Aussant démissionne, Marois jette du lest

Il croit que Mme Marois incarne une vieille façon de faire la politique, très partisane, qui déplaît à sa génération de Québécois.

Nouvelle génération, nouveaux leaders



Jean Martin Aussant, député de Nicolet-Yamaska.
Photo: Jacques Boissinot, PC


Paul Journet et Denis Lessard La Presse (Québec) La crise au PQ se poursuit. Jean-Martin Aussant vient de démissionner du caucus péquiste. Il siègera comme indépendant. Le député de Nicolet-Yamaska était un des plus farouches opposants au projet de loi 204.
Demande-t-il la démission de sa chef, Pauline Marois? «Mon style n'est pas très langue de bois. Alors, je réponds: oui», a-t-il lancé. «Je ne pense pas que Mme Marois est la femme que les gens veulent suivre pour fonder un pays», a-t-il justifié.
Ce n'est pas l'amphithéâtre de Québec qui fait que je prends cette décision-là », a toutefois tenu à préciser M. Aussant en annonçant sa démission. L'appui du PQ à ce projet de loi, qui vise à sécuriser juridiquement l'entente entre la Ville de Québec et Quebecor, symbolise néanmoins ce qu'il «n'aime pas dans la direction actuelle du parti».
M. Aussant était critique officiel en matière d'Économie, d'Institutions financières et de Commerce international. Il dit s'être lancé en politique en 2008 pour deux raisons : pour que le Québec devienne un pays, et pour faire de la politique «différemment de ce triste gouvernement libéral» en parlant «toujours vrai».
Dans les deux cas, il estime que c'est impossible à faire au sein du PQ. Il affirme que Mme Marois ne pourrait que faire «une bonne première ministre». Mais il explique ne pas s'être présenté en politique pour simplement gouverner une province. «C'est la souveraineté que je veux faire, moi. Et les choses sont mal alignées pour la faire en ce moment avec le Parti québécois », estime-t-il. Sa loyauté est d'abord et avant tout «envers la souveraineté».
M. Aussant estime aussi qu'il est impossible de faire de la politique différemment au sein du PQ. «Après trois ans d'efforts en ce sens, je dois malheureusement me rendre à l'évidence quand les personnes qui sont aux commandes, tous partis confondus, ne partagent pas cette vision des choses. Rien de surprenant de la part du gouvernement libéral et de ses députés qui semblent tristement dénués de sens critique et de capacité à se révolter contre l'inacceptable. Ce qui me déçoit par contre, c'est que la direction du parti qui est le mien semble avoir fait le choix d'offrir le même genre de politique que celle du gouvernement, comme si ça nous permettait de jouer à armes égales. C'est là que je ne m'y reconnais plus.»
Il croit que Mme Marois incarne une vieille façon de faire la politique, très partisane, qui déplaît à sa génération de Québécois.
Selon lui, Jean Charest est «l'ultime responsable» du cynisme créé entre autres par la période des questions. Mais il croit que le PQ n'est pas obligé de jouer son jeu. Au contraire, les péquistes devraient «laver plus blanc que blanc».
M. Aussant, habituellement cartésien et réservé, s'est montré plus émotif que ses trois collègues démissionnaires hier. «Mes collègues et amis me manqueront beaucoup», a-t-il avoué, avant de retenir ses larmes. «À ceux qui sont tristes ou en colère, j'espère que le temps fera bien son travail et que ma démission s'avérera utile pour la suite des choses, comme je le souhaite», a-t-il ajouté.
Marois jette du lest
Pendant ce temps, au caucus ce matin, on prévoyait que Pauline Marois jetterait du lest pour conserver l'appui d'une demi-douzaine de députés qui se préparaient à imiter leurs trois collègues démissionnaires.
Dans les premières minutes du caucus, vers 8h ce matin, on ne savait pas encore si elle permettrait le vote libre sur le projet de loi 204 sur l'amphithéâtre de Québec, ou encore si elle permettrait à ses députés de ne pas se présenter à l'Assemblée nationale au moment du vote. Mais la chef péquiste était déterminée à offrir une solution qui éviterait le schisme au sein du caucus.
M. Aussant ne s'était pas présenté au caucus ce matin. Il était resté dans son bureau de l'Assemblée nationale. Une conférence de presse avait été annoncée pour 10h.
Peu après cette annonce, vers 9h10, les députés Véronique Hivon et Alexandre Cloutier, qui étaient perçus comme des opposants au projet de loi 204, ont quitté le caucus de façon précipitée. Ils marchaient très vite et ont refusé de faire tout commentaire. On croit qu'ils agissaient à titre d'émissaires pour convaincre M. Aussant de ne pas démissionner. Ils n'ont finalement pas parlé à M. Aussant, selon ce que rapporte ce dernier.
Malaise au caucus
À l'entrée du caucus, le choc de la démission hier de Lisette Lapointe, Louise Beaudoin et Pierre Curzi ébranlait encore leurs anciens collègues.
Yves-François Blanchet se disait «contrarié». « Le PQ est un parti d'idées, de passions et jusqu'à un certain point, d'amour-propre. Lorsqu'on milite, il faut accepter que la cause est moins importante que son amour propre», a-t-il lancé.
Craint-il d'autres départs? «Je souhaite vivement que non», a-t-il répondu.
Quelques minutes avant, Bernard Drainville a dit ne pas comprendre la description de Pauline Marois que faisaient hier les trois démissionnaires. Il a toutefois indiqué que le PQ devait mieux mettre en valeur ses idées. Les Québécois n'entendraient que les critiques du PQ envers le gouvernement Charest au lieu de leur message positif. Il dit aussi que le PQ doit mieux mettre en valeur son équipe.


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