La frontière entre le zèle de la foi et celui de la secte peut se confondre

À mon frère Jean Tremblay: maire de Chicoutimi

Il faut sortir la foi chrétienne des religions et des sectes.

Tribune libre

Nous partageons vous et moi la même foi, celle en ce Jésus de Nazareth qui des terres de la Palestine nous a livré le message des Béatitudes, celui de la solidarité humaine, de la vérité, de la justice et de la compassion. Il a eu pour ses disciples ainsi que pour ceux et celles qui allaient les suivre des recommandations de nature à leur faire éviter les pièges du fanatisme dont se revêtaient les docteurs de la loi et ces pharisiens qui aimaient se faire voir en public.
« Gardez vous de pratiquer votre justice devant les hommes, pour vous faire remarquer d'eux ; sinon, vous n'aurez pas de récompense auprès de votre Père qui est dans les cieux. Quand donc tu fais l'aumône, ne va pas le claironner devant toi ; ainsi font les hypocrites, dans les synagogues et les rues, afin d'être glorifiés par les hommes ; en vérité je vous le dis, ils tiennent déjà leur récompense. Pour toi, quand tu fais l'aumône, que ta main gauche ignore ce que fait ta main droite, afin que ton aumône soit secrète ; et ton Père, qui voit dans le secret, te le rendra. " Quand vous priez, ne soyez pas comme les hypocrites : ils aiment, pour faire leurs prières, à se camper dans les synagogues et les carrefours, afin qu'on les voie. En vérité je vous le dis, ils tiennent déjà leur récompense. Pour toi, quand tu pries, retire-toi dans ta chambre, ferme sur toi la porte, et prie ton Père qui est là, dans le secret ; et ton Père, qui voit dans le secret, te le rendra. Dans vos prières, ne rabâchez pas comme les païens : ils s'imaginent qu'en parlant beaucoup ils se feront mieux écouter. N'allez pas faire comme eux ; car votre Père sait bien ce qu'il vous faut, avant que vous le lui demandiez. » Mt. 6, 1-8
Mon cher Jean, toi et moi, prenons au sérieux ces paroles de Jésus. Je ne doute aucunement de la ferveur de tes engagements et de la profondeur de ta foi. Ce que je redoute, toutefois, c’est que les circonstances et les influences, plus près de visions religieuses et sectaires que de la foi elle-même, te conduisent à poser des gestes qui ne pourront qu’être néfastes à cette foi héritée de Jésus lui-même. Cette foi nous libère de toute cette mascarade des us et coutumes dont les peuples ont hérité de cultures et de religions desquelles ils sont issus.
Paul de Tarse qui occupe une importance de premier plan dans la compréhension du mystère qui nous enveloppe et dans cette foi qui nous unit a eu ces paroles à l’endroit de ceux et celles qui ne savaient comment se comporter tantôt avec les juifs, tantôt avec des païens. Je t’invite à lire attentivement ce qu’il écrit aux Corinthiens qui se posaient ces questions.
« " Tout est permis " ; mais tout n'est pas profitable. " Tout est permis " ; mais tout n'édifie pas. Que personne ne cherche son propre intérêt, mais celui d'autrui. Tout ce qui se vend au marché, mangez-le sans poser de question par motif de conscience ; car la terre est au Seigneur, et tout ce qui la remplit. Si quelque infidèle vous invite et que vous acceptiez d'y aller, mangez tout ce qu'on vous sert, sans poser de question par motif de conscience. Mais si quelqu'un vous dit : " Ceci a été immolé en sacrifice ", n'en mangez pas, à cause de celui qui vous a prévenus, et par motif de conscience. Par conscience j'entends non la vôtre, mais celle d'autrui ; car pourquoi ma liberté relèverait-elle du jugement d'une conscience étrangère ? Si je prends quelque chose en rendant grâce, pourquoi serais-je blâmé pour ce dont je rends grâce ? Soit donc que vous mangiez, soit que vous buviez, et quoi que vous fassiez, faites tout pour la gloire de Dieu. Ne donnez scandale ni aux Juifs, ni aux Grecs, ni à l'Église de Dieu, tout comme moi je m'efforce de plaire en tout à tous, ne recherchant pas mon propre intérêt, mais celui du plus grand nombre, afin qu'ils soient sauvés. » Cor.1, 10, 23-33
Jean, mon frère dans le Seigneur Jésus de Nazareth, je t’invite à méditer ces deux extraits, celui de Mathieu et ce dernier de Paul. Demande-toi si la campagne que tu mènes répond à l’esprit des Évangiles et des Épitres de Paul auxquels tu crois profondément, ou si tu ne te fais pas la marionnette de ceux et celles qui voudraient bien convertir la foi chrétienne en une secte religieuse. Dans ce dernier cas tu ne manqueras pas d’appuis, mais est-ce vraiment là que t’appelle la volonté du Père?
Je termine, en te faisant une confidence. Un jour on m’a remis une croix à porter comme signe d’apôtre et de missionnaire au service des pauvres et des démunis. En conscience je l’ai donné à une connaissance, devenue aveugle à l’âge de 20 ans, et dont la vie était beaucoup plus près du message évangélique que la mienne. Je me disais dans mon fort intérieur que je devais l’inscrire avant tout dans mon cœur avant de la porter sur mon corps. J’ai, aujourd’hui, 70 ans et j’y travaille toujours.
Jean, la foi que nous partageons n’a pas besoin d’accommodements raisonnables pour la simple raison qu’elle nous libère de toutes les contraintes et nous rend capables de nous adapter à toutes les situations. Notre foi est une foi de liberté. Ne soyons scandales pour personne si ce n’est pour témoigner de cette liberté qui nous permet d’être à proximité de tous et de toutes. Soyons des témoins de vérité, des apôtres de justice, des personnes au cœur ouvert capables de vivre dans tous les milieux et au cœur de toutes les tendances. Soyons simplement et profondément humains.
Voilà, Jean, ce que je tenais à te dire au nom de celui en qui nous croyons profondément toi et moi.
Bien fraternellement
Quelqu’un qui admire ton zèle, mais qui en interpelle les orientations.
Oscar Fortin
Québec, le 16 février 2011
http://humanisme.blogspot.com

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citoyen du Québec et du monde

Formation en Science Politique et en théologie. Expérience de travail en relations et coopération internationales ainsi que dans les milieux populaires. Actuellement retraité et sans cesse interpellé par tout ce qui peut rendre nos sociétés plus humaines.





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4 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    17 février 2011

    Marie Mance Vallée, je comprends que votre préoccupation est celle de garder bien vivante une identité culturelle et historique qui colle à la peau des Québécois et des Québécoises que nous sommes. Votre position se comprend d'autant plus que nous assistons à une offensive qui a pour effet de dépouiller le peuple Québécois de ce qui en constitue ses racines et sa spécificiét historique. Je partage parfaitement cet aspect des choses et j'en rage.
    Le problème que je soulève avec M. Tremblay relève plus de la relation de la foi avec la culture religieuse. Tant et aussi longtemps que M.Tremblay ne confondra pas la premièe avec la seconde, je n'aurai rien à redire. Mais tel ne semble pas être le cas. Mon intervention veut tout simplement rappeler que les requêtes du maire Tremblay ne peuvent se justifier par la foi dont il se réclame.
    Merci bien pour votre commentaire finement exprimé.

  • Archives de Vigile Répondre

    17 février 2011

    Dans une société comme la nôtre, tout fonctionnaire d'État devrait garder une neutralité absolue. Ce que l'on exige d'eux, c'est qu'ils promeuvent des valeurs citoyennes comme l'honnêteté,l'égalité, la liberté, la justice, l'intégration sociale, la séparation de l'État et de la religion, la protection de nos ressources collectives humaines et matérielles, etc. La prière personnelle n'a pas à être ostentatoire, pour être vraie!

  • Archives de Vigile Répondre

    17 février 2011

    Très beau texte, M. Fortin.
    Cependant, pour beaucoup de Québécois de souche française ou de Canadiens français, ce dossier est identitaire.
    C'est la preuve que, malgré des décennies de lavage de cerveaux par les partisans de la nation civique (melting pot à la québécoise), nous ne sommes pas encore tout à fait morts.
    Qui sait si nous n'assisterons pas à un éveil des Québécois endormis au gaz par la propagande.
    Quant à moi, j'ai posté ce matin ma contribution.
    En peu de temps, nous avons vu deux Québécois se tenir debout : Régis Labeaume et Jean Tremblay. Deux personnes représentatives qui refusent d'entrer dans le labyrinthe civique, multiculturel et alouette dont seules les personnes qui l'ont conçu en connaissent la sortie.
    Et on cloue au pilori les rares personnes qui se tiennent debout, et ce, sous toutes sortes de prétextes plus ou moins fallacieux.
    Et on veut faire un pays... avec une identité qui n'en est pas une.

  • Archives de Vigile Répondre

    17 février 2011

    Déjà publié sur Vigile un article se référant au même sujet
    http://www.vigile.net/Le-Crucifix,25993