Charte des droits et pluralisme

Laïcité — débat québécois


Depuis un certain temps, une attention plus particulière a été portée sur l'enjeu de l'immigration récente et de l'intégration des néo-québécois-e-s à la culture d'accueil. Cet enjeu a pris la forme, entre autres, de débats concernant les accommodements raisonnables dans des lieux publics comme le milieu scolaire. Des résistances, bien compréhensibles, sont nées face à la crainte d'assimilation de la culture d'accueil par d'autres normes sociales. Il convient de rappeler vivement que la majorité des personnes issues de l'immigration récente désirent s'intégrer à l'identité québécoise maintenant - et fort heureusement - plurielle.

Mais alors à quelles valeurs communes est-il possible de se référer au sein d'une société diversifiée? Peut-être à celles qui fondent la déclaration universelle des droits de la personne ainsi qu'aux deux pactes internationaux promulguant les droits sociaux, économiques, politiques et culturels. La charte canadienne et celle du Québec s'enracinent dans l'esprit de ces documents. Ils visent essentiellement à promouvoir la liberté, la dignité, l'égalité et la solidarité des communautés humaines. La charte canadienne cherche à éviter toutes les contraintes arbitraires fondées: «sur la race, l'origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l'âge ou les déficiences mentales ou physiques» (art. 15). Tant la charte québécoise que canadienne garantit la liberté d'expression, de conscience et de réunion. Autrement dit, il s'agit d'un véritable projet humaniste laïc de société se basant sur un régime de droit. Malheureusement, tous les pays n'adhèrent pas de facto à un tel régime.
C'est dans ce contexte de sécularisation qu'il convient de situer la déconfessionnalisation de l'enseignement religieux en 2008. Comme le décrit si bien [Yolande Geadah->5201], sociologue: «Il est important d'insister sur le fait que la déconfessionnalisation de l'enseignement s'inscrit dans un processus historique de laïcisation, amorcé depuis plusieurs décennies déjà et que la nouvelle politique vise à compléter. Ici comme ailleurs, ce processus ne se fait pas sans heurts entre les défenseurs de la laïcité et les croyants plus attachés aux symboles et aux pratiques religieux. Objectivement parlant, la déconfessionnalisation de l'enseignement public n'a rien à voir avec les accommodements religieux et très peu à voir avec l'immigration» (Yolande Geadah, Accommodements raisonnables, pp. 56-57). En d'autres termes, la laïcisation, commencée avec la Révolution tranquille, se parachèvera avec l'introduction du cours d'éthique et de culture religieuse non-confessionnelle.
Néanmoins, il importe de se montrer vigilant afin de protéger les acquis de nos valeurs communes. En effet, la montée des courants de droite s'illustre, entre autres, par une valorisation du conservatisme socio-religieux et un économisme débridé qui affaiblissent l'ensemble du tissu socio-écologique. Cette tangente engendre une résurgence du sexisme et une croissance des inégalités qui menacent effectivement le respect des droits de la personne. [Geneviève Nootens->7715], politologue, résume à merveille la problématique de notre époque: «Au cours de la dernière année, la question des rapports interculturels a occupé beaucoup de place, et donné l'impression que le Québec se fragmentait sous le coup de l'immigration et de ce que certains voient (à tort) comme du laxisme ou de l'à-plat-ventrisme des institutions publiques. En fait, cette question ne fait que détourner l'attention des enjeux les plus importants, qui concernent la place de l'économie, son rapport avec le social et le politique, et la manière dont on doit combiner l'efficacité économique, la justice sociale et la liberté politique» (Le Devoir, 16 juillet 2007).
Patrice Perreault
Au nom du comité de pastorale sociale Granby et région
Granby


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