PARTENARIAT TRANSPACIFIQUE

Adieu veaux, vaches, volailles...

L’industrie agricole s’inquiète pour la suite des choses après une deuxième entaille dans le système de gestion de l’offre

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Le gouvernement fédéral renverse le pot au lait






L’arrivée éventuelle de nouveaux produits laitiers et de volailles provenant de l’étranger provoque des remous au sein de l’industrie agricole, où certains acteurs s’interrogent sur l’impact concret des concessions accordées et, surtout, sur la suite des choses.


 

Alors que le milieu des affaires applaudissait à la conclusion du Partenariat transpacifique lundi, les spécialistes et les représentants des secteurs dont les produits sont soumis à la gestion de l’offre signalent que l’accord constitue, après l’accord de libre-échange Canada-Europe, une deuxième ouverture de suite.


 

« Les concessions annoncées auront un impact important sur les entreprises agricoles québécoises et l’économie des régions », a affirmé le président de l’Union des producteurs agricoles, Marcel Groleau. « Par exemple, si on ajoute les concessions faites dans le cadre de l’accord avec l’Europe, on parle de plus de 5 % du marché des produits laitiers qui sera livré aux importations au terme de l’application des deux accords. »


 

Sous la pression des autres pays, dont la Nouvelle-Zélande, le Canada a ouvert un « nouvel accès limité » aux créneaux qui sont présentement soumis à la gestion de l’offre. Cet accès étranger, en pourcentage du total de la production canadienne, sera de 3,25 % dans les produits laitiers, 2,3 % dans les oeufs, 2,1 % dans le poulet, 2 % dans le dindon et 1,5 % dans les oeufs d’incubation de poulets de chair.


 

À l’heure actuelle, selon l’industrie canadienne, environ 5% des produits laitiers vendus au Canada proviennent de l’étranger sans barrière tarifaire.


 

En échange, le gouvernement fédéral s’engage à verser aux producteurs la somme globale de 4,3 milliards. Un peu plus de la moitié de cela, soit 2,4 milliards, vise à garantir leurs revenus et sera versé pendant dix ans à partir de l’entrée en vigueur de l’entente, suivi d’une diminution pendant cinq autres années.


 

Pour accéder à ces sommes, les producteurs n’auront pas à démontrer qu’ils ont subi des pertes. Par exemple, le producteur laitier moyen recevra 165 000 $, comparativement à 84 000 $ pour un producteur de poulet et 71 000 $ pour un producteur d’oeufs.


 

L’agriculture et le secteur agroalimentaire comptent pour 2,3 millions d’emplois au Canada, qui se classe au cinquième rang des exportateurs mondiaux dans ce domaine. Au final, il représente 6,6 % de l’activité économique canadienne.


 

Le gouvernement fédéral s’est battu fort contre les demandes des autres pays, a déclaré le regroupement des producteurs laitiers du Canada. L’idéal aurait été de protéger complètement le secteur, mais au moins la gestion de l’offre demeure en place et les mesures financières d’Ottawa sont « raisonnables », a affirmé leur président, Wally Smith.


 

La Coop fédérée aurait, elle aussi, souhaité la protection intégrale de l’édifice, notant qu’à ces nouvelles ouvertures s’ajoutera l’arrivée de fromages en fonction de l’accord avec l’Europe.


 

Certains secteurs, toutefois, vont profiter du PTP, comme le porc et le boeuf, qui auront un accès beaucoup plus facile dans des pays clés, comme le Japon, où les producteurs canadiens « joueront à armes égales avec leurs concurrents américains », selon les Éleveurs de porc du Québec.


 

Le pire


 

Les dernières semaines avaient fait craindre le pire à l’industrie, certains présumant d’une brèche beaucoup plus grande.


 

« Les chiffres qui circulaient, comme 10 %, ne me semblaient pas hypercrédibles », a dit Maurice Doyon, professeur titulaire au Département d’économie agroalimentaire de l’Université Laval. « On nous ramène plus entre 2 % et 3,5 % sur une période de cinq ans, avant quoi il y a deux ans pour que l’accord soit mis en place. […] Ce sont des pourcentages qui sont gérables, qui ne vont pas mettre en péril la gestion de l’offre à court terme. »


 

Le diable pourrait se trouver dans les détails, a dit M. Doyon. « Comment tout ça va-t-il se transposer dans la réalité ? Ce n’est quand même pas une bonne nouvelle pour la gestion de l’offre. En un an et quelques mois, on a deux brèches : l’accord avec les Européens et celui-ci. Est-ce qu’il y en aura une autre ? Quelle sera la prochaine étape ? On a ouvert la porte. Une fois qu’on l’a ouverte, elle est ouverte. »


 

Les propos du ministre du Commerce de la Nouvelle-Zélande, Tim Gloser, semblent lui donner raison. « Dans le domaine laitier, certains produits verront une réduction des barrières tarifaires, mais sur d’autres, c’est trop difficile », a dit M. Gloser en conférence de presse. « Nous avions des ambitions. Nous n’avons pas atteint nos objectifs, mais nous avons une direction. Ça met la table pour les futures générations de ministres du Commerce. »


 

Autres réactions



De manière générale, le monde des affaires a salué l’accord, des regroupements de chambres de commerce au secteur minier en passant par des groupes plus restreints, comme les producteurs de canneberges.


 

« Depuis un certain temps, nous sommes inquiets à l’idée de ne pas saisir les occasions qui se présentent dans les marchés émergents », a affirmé le Conseil canadien des chefs d’entreprise. « Pour la première fois, nous aurons un accès privilégié à des pays comme le Japon, l’Australie, la Malaisie, le Vietnam, la Nouvelle-Zélande et Singapour. Cela augmente radicalement notre réseau de partenariats commerciaux et amènera de nouveaux clients pour les manufacturiers, les fournisseurs de services, les producteurs de fruits de mer et les agriculteurs. »







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