La recommandation de vos fonctionnaires de ne pas s'occuper des fautes de français dans les copies de nos cégépiens, que vous avez heureusement décidé de jeter à la poubelle, est ni plus ni moins un acte de sabotage. Je vous félicite donc de votre décision claire et rapide. Aussi, je vous souhaite beaucoup de courage pour obtenir que ladite recommandation crève vraiment: en effet, c'est bien connu, les fonctionnaires sont très forts.
Décider qu'on peut décerner un diplôme à un collégien incapable d'écrire dans sa langue maternelle, c'est saboter chez nous l'avenir de la langue française, l'avenir de la culture, l'avenir de nos collégiens et, partant, l'avenir de notre société. Ces fonctionnaires de votre ministère affirment sans gêne qu'il importe peu, pour réussir sa vie ou entrer à l'université, de savoir formuler sa pensée et la communiquer en des mots et des phrases selon des conventions établies. Aberration éhontée! Scandaleuse entreprise de démolition!
Ils ne sont pas les premiers à prêcher une telle décadence, un tel accommodement déraisonnable à la démission devant l'effort intellectuel. Il y a plus de 35 ans, certains de leurs prédécesseurs ou maîtres à penser étaient venus dans nos régions dire à nos enseignants du secondaire qu'il ne fallait pas s'inquiéter de la faiblesse du français écrit de leurs élèves puisque c'était l'expression orale qui importait. Par la suite, j'ai vu des copies d'élèves de cégep criblées de quatre à cinq fautes par ligne, à pleine page. À peu près une faute par mot, parfois deux! Devais-je alors consacrer une partie du cours à leur enseigner l'accord des adjectifs ou la conjugaison des verbes pendant que la classe aurait attendu de moi le cours de littérature annoncé? M'étant un jour indigné auprès de mon directeur général qu'on accepte au cégep des élèves aussi mal préparés, il me répondit, sympathisant: «Que veux-tu? Ces élèves-là sont titulaires d'un certificat d'études secondaires signé par le ministre de l'Éducation.»
En plus de vous féliciter et de vous souhaiter beaucoup de courage, Mme la ministre, comme il s'agit d'un acte de sabotage, je souhaite ardemment que vous preniez les dispositions disciplinaires qui s'imposent dans les circonstances. Les auteurs de tels méfaits doivent être neutralisés. Leurs oeuvres aussi.
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Jules Bélanger, Ex-professeur de français au Cégep de la Gaspésie et des Îles.
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