq ans, la population choisit le moins pire des deux partis. Par après, les partis s’en gargarisent, prétendant la victoire et ignorent le taux d’abstention grandissant. Ils reçoivent leurs subventions du DGE et la roue tourne pour un autre cinq ans. Certains partis s’offusquent même pour obtenir le statut de parti d’opposition, afin de ne pas dépendre du financement populaire …
C’est une vision extrêmement glauque, vous en conviendrez.
Faire la démocratie
Le renvoi de 1998 de la cour suprême sur la sécession du Québec contient certains indices qui pourraient, selon moi, nous aider dans l’épanouissement du Québec. Peu importe la vision que l’on ait du Québec face au Canada.
En effet, le renvoi insiste sur la primauté de la démocratie dans le système confédéral canadien. Ainsi, un référendum gagnant sur un changement constitutionnel donné (peu importe soit-il), OBLIGE le gouvernement canadien à sortir de sa torpeur et entamer des négociations constitutionnelles.
Tous nos partis politiques refusent d’entamer un tel référendum. Qu’il soit pour un amendement constitutionnel dans la confédération canadienne ou pour la souveraineté du Québec. (D’où mon cynisme …)
Ce qui me force à penser à la question suivante :

Si un tel référendum ne venait pas des élus, mais de la population elle-même ?
Ainsi, un référendum d’initiative populaire sur l’abolition de la charge du lieutenant gouverneur au Québec (par exemple), forcerait le gouvernement fédéral à négocier en ce sens. Le Québec deviendrait alors une province républicaine dans un Canada… monarchiste. Un rêve, qui je l’espère, saurait séduire plusieurs fédéralistes nationalistes, comme vous. On pourrait aussi faire de même pour limiter la juridiction d’une commission des valeurs mobilière pancanadienne sur le territoire québécois.
Le tout se ferait sans forcément tenir compte des partis politiques. Le processus se ferait par les efforts du peuple et le pouvoir de pétition, puis par référendums lors d’élections municipales, scolaires ou provinciales. Des référendums à date fixe, évidemment, pour éviter l’explosion des coûts. Si la Suisse, un pays de 7,8 millions d’habitants le fait, je ne vois pas pourquoi le Québec, qui possède une population comparable, ne pourrait pas le faire. Surtout considérant que la Suisse possède 4 langues officielles et un système de cantons hermétique.
La population doit-elle attendre que ses élites décident pour elle ? Ou, tout comme moi, croyez vous que la population EST le gouvernement ?
Il est clair qu’en redonnant aux Québécois les leviers sur leurs institutions, soit en se dotant d’un régime de démocratie directe, les enjeux faisant l’unanimité seraient initiés par le peuple et approuvés par ce dernier. Les politiciens seraient alors forcés de considérer ces enjeux. Le débat national serait surement un de ces aspects, mais la démocratie directe pourrait être élargie à plusieurs autres enjeux, du gaz de schiste à la participation gouvernementale à un futur colisée des Nordiques. Vous en conviendrez, le climat politique serait beaucoup plus serein, beaucoup plus consensuel. On a qu’à voir le fonctionnement du conseil fédéral Suisse pour s’en convaincre.
Si, au lieu de faire l’indépendance, la souveraineté, renouveler le fédéralisme ou prôner le statu quo, on réalisait la démocratie directe, avant tout ?
Frédéric Picard

Squared

Frédéric Picard16 articles

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St-Jean-Sur-Richelieu

Membre de l'Union démocratique pour l'indépendance du Québec (UDIQ)





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1 commentaire

  • Archives de Vigile Répondre

    8 octobre 2010

    J'ai été sidéré devant la grande participation à la MARCHE BLEUE. Pourquoi tant de participation pour un enjeu local alors que devant les grands enjeux nationaux nous sommes comme peaux de chagrin. Je crois que lors de manifestation pour la sauvegarde de la démocratie il y a RÉPRESSION.. policière entre autre. Il y a quoi devenir frileux...
    Je crois que le parti politique, qui mettra dans son programme des outils(questions référendaires, pas uniquement sur la souveraineté, à toutes les élections et tables de concertations à mi-mandat) pour redonner la démocratie aux citoyens, augmentera ses chances de se faire élire. Le PQ et son chef pourraient très bien redorer leur blason.
    La gestion de l'information c'est bien mais il faut des manifestations de masse pour contrer les lobbyistes.
    Démocratiquement vôtre à tous les jours et non pas aux cinq ans, Noel Lévesque