Londres | Après avoir vu ses plans en matière de Brexit balayés par la Chambre des Communes, le premier ministre britannique Boris Johnson va tenter de nouveau d’organiser des élections anticipées, espérant se donner une nouvelle majorité afin d’essayer de résoudre la crise politique.
Un nouveau vote sur la tenue de législatives anticipées se tiendra lundi à la Chambre des Communes, juste avant la suspension du Parlement, a annoncé le gouvernement jeudi, au lendemain du rejet par les députés d’une motion gouvernementale proposant d’organiser ce scrutin le 15 octobre.
En plus de ce revers infligé par le Parlement, Boris Johnson a appris que son frère Jo, qui avait voté pour le maintien dans l’Union européenne lors du référendum de 2016, quittait le gouvernement, affirmant sur Twitter placer «l’intérêt national» avant la « loyauté familiale ». C’est le 23e député à quitter le parti conservateur en trois jours, un nouveau coup de couteau dans le dos pour un premier ministre déjà affaibli.
Mercredi, les députés ont voté une proposition de loi lui imposant de demander à l’UE un nouveau report de trois mois du Brexit, prévu le 31 octobre, si aucun accord n’est conclu avec l’UE d’ici le 19 octobre.
Bien que Boris Johnson accuse ce texte, destiné à éviter un «no deal», de « saborder » ses négociations avec l’UE, le gouvernement a annoncé qu’il ne ferait pas d’obstruction parlementaire, redoutée par l’opposition.
Les Lords devraient donc finir d’examiner le texte de loi vendredi, juste avant la suspension du Parlement la semaine prochaine. Boris Johnson espère qu’ensuite le Parlement approuvera la tenue d’élections anticipées, le Labour, principal parti d’opposition, ayant conditionné son accord à l’adoption du texte.
Lors d’un discours qu’il doit prononcer dans l’après-midi dans le Yorkshire (nord de l’Angleterre), le chef du gouvernement plaidera pour ces élections anticipées, dénonçant la «lâcheté» du chef du Labour, Jeremy Corbyn, qui les a évitées, a déclaré un porte parole de Downing Street.
Des élections à quelle date?
Ces élections doivent donner aux Britanniques «l’opportunité de décider ce qu’ils veulent: que Boris aille à Bruxelles et obtienne un accord, ou quitte l’UE sans accord le 31 octobre, ou bien que Jeremy Corbyn arrive à Bruxelles avec sa loi de capitulation», a expliqué ce porte-parole.
Prêts à des élections, les Travaillistes s’interrogent sur la date à laquelle les organiser: avant ou après le 31 octobre?
«Le problème, c’est que nous n’avons aucune confiance dans le fait que Boris Johnson respecte un engagement ou un accord que nous pourrions conclure», a expliqué John McDonnell, poids lourd du Labour, à la BBC.
Boris Johnson a dit que le gouvernement se plierait à la loi, tout en affirmant qu’il n’accepterait «en aucune circonstance» de demander un nouveau report du Brexit, initialement prévu le 29 mars.
Tout report devra être approuvé à l’unanimité des 27 autres États membres de l’Union européenne.
La secrétaire d’État française aux Affaires étrangères, Amélie de Montchalin, a estimé qu’un tel report ne changerait rien au «problème», ajoutant: «il faut que (les Britanniques) sachent nous dire ce qu’ils veulent».
Le prochain sommet européen, qui se penchera sur le sort du Brexit, est prévu les 17 et 18 octobre à Bruxelles.
Boris Johnson est attaqué sur le terrain politique comme judiciaire. Une audience sur un recours contre la suspension du Parlement se tient jeudi à la Haute Cour de justice à Londres.
L’ex-premier ministre conservateur John Major, opposant au retrait de l’UE, s’est joint à cette action en justice intentée par la militante anti-Brexit Gina Miller, qui avait gagné en 2017 une bataille judiciaire pour forcer le gouvernement, alors dirigé par Theresa May, à consulter le Parlement sur le processus de retrait.
Plus de trois ans après le référendum de 2016 qui avait vu les Britanniques voter à 52% pour le Brexit, et à moins de deux mois de l’échéance, Boris Johnson se dit toujours confiant d’obtenir un accord avec l’UE d’ici fin octobre.
«En dépit des fanfaronnades de Boris Johnson sur l’obtention d’un accord, il n’y a pas de vraies négociations en cours à Bruxelles bien que la porte reste ouverte», a tempéré mercredi soir Philippe Lamberts, président des Verts au Parlement européen, après une rencontre avec le négociateur de l’UE Michel Barnier.