Droits ou privilèges linguistiques?

Tribune libre 2010



Au Canada et au Québec, on affirme trop souvent que les francophones et les anglophones ont des droits linguistiques historiques. C'est faux! Les droits linguistiques et encore moins historiques n'existent pas dans la Charte des droits de l'homme. Il s'agit de privilèges mutuellement consentis entre francophones, anglophones et même Amérindiens. Autrement, les quelque centaines d'ethnies au Canada et au Québec pourraient réclamer les mêmes droits, exiger des écoles, des médias, etc. dans leur langue respective, si c'était un droit fondamental.

Aucune minorité ne peut imposer sa langue à une majorité. Un Québécois ne peut exiger qu'on le serve en français au Japon ou en Chine. Mais il peut l'exiger au Québec et dans les provinces canadiennes, dans certaines circonstances seulement, comme les services fédéraux, mais non en vertu d'un droit, seulement au nom d'un privilège. Donc, M. Charest a tort de prétendre que d'imposer la loi nonobstant dans le cas de la loi 103 serait suspendre des droits historiques et linguistiques détenus par les Anglo-Québécois. D'ailleurs si les écoles passerelles sont inacceptables après un an de fréquentation, comment peuvent-elles le devenir après trois ans? Quelle belle logique!

Et puis voulez-vous bien me dire ce que fait les grosses pattes de la Cour suprême du Canada dans une juridiction provinciale comme celle de la langue? Est-ce que la Cour suprême est intervenue contre le School Act du Nouveau-Brunswick, contre la loi Tupper en Nouvelle-Écosse, contre le règlement 17 en Ontario et contre les six lois anti-françaises des trois provinces de l'Ouest. Toutes des lois anti-françaises! Non, elle a commencé à intervenir après l'adoption de la loi 101 parce que cette loi s'en prenait prétendument à la minorité anglophone du Québec. Or, c'est faux! La loi 101 respecte tous les privilèges, et non les droits, des Anglo-Québécois. Cette loi n'a fait que mettre fin à l'assimilation des émigrants par la minorité anglophone.

Normand Rousseau

Gatineau, Québec



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1 commentaire

  • Archives de Vigile Répondre

    3 juin 2010

    Monsieur Rousseau
    Excellent article qui appuie ce que je pense depuis longtemps. Le Canada, c'est la loi du plus fort envers ses minorités et je pense que le Québec commence à en prendre conscience de plus en plus et ne comptez pas sur Harper pour améliorer la situation. Il y a une couple d'années, il reconnaissait le Québec comme nation à l'intérieur du Canada et on apprend, ces derniers jours, qu'il est prêt à couper dans toutes les subventions à la culture. Quel paradoxe! Mais nous sommes tellement habitués comme Québécois à vivre ces ambivalences et cette confusion identitaire dans ce système fédéral que nous sommes devenus incapables de penser par nous-mêmes pour sortir de ce dédoublement de personnalité. Que d'énergie collective perdue à tourner en rond comme nous le faisons actuellement.
    André Gignac le 3 juin 2010