Les discours politiques équivoques, c'est bien connu, ont souvent la particularité de permettre à tout un chacun d'y entendre ce qu'il veut bien.
Dans ce genre de contexte, pour bien comprendre les tenants et aboutissants réels du propos, un travail s'impose, de mise en lumière des faits, et de débroussaillage des perceptions et des impressions pour permettre à une vision objective de prévaloir.
Or, au sujet de la définition actuelle du souverainisme péquiste, concept autour duquel, justement, des interprétations parfois divergentes s'échafaudent, il convient de revenir aux faits. Et ces faits ne disent qu'une chose, claire et nette : Il s'agit d'une proposition autonomiste-nationaliste provinciale, qui évoque la " pleine souveraineté " sans toutefois s'engager à la réaliser. Ceci n'est pas un jugement de valeur, ce sont les faits.
À partir de là, l'observateur peut bien évidemment spéculer ou extrapoler, se perdre en conjectures, d'autant plus qu'on laisse ici une porte entrouverte, mais toujours, les faits demeurent, incontestables.
On dira que j'imite certains journalistes sportifs, et même certains commentateurs politiques, en analysant un événement avant même qu'il ne se soit produit.
En effet, le PQ doit adopter une proposition de programme la semaine prochaine; Pourquoi donc se prononcer d'avance sur la démarche souverainiste qu'elle contiendra ?
Je m'adonne à cet exercice pour montrer qu'au delà de l'émotion du moment et du bruit ambiant qui entoure, depuis déja quelques années, chaque épisode où le PQ rend officiellement compte de l'évolution de ses positions , le fond demeure et la nature du souverainisme de ce parti ne change pas d'un iota.
Lisez bien ce qui suit; Il s'agit d'une prédiction, et l'humble auteur de ces lignes n'en fait pas souvent ! Puis, revenez à ce texte, quelques jours après le 19 juin. Vous verrez, il y a fort à parier que je ne me serai pas beaucoup trompé. ( À moins, bien sûr, d'un impair médiatique absolument imprévisible, comme une sortie fracassante d'on ne sait qui, ou quelque autre bouleversement du genre )
Alors voici : La proposition souverainiste du 19 juin reprendra essentiellement, Mme Marois le dit déja elle-même, l'orientation des plans précédents. On peut s'attendre à une nouvelle moûture plus étoffée, à plus de détail ou d'engagement sur des éléments déja connus de la gouvernance souverainiste, ce qui n'exclut pas la possibilité qu'on explore d'autres avenues d'affirmation nationale, différentes de celles déja formellement retenues par le PQ. S'il y a surprise ou accès d'audace, ce sera de ce côté, et non pas vers quelque engagement indépendantiste.
Quoi qu'il en soit, le souverainisme pourrait faire les manchettes, et l'effervescence du rassemblement partisan aidant, certains sentiront un élan, un discours prometteur, et tout cela ne sera que plus excitant du fait de la mauvaise posture actuelle du gouvernement libéral.
Bref, sans deviner la teneur exacte des trouvailles souverainistes potentielles, on peut prévoir qu'il y aura probablement assez de matière pour qu'on puisse discuter et s'émouvoir pendant quelques heures, deux ou trois jours peut-être, avant que tout cela, comme d'habitude, ne retombe dans l'oubli, et que la réalité, jamais même inquiétée, ne reprenne tout le terrain qu'elle n'aura jamais quitté : Le PQ ne s'engage pas à poser le seul geste qu'il considère lui-même légitime, à ce jour, pour réaliser l'indépendance, c'est-à-dire faire un référendum. Encore ici, je ne juge pas. Ce n'est qu'un fait.
Autrement dit, quelles que soient la teneur et l'ampleur de la proposition et des réactions qu'elle suscitera, l'indépendance ne sera pas au menu, sauf ça et là dans le discours, comme une sorte d'intrus, ou un convive mal-à-l'aise à qui l'on aurait oublié de lui réserver sa place à table.
Nic Payne
Montréal
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13 commentaires
Archives de Vigile Répondre
11 juin 2010Merci Monsieur Bélanger de soulever cette question bien légitime sur le mystère péquiste. Une organisation qui ne livre pas combat est une organisation qui se corrompt...
GV
Gilles Bousquet Répondre
11 juin 2010M. Stéphane Bélanger a une fixation négative sur M. Claude Morin en particulier et sur le PQ, en général même s’il a l’air d’un vrai séparatiste.
J’aimerais dire à M. Bélanger que, si ce n’avait été de la stratégie de l’étapisme de M. Morin, le PQ n’aurait pas pris le pouvoir en 1976.
J’invite M. Bélanger à méditer un peu sur cette réalité. Avant cette idée, le PQ ne faisait élire qu’une petite poignée de députés parce que les Québécois avaient peur de ça, la souveraineté. Le PQ disait : Élisez un bon gouvernement maintenant sans danger de souveraineté et nous tiendrons un référendum sur ça, pendant notre mandat.
Si le PQ avait dit, comme aux élections précédentes : Si vous nous élisez, nous allons séparer le Québec du Canada, il aurait perdu. Fait que, nous devons l’élection du PQ en 1976, à M. Claude Morin en premier et à tous les forts candidats du PQ dont l’importante caution économique, M. Parizeau avec M. Lévesque comme vedette toutes catégories.
Archives de Vigile Répondre
10 juin 2010Note pour M.Gignac : L'ancien député péquiste dont vous parlez est probablement David Payne.
Archives de Vigile Répondre
10 juin 2010Bon matin Monsieur Payne,
Comme vous résumez bien la situation. Ce qui me fait pleurer, c'est que Monsieur Parizeau a prouvé que c'est en allant directement au but que l'indépendance peut se faire. Car n'oublions pas, il a gagné son pari, en pratique, les résultats officiels ayant été les résultats de la malhonnêteté fédéral et la frilolisté de certains leaders péquistes de l'époque.
Ce qui me chagrine aussi beaucoup, c'est que les leaders péquistes d'aujourd'hui semblent accepter cette injustice, sans vouloir taper sur ce clou soit que le gouvernement fédéral ait mal agi. Il y aurai pu je crois avoir une grosse cabale mondiale sur ce, un article détaillé dans le Monde Diplomatique ... mais rien, le PQ s'est éteint. Il y a un mystère la dessous, ça me fait douter qu'un autre Claude Morin existe dans les hauts rangs péquistes. Voyant maintenant Madame Marois agir comme tout bon libéral, soit avec une morale plus qu'élastique et un dédain des référendums ... je n'ose croire qu'elle est la Claude Morin des années 2000 ...
Bien à vous,
Stéphane Bélanger
Lévis
Archives de Vigile Répondre
10 juin 2010J'apprécie les commentaires non équivoques de messieurs Noël et Gignac. Ils me consolent de ceux qui apparaissent présentement en tribune libre, de péquistes braillards, qui se plaignent de leur parti, et qui, au prochain scrutin, se rallieront au PQ. J'ai même posé, à l'un d'eux, deux questions que j'ai qualifiées d'"empoisonnées", pour ce type de braillard : pour qui avez-vous voté aux dernières élections ? et... pour qui voterez-vous aux prochaines élections ? ...Il ne m'a jamais répondu.
Pour moi, il n'existe aucun parti indépendantiste de gauche d'envergure au Québec. Tout est à faire. Jusqu'à ce que ce parti soit créé, je reste chez moi.
Michel
Archives de Vigile Répondre
9 juin 2010Je partage l'opinion de Jacques Noël. J'ai déjà posé cette question :"Pourquoi Parizeau n'a t-il pas levé le poing ? Oui, Chrétien aurait eu le chien, le cran,l'entêtement de l'ambitieux, il aurait été rageur. Parizeau n'a pas "éclaté". Imaginez avec sa carrure (au propre comme au figuré) s'il avait laissé éclaté sa colère et son indignation ! Jamais plus nous aurions plié les genoux ! Chaque Québécois et chaque Québécoise aurait compris le pourquoi de cette lutte. J'y crois dur comme fer. À côté de Parizeau, Bouchard ne vaut pas tripette !
Il fallait à Monsieur Parizeau, la fougue du guerrier. Quel dommage!
Archives de Vigile Répondre
9 juin 2010Les Québécois ont fait leur effort en votant à 60% pour le OUI. C'est le PQ qui leur a fait dans les mains
Le lendemain, Parizeau, au lieu de contester le résultat comme Chrétien aurait fait s'il avait perdu, a démissionné (maudit Stéphan Bureau!). Bouchard a pris la relève et s'est lancé dans l'aventure du déficit zéro! Un exploit qu'aucun autre gouvernement indépendant n'avait osé faire!
Les vrais souverainistes ont quitté la barque, les carriéristes sont restés.
15 ans plus, ca va nulle part. Pauline vient de nous annoncer la renaissance de l'Union nationale! Notre butin, nous l'aurons
Belle réussite le PQ. Sti-de-PQ
Gilles Bousquet Répondre
9 juin 2010Vous avez raison, M. Haché, d’écrire : «Le P.Q. est condamné à l’indépendantisme. S’il n’y consent pas, tôt ou tard, il explosera. C’est la logique même du fédéralisme pratiqué par l’institution fédérale qui l’y mènera. »
Sauf qu’il ne peut pas aller plus vite qu'une majorité solide de souverainistes qui, selon les sondages, n’est pas encore là. Si ce n’est pas le Canada qui explose, ça va être le PQ qui le fera.
Archives de Vigile Répondre
9 juin 2010Tant et aussi longtemps que le référendum de 1980 ne fut pas tenu, même les revendications traditionnelles du Québec, des revendications strictement fédéralistes, ces revendications pouvaient aller de l’avant au profit de l’institution provinciale, parce qu’une zone d’incertitude était maintenue au dessus des relations fédérales-provinciales.
Le score du référendum (60-40) a chassé l’incertitude qui planait et tout révélé. Cela a conforté l’institution fédérale. Et cette donne politique n’a plus jamais changé. Même Charest subit cette donne, même s’il y consent volontiers à genoux.
Le référendum de 95 a presqu’été gagné, volé même, si vous voulez, mais depuis ce dernier référendum, la vieille donne, antérieure à ce dernier référendum, cette donne issue de 1980, cette vieille donne n’a pas changé.
L’institution provinciale actuelle, le Québec, n’est plus devant un référendum de 95 récemment volé. Il est encore dans la logique de la vieille donne issue de 80. S’est ajouté de nouvelles bornes, constitutionnelles et politiques, bornes ajoutées par les vainqueurs de 80. Ces bornes sont le rapatriement de 1982 et la loi sur la clarté 2000.
Ce sont ces bornes qui conditionneraient l’action d’un futur « gouvernement souverainiste », mais préalablement aussi d’un parti souverainiste dans l’opposition. Le référendum de 95 n’est pas une borne, ni constitutionnelle ni politique. C’est un mauvais souvenir politique, sans portée légale.
C’est la logique fédérale elle-même qui place le Québec dans la situation de devoir ou accepter de prendre « sa »place dans le Canada ou se séparer complètement, certaine, cette logique fédéraliste, que le Québec n’a pas véritablement le choix.
Le P.Q. a le choix, lui. Et bien des options peuvent apparaître possiblement. Mais il n’a plus le choix de lier le sort de l’indépendance à un calendrier référendaire. Ce choix là n’existe plus. Ou plutôt, s’il se concrétisait, c’est-à-dire un calendrier et une obligation de tenir référendum, nous assisterions à une déroute indépendantiste, parce qu’alors ceux-ci auraient accepté imprudemment de se battre sur le terrain des fédéraux.
Le P.Q. est condamné à l’indépendantisme. S’il n’y consent pas, tôt ou tard, il explosera. C’est la logique même du fédéralisme pratiqué par l’institution fédérale qui l’y mènera.
Archives de Vigile Répondre
9 juin 2010Monsieur Payne
J'ai lu avec beaucoup d'intérêt votre texte et je dois vous dire que plus rien ne me surprend du PQ avec son idée de reprendre l'étapisme. Ce parti est classé dans ma tête et j'aimais plus, il n'aura mon vote. Monsieur Noël a raison sur toute la ligne dans son commentaire! Monsieur Payne, vous qui avez délà été député péquiste, pouvez-me dire, svp, si la direction du PQ a déjà demandé à la Cour internationale de la Haye de statuer du côté juridique pour le Québec suite au rapatriement unilatéral de la constitution canadienne sans l'accord du Québec? Il y a là quelque chose d'équivoque qui doit être clarifié au plus sacrant parce que le Québec est en train d'effectuer une descente incroyable aux enfers. Nous pataugeons actuellement dans la merde et nous tournons en rond comme c'est pas possible. Il m'a fait plaisir.
André Gignac le 9 juin 2010
Archives de Vigile Répondre
9 juin 2010"Le PQ ne s’engage pas à poser le seul geste qu’il considère lui-même légitime, à ce jour, pour réaliser l’indépendance, c’est-à-dire faire un référendum. Encore ici, je ne juge pas. Ce n’est qu’un fait."
L'erreur largement partagée, est de croire qu'il suffit d'obtenir une majorité démocratique lors d'un Referendum pour obtenir l'indépendance. Il est temps de mettre fin à cette littérature romantique. La seule condition qui garantie ce changement de statut est un rapport de force favorable entre les deux États (Canadien et Québécois). POINT. La souveraineté sera réaliser de facto avant qu'elle ne soit formaliser de jurer par Réferendum.
Donc le réalisme politique nous impose de bâtir ces rapports de forces. Ce qui veut dire prendre le pouvoir et consolider l'État du Québec avec une deuxième Révolution tranquille; la première ayant créer une dynamique qui a donné naissance à un large mouvement souverainiste, seul l'État agit avec envergure.
La deuxième devra mener à la rupture. À cet égard tout dépendra comment ce choix stratégique se déclinera de manière tactique.
Bref il faut ramener le projet dans le champs du réel et comprendre que le déterminant de la politique c'est l'État.
JCPomerleau
Gilles Bousquet Répondre
9 juin 2010M. Jacques Noel, ce sont les Québécois qui ont fait dans leurs culottes, pas le PQ parce qu’ils ont eu peur, à tort ou à raison, des conséquences économiques et que nos Anglos ont voté à plus de 90 % contre la souveraineté du Québec. Aucun autre parti souverainiste n’est allé si loin. Ils se forment et se plantent aussitôt.
Archives de Vigile Répondre
9 juin 201042 ans après la fondation du Parti, on en est rendu là!
Le PQ aura été la plus grande déception de ma vie politique au Québec. Comment ont-ils pu nous faire dans les mains à ce point?
http://www.vigile.net/Pour-en-finir-avec-le-Levesquisme
L'avancement de la souveraineté est à repenser à partir de la base. On sait maintenant que ni le Bloc, ni le PQ-à-marde, ne feront avancer la cause. On a 42 ans d'histoire pour le prouver.