Bienvenue à Sodome

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La lutte contre le lobby gai de l'Église annonce une purge du camp conservateur



L’auteur du livre Sodoma, Frédéric Martel, sociologue français élevé dans le catholicisme, est un homme courageux. Lui-même gay, il a consacré quatre ans à enquêter sur l’homosexualité dans l’Église. D’ailleurs, son orientation sexuelle lui a ouvert bien des portes et il affirme dans l’ouvrage que des cardinaux et des évêques n’ont pas hésité à lui faire des avances.



L’auteur, Frédéric Martel, tenant un exemplaire du livre-choc.

Photo d'archives, AFP

L’auteur, Frédéric Martel, tenant un exemplaire du livre-choc.




Voici donc des extraits qui permettent de prendre la dimension du fléau et de comprendre pourquoi le Vatican tremble aujourd’hui devant les révélations ahurissantes de la vie des serviteurs de Dieu, qui règnent à Rome.


Homosexualité omniprésente


« Le Vatican a une communauté homosexuelle parmi les plus élevées au monde », écrit Frédéric Martel. « “Pratiquants,” “homophiles,” “initiés,” “unstraights,” “mondains,” “versatiles” [...] ou simplement “dans le placard” : le monde que je découvre, avec ses cinquante nuances de gays, dépasse l’entendement. »


« Le secret le mieux gardé du Vatican n’en est pas un pour le pape François. Il connaît sa “paroisse” [...] Mais ce qui insupporte François, ce n’est pas tant cette homophilie si répandue que l’hypocrisie vertigineuse de ceux qui prônent une morale étriquée, tout en ayant un compagnon, des aventures et quelquefois des escortes. [...] Le pape François a souvent pointé du doigt les “hypocrites” qui vivent des vies cachées et souvent dissolues ; ceux qui “maquillent l’âme et vivent de maquillage”. »



Le pape célébrant une messe dans le cadre du récent sommet de l’Église catholique sur les abus sexuels.

Photo AFP

Le pape célébrant une messe dans le cadre du récent sommet de l’Église catholique sur les abus sexuels.




« Inutile de vous présenter, écrit l’auteur, ce cardinal qui apparaît en public au balcon de la Loggia et qui a été pris dans une affaire vite étouffée de prostitution ; cet autre cardinal français qui a eu un amant anglican et américain [...] ; sans oublier ceux que j’ai rencontrés dans le palais du Vatican et qui m’ont présenté leur compagnon comme étant leur assistant, leur chauffeur, leur valet de chambre, voire leur garde du corps ! »


La dimension gay est « une clé de lecture décisive pour qui veut comprendre le Vatican et ses positions morales. [...] “Que de souillures dans l’Église,” a dit le cardinal Ratzinger qui, lui aussi, a découvert l’ampleur du “placard” à l’occasion d’un rapport secret de trois cardinaux ! Ce fut l’une des raisons majeures de sa démission, selon l’auteur. Ce rapport évoquerait moins l’existence d’un “lobby gay” que l’omniprésence des homosexuels au Vatican, les chantages et le harcèlement érigés en système. »


François, le résistant


« François fait l’objet aujourd’hui d’une violente campagne menée, en raison même de son libéralisme supposé sur les questions de morale sexuelle, par des cardinaux conservateurs qui sont très homophobes — et, pour la plupart d’entre eux, secrètement homophiles. » C’est à dire gays.


« “Le carnaval est fini,” aurait dit le pape à son maître de cérémonie, au moment même de son élection. Depuis, l’Argentin est venu bousculer les petits jeux de connivence et de fraternité homosexuelles qui se sont développés sous le manteau depuis Paul VI, se sont amplifiés sous Jean-Paul II, avant de devenir ingouvernables sous Benoît XVI et précipiter sa chute. Avec son ego tranquille et son rapport apaisé à la sexualité, François, lui, détonne. Il n’est pas de la paroisse ! [...] Menacé, attaqué de toutes parts, critiqué, François, a-t-on dit, est “parmi les loups.” Ce n’est pas tout à fait exact : il est parmi les Folles. »








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Prostitution


Mohammed, un réfugié tunisien de vingt et un ans et hétérosexuel, « est condamné, pour survivre, à se prostituer chaque soir près de la gare centrale de la capitale italienne. [...]; Ce musulman a essentiellement comme clients des prêtres et des prélats catholiques, liés aux églises de Rome ou au Vatican. “Je suis un des migrants que défend le pape François,” insiste Mohammed avec ironie. »


« La relation entre Mohammed et les prêtres qu’il fréquente est déjà une longue histoire. Étrange commerce, au demeurant, hors normes, irrationnel, et qui, du côté catholique comme du côté musulman, n’est pas simplement “contre nature”, mais aussi sacrilège. »


« Dans la prostitution à Rome entre les prêtres et les escortes arabes, deux misères sexuelles s’accouplent : la frustration sexuelle abyssale des prêtres catholiques trouve un écho dans la contrainte de l’islam, qui rend difficile pour un jeune musulman les actes hétérosexuels hors mariage. “Avec les prêtres, nous sommes faits pour nous entendre,” me dit Mohammed, en une formule affolante. »


Anneau de luxure


« Sous Paul VI, on était encore dans l’homophilie et l’“inclination.” Avec Jean-Paul II, les choses changent complètement de nature et d’ampleur. Dans son entourage, il y a plus de pratiquants et un niveau de vénalité et de corruption parfois inimaginable. »


« Il est de notoriété publique que des scandales ont émaillé le pontificat de Jean-Paul II et que plusieurs des cardinaux de son cercle rapproché étaient à la fois homosexuels et corrompus. Mais jusqu’à cette enquête, je n’avais pas mesuré le degré d’hypocrisie de la curie romaine sous Karol Wojtyla. Son pontificat aurait-il été “intrinsèquement désordonné” ? »


« C’est en rencontrant les cardinaux, les évêques et les prêtres qui ont travaillé avec lui que j’ai découvert la face cachée — la face sombre — de son très long pontificat. Un pape entouré d’intrigants, d’une majorité d’homosexuels dans le placard, souvent homophobes en public, sans parler de tous ceux qui ont protégé des prêtres pédophiles. »


« Paul VI avait condamné l’homosexualité, mais ce n’est qu’avec Jean Paul II qu’une véritable guerre contre les gays a été lancée [...] Jean-Paul II et son entourage n’ont pas pris la mesure du piège qu’ils se tendaient à eux-mêmes et du risque qu’ils faisaient courir à l’Église ainsi minée de l’intérieur. »




Ces quelques extraits d’un des livres les plus passionnants et sans doute les plus dérangeants que j’aie jamais lus permettront aux lecteurs de se préparer au choc que l’on subit en lisant le texte de Frédéric Martel. Ni une femme ni un hétérosexuel n’auraient pu réaliser cette enquête si riche de faits, d’émotions, de dégoût, de tristesse et même d’affection pour ces hommes de Dieu à l’âme flétrie, déracinés et dépossédés de leur sens moral et de leur foi.