Le premier ministre Stephen Harper a déclaré, vendredi, qu'il n'y avait absolument aucune raison valable pour que l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) quitte Montréal.
«Il y a longtemps que l'OACI est basée à Montréal et, d'après ce que j'en sais, Montréal, le Québec et le Canada ont été de très bons hôtes», a affirmé M. Harper lors d'une conférence de presse à Québec.
«Je n'ai jamais entendu de plaintes sérieuses par rapport à la manière dont nous avions traité l'organisation. Montréal est une ville sophistiquée et un centre international du secteur aérospatial. Il n'y a aucune raison raisonnable de déménager l'OACI.»
Stephen Harper a tenu ces propos peu après que le ministre des Affaires étrangères, John Baird, le ministre québécois des Relations internationales, Jean-François Lisée, et le maire de Montréal, Michael Applebaum, eurent annoncé lors d'une conférence de presse à Montréal que les trois ordres gouvernementaux feraient front commun pour empêcher l'OACI de déménager au Qatar.
Pression du Qatar
Récemment, le gouvernement qatarien a manifesté son intention d'attirer l'organisme onusien en faisant valoir divers avantages, dont celui du climat plus agréable de ce pays du golfe Persique.
M. Lisée a précisé que depuis le dévoilement du projet du Qatar, des représentants de Montréal, Québec et Ottawa avaient cherché à multiplier leurs contacts internationaux pour garder dans la métropole québécoise le siège social de l'OACI.
Il a insisté sur le caractère distinct de Montréal, présentée comme la cité de l'aviation civile. Il a souligné sa position avantageuse parmi les trois villes mondiales au sommet de l'aéronautique conjuguée avec la présence de grands donneurs d'ordre, dont Bombardier, CAE et Pratt&Whitney. Selon lui, le départ de l'OACI de Montréal n'a aucun sens.
«Imaginez si le navire amiral devait quitter cette flotte pour aller dans un autre bout de la planète, ce serait une mauvaise décision, ce serait séparer un élément essentiel de l'ensemble de ces éléments secondaires», a illustré le ministre.
Ville d'aviation
Jean-François Lisée a rappelé que Montréal comptait parmi les trois villes mondiales de l'aéronautique avec 40 000 salariés et trois imposants donneurs d'ordres, soit Bombardier, Pratt&Whitney et CAE.
«Montréal est la ville internationale de l'aviation civile et ça n'a pas de sens de penser que l'OACI devra quitter cette ville naturelle pour l'aérospatiale», a-t-il tranché.
De son côté, M. Baird a révélé avoir commencé à négocier avec l'OACI il y a près de deux ans afin de conclure un accord avec le conseil. Il a soutenu qu'un projet d'accord avait été conclu et s'est dit prêt à le signer dès maintenant pour officialiser cette entente et confirmer la présence de l'OACI en sol québécois pour les années à venir.
«Je vous assure que le gouvernement fédéral est conscient de l'importance de cet enjeu, a indiqué le ministre. Nous sommes prêts à travailler avec le gouvernement du Québec, avec la Ville de Montréal de même qu'avec les compagnies aériennes et aérospatiales pour nous assurer que l'OACI restera à Montréal.»
M. Applebaum a pour sa part souligné que l'OACI était à Montréal depuis plus de 60 ans et qu'elle y avait ses racines. «Ici, l'OACI est chez elle», a-t-il conclu.
Appuis syndicaux
Les efforts du Canada pour conserver le siège social de l'OACI bénéficient aussi de l'appui de syndicats internationaux, qui soutiennent que déménager l'organisme au Qatar irait à l'encontre de son mandat.
«Comment une organisation qui doit défendre les droits et la sécurité des travailleurs et des passagers pourrait déménager dans un État qui répond aux demande de ses citoyens pour davantage de démocratie avec des bâtons et du plomb?», s'est interrogé David Cockroft, le secrétaire général de la Fédération internationale des ouvriers du transport, dans un communiqué.
Des sources anonymes ont confié cette semaine au Globe and Mail que la proximité entre le Canada et Israël fâchait le monde arabe, désormais prêt à s'unir pour ravir à Montréal le siège social de l'OACI.
D'après le gouvernement Harper, il est cependant «ridicule» d'associer les critiques à l'égard de la politique étrangère canadienne et l'incertitude qui entoure l'avenir des quartiers généraux de l'OACI.
Le Qatar a récemment demandé aux Nations unies que l'organisation chargée d'établir des règles internationales pour l'aviation déménage dans sa capitale, Doha. D'autres pays arabes seraient derrière cette candidature et chercheraient à récolter l'appui de plus de nations.
Unique organisme onusien établi en sol canadien, l'OACI s'est installée à Montréal en 1946. Son siège social actuel a été construit dans les années 1990 et a coûté 100 millions.
Perdre l'OACI constituerait un revers politique et économique pour le Canada. La contribution de l'organisme à l'économie montréalaise n'est pas négligeable puisqu'elle emploie 534 personnes et génère chaque année des retombées économiques de 80 millions.
Pour que la proposition du Qatar l'emporte, elle devra être soutenue par au moins 60 % des 191 États membres de l'OACI. Un vote est prévu pour septembre.
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