Français: Québec modifiera le règlement

«Je n'ai pas fait tout cela pour que cela soit juste des voeux», assure la ministre Courchesne

Enseignement du français

La ministre de l'Éducation, Michelle Courchesne, entend modifier le régime pédagogique pour s'assurer que les écoles prévoient bel et bien une période de lecture par jour et que les enfants fassent au moins une production écrite par semaine.
«La direction et la ligne à suivre sont très claires. [...] On modifie le régime pédagogique, c'est évident. Je n'ai pas fait tout cela pour que cela soit juste des voeux», a précisé la ministre Courchesne en entrevue au Devoir.
Accueilli favorablement dans le milieu de l'éducation, le plan d'action en français déposé mercredi comprend des mesures précises destinées à améliorer l'apprentissage du français, mesures qui s'aventurent à définir les moyens utilisés par les enseignants en classe. Hier, les syndicats d'enseignants ont accueilli certaines mesures comme la période de lecture quotidienne et la production écrite hebdomadaire en les interprétant comme des souhaits de la ministre.
Or la ministre souligne que ces mesures ne sont pas là uniquement à titre indicatif: elles seront «prescriptives». «Je n'ai pas encore écrit [la modification au règlement], c'est évident que tout cela devra être évalué sur le plan juridique. On va aller aussi loin qu'on peut aller», a poursuivi Mme Courchesne. La rédaction d'un tel règlement promet d'être délicate puisque la Loi sur l'instruction publique garantit l'autonomie professionnelle des enseignants.
Cela étant, la ministre ne veut pas seulement manier le bâton. Elle mise d'abord et avant tout sur la mobilisation du milieu scolaire et, au premier rang, sur la participation des enseignants. «Je leur demande de participer activement à nos travaux pour s'assurer que les programmes révisés seront enseignés. Je sais que les enseignants de français savent que pour écrire, il faut écrire», a plaidé Mme Courchesne.
Les écoles devront aussi rendre compte de l'application des diverses mesures. «On va travailler en très étroite collaboration avec les établissements, pas juste [avec] les commissions scolaires. Il y a une reddition de comptes qualitative, pas juste quantitative. La marge de manoeuvre est très mince», a indiqué Mme Courchesne.
Un comité de suivi, où siégeront des enseignants, des directeurs et des représentants des facultés de sciences de l'éducation, sera également créé au cours des prochaines semaines pour veiller à l'application de cet ambitieux plan d'action et à la révision des programmes de français.
Des bémols
S'ils voient le plan d'action plutôt d'un bon oeil en général, les syndicats ont néanmoins émis des réserves devant ces demandes très précises de la ministre à propos de la façon d'enseigner. «Oui, il y a une forme d'ingérence, mais on souscrit à l'objectif», a affirmé la présidente de la Fédération des syndicats de l'enseignement (FSE-CSQ), Johanne Fortier.
Mme Fortier a cependant promis de «veiller au grain» pour s'assurer que certaines mesures ne soient pas imposées «de façon bête et méchante». «Si c'est imposé sans ajustements, nous avons de grosses réserves. Cela ne peut pas marcher», a soutenu Mme Fortier, qui déconseille au ministère de se lancer dans une «chasse aux sorcières».
Son de cloche similaire du côté de la Fédération autonome de l'enseignement (FAE): «Ce qui nous chatouille, c'est qu'on prescrive la fréquence ou la dose. Cela relève de l'autonomie professionnelle de l'enseignant», a fait valoir le responsable des communications du syndicat, Yves Parenteau. Il a fait observer que la période de lecture peut être difficile à prévoir dans le cadre de l'horaire éclaté du secondaire.
Le président de la Fédération québécoise des directions d'établissements (FQDE), Serge Morin, s'interroge lui aussi sur la place réservée à l'autonomie des enseignants. «On traite tout le monde pareil, cela ne laisse pas de place pour exploiter le professionnalisme dont les enseignants sont capables.» Il doute par ailleurs que la réalisation d'une production écrite par semaine soit possible au niveau secondaire, où un même enseignant voit 120 élèves en une semaine. «Les enseignants vont passer leur temps à corriger et ne seront plus disponibles pour autre chose», a fait remarquer M. Morin.
Consciente de cette difficulté, la ministre Courchesne a indiqué qu'elle envisageait de dégager des sommes pour payer des correcteurs afin de prêter main-forte aux enseignants du secondaire.


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