Critique du rapport Castonguay-Laberge

Réforme des retraites - Sécurité de la vieillesse

Critique du rapport Castonguay-Laberge
par Jacques Fournier
organisateur communautaire retraité
Version enrichie d’une courte lettre parue dans Le Devoir
Texte paru sur les sites de l’aut’journal et de Presse-toi à gauche
Un rapport vient de paraître sous la plume de l’ancien ministre Claude Castonguay et de Mathieu Laberge, un économiste rattaché au « réservoir d’idées » de droite, l’Institut économique de Montréal. Le rapport préconise que, pour éviter la catastrophe du vieillissement, les aînés restent plus longtemps sur le marché du travail. Le rapport est publié par le CIRANO, le Centre interuniversitaire de recherche en analyse des organisations.
Je ne partage pas cette analyse. Le Rapport Castonguay-Laberge s’inspire, selon moi, de lieux communs, il manque d’originalité et d’inspiration et il voit les choses à court terme.
La vraie catastrophe annoncée, ce n’est pas la diminution du produit intérieur brut (PIB) reliée au fait que moins de personnes travailleront. La vraie catastrophe annoncée, c’est le gaspillage des ressources naturelles de la terre (pétrole, forêt, eau, etc.) et leur épuisement rapide. Pour contrer cette vraie catastrophe, il faut aller progressivement vers une décroissance conviviale (www.decroissance.qc.ca), la fin de l’hyper-consommation et la simplicité volontaire (www.simplicitevolontaire.info). Dans les pays occidentaux riches, il faut accepter de vivre en consommant moins (et le contraire pour les pays du Sud).
Bon, je passe sur les nuances évidentes : de nombreuses personnes sont contraintes de travailler à un âge avancé parce qu’elles ont occupé toute leur vie des emplois peu payants et qu’elles ont été incapables de mettre des sous de côté pour leur retraite. Ce n’est pas de ces personnes dont je parle. Je traite des personnes âgées qui se sentent obligées de travailler parce qu’elles n’ont pas vraiment atteint la sérénité qui leur permettrait d’accepter de vivre avec des revenus moindres, mais raisonnables. Victimes du harcèlement publicitaire, ces personnes voient encore leur comportement en bonne partie dicté par le dieu argent : il faut beaucoup consommer pour être heureux et faire comme les voisins. Ce sont ces personnes que les Castonguay-Laberge cherchent à culpabiliser de prendre leur retraite tôt et veulent conscrire dans l’atteinte d’un PIB toujours plus dodu.
Je plaide pour que les gens prennent leur retraite pendant qu’ils sont encore en santé et qu’ils s’activement autrement, en faisant du bénévolat, de la militance ou de l’engagement citoyen. C’est ce dont notre société a besoin et c’est moins stressant que de travailler pour un patron toujours désireux d’augmenter la productivité par tous les moyens.
Au Québec, 28,5 % des citoyens de 45 à 64 ans connaissent un stress intense, comparativement à seulement 9,6 % des 65 ans et plus (Statistique Canada, tableau 105-0501, Québec, 2008). Pourquoi travailler et se stresser alors qu’on peut faire du bénévolat à son rythme pour le plus grand bien de la société?
Un argument du Rapport Castonguay-Laberge m’irrite particulièrement : selon eux, il faut faire comme l’Ontario ! En 2008, 51 % des Ontariens de 60-64 ans travaillaient, comparativement à seulement 40 % des Québécois du même âge. Pourquoi n’incitent-ils pas plutôt les Ontariens à faire comme les Québécois ? Qui est à l’avant-garde de la recherche d’un vrai mieux-être collectif ?
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Jacques Fournier98 articles

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Organisateur communautaire dans le réseau de la santé et des services sociaux





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2 commentaires

  • Richard Lefrançois Répondre

    17 mars 2010

    Je partage entièrement votre point de vue à l'effet que les aînés s'avèrent davantage utiles à titre de mentor, de bénévoles, d'aidant naturel et d'agent de transmission du savoir et des valeurs. Mettre les aînés au travail créerait un immense vide en regard de ces rôles, ce qui inévitablement occasionnera des dépenses imprévues pour l'État. De surcroît, le rapport Castonguay-Laberge est déficitaire en informations, étant très peu documenté. On retrouve des écrits beaucoup plus appuyés et étoffés sur la question, notamment des avis du Conseil des aînés et des articles dans la communauté scientifique. Dernier point. Dans les années à venir, la somme des heures ouvrées va continuer à chuter, de sorte que nous aurons moins besoin de main-d'oeuvre dans plusieurs secteurs d'activité. Il est donc plus important de mettre au travail les jeunes, de lutter contre le décrochage scolaire, le chômage et les emplois précaires.
    Enfin, je me rends plus en plus compte que des think tanks s'immiscent dans le champ de la gérontologie, rejetant d'un revers de main la somme des connaissances scientifiques accumulées. Voir mon texte intitulé Quel avenir pour les aînés : repos ou boulot?
    Richard Lefrançois

  • Archives de Vigile Répondre

    26 janvier 2010

    M. Castonguay a perdu beaucoup de sa crédibilité libérale :
    « Claude Castonguay est souvent qualifié de « père de l'assurance maladie ». Cette affirmation a été contestée en 2006 par Lucie Dagenais, qui avait siégé à la fin des années 1960 sur le conseil de la Régie de l'assurance maladie du Québec (RAMQ). Dagenais affirme que le Parti libéral du Québec n'a fait que reprendre en 1970 le projet de loi 8, soumis en 1969 par le gouvernement de l'Union nationale et défait par les libéraux, alors parti d'opposition.
    En février 2008, il a publié un nouveau rapport qui recommande la collaboration du secteur public et du secteur privé dans le domaine de la santé pour réduire la pression financière sur le modèle de gestion de santé publique.
    Le comité Castonguay reconnaissait dans la préface de son rapport qu'il avait reçu un mandat de la ministre des Finances, Monique Jérôme-Forget, de rendre le secteur de la santé conforme aux nouvelles règles de libéralisation des échanges commerciaux.
    Les conclusions du rapport ont suscité un tollé de la part d'une majorité de la population québécoise et des associations de défense du droit aux soins de santé, y voyant une apologie d'une privatisation "à l'américaine" du secteur de la santé.
    Les principaux points du rapport ont également été rejetés par le ministre québécois de la santé, Philippe Couillard.»
    http://fr.wikipedia.org/wiki/Claude_Castonguay