Amende pour la papier commercial

Coventree réclame l'indulgence

L'affaire Coventree


François Desjardins - Responsable de l'émission de la moitié du papier commercial non bancaire qui circulait au Canada lors de son effondrement en 2007, la société Coventree a récemment fait valoir à la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario (CVMO) qu'il faudrait faire preuve de «compassion» envers elle.
Chapitre sombre de la finance canadienne, la crise du papier commercial (PCAA) en 2007 a semé la panique sur les marchés après que certains investisseurs eurent cru que ce créneau était trop exposé au secteur hypothécaire américain. Du jour au lendemain, la demande pour le PCAA — estimé à 35 milliards de dollars — a été réduite à néant. Ses 2000 détenteurs n'arrivaient plus à s'en défaire.
Au mois de septembre, la CVMO a déterminé que, dans les mois précédant le gel du papier commercial en août 2007, la société n'a pas suffisamment informé le public investisseur et que ses dirigeants ont autorisé, permis ou laissé faire cette situation. Deux mois plus tard, elle a imposé une amende de 1 million à Coventree et une pénalité de 500 000 $ à chacun de ses deux fondateurs, Geoffrey Cornish et Dean Tai.
Coventree, qui est en voie de liquidation, aurait préféré 200 000 $, peut-on lire dans le document dont se sert la CVMO pour justifier ses amendes. Ce document est daté du 23 décembre. «Coventree a soumis que, s'il y a un cas où la CVMO devrait faire preuve de compassion et de réserve dans l'établissement des sanctions, c'est celui-ci», ont écrit les commissaires.
En plus des 200 000 $ que suggérait Coventree, la société «a soumis qu'un blâme permettrait de punir sévèrement les gestes du passé et de transmettre au public l'importance d'une divulgation précise, complète et au bon moment». Aussi, Coventree estimait que cette façon de faire aurait permis de reconnaître que la compagnie n'a pas intentionnellement enfreint la loi et n'a menti à personne.
Appropriée
La CVMO a rétorqué que l'amende de 1 million sur laquelle elle s'est finalement arrêtée est «appropriée», mais qu'elle ne se trouve pas au sommet de la fourchette qu'elle aurait pu imposer. Quant aux deux dirigeants, la commission a rappelé qu'ils étaient en position d'autorité au sein de l'entreprise et qu'ils étaient ultimement responsables des faits et gestes.
Le papier commercial émis par des entités non bancaires — comme Coventree — contenait des actifs générant un certain revenu. Par exemple: des cartes de crédit, des locations de voiture, des prêts hypothécaires, etc.
En gros, ses rendements étaient faibles, mais légèrement supérieurs à ceux des bons du Trésor. Le même principe s'applique au papier commercial émis par des banques et dont le total s'élève à plus de 80 milliards. Ce dernier, toutefois, n'a jamais eu de problèmes.
Lorsque la demande pour le PCAA a chuté, les détenteurs, dont la Caisse de dépôt et la Banque Nationale, se sont concertés pour le réorganiser en titres à échéance de plusieurs années.
Sur le marché secondaire, ces titres s'échangeaient cet été à 80 ¢ sur le dollar, selon un consultant torontois. Souvent, les acheteurs sont des hedge funds américains.
En 2009, plusieurs établissements, dont la Banque Nationale, la CIBC et Canaccord, ont convenu de verser 140 millions aux autorités réglementaires qui enquêtaient sur eux. Deux joueurs ont refusé de prendre part à l'entente de gré à gré: Deutsche Bank et Coventree.
La Caisse de dépôt, qui a déjà été un actionnaire de Coventree, en avait pour 13 milliards dans ses coffres, ce qui en faisait le plus important joueur sur le marché canadien.
L'affaire continue de faire des vagues. Entre autres, les autorités songent à resserrer les règles qui identifient les acteurs autorisés à investir dans le créneau très sophistiqué des produits dits «titrisés».
Aujourd'hui, Coventree est en voie de liquidation. Il y a deux semaines, elle a annoncé la démission de Brendan Calder du conseil d'administration.
«Coventree étant sur la voie de la liquidation, mon travail est terminé et il est temps de passer à autre chose», a dit M. Calder, professeur de gestion stratégique à la Rotman School of Management de l'Université de Toronto. «Les membres du conseil qui restent sont plus que capables de terminer cet exercice de liquidation. J'ai pris d'autres responsabilités qui demandent plus de temps de ma part.»
Dans ses états financiers annuels, publiés le 15 décembre dernier, Coventree a déclaré que les procédures intentées contre elle par la CVMO lui ont coûté près de 14 millions en frais juridiques au cours des deux dernières années.
Au 30 septembre 2011, il restait dans ses coffres des liquidités d'environ 71 millions.


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