L'avalé bleu-blanc-rouge

go-habs-go

Le destin québécois

Noël dernier, le père Caca-Cola m’a apporté des beubelles, un beau chandail du Canadian avec mon nom à l’endos : Le Papou. Bleu-blanc-rouge garanti ou argent remis et bien sûr, le CH tatoué sur le coeur. « Nos bras meurtris la-la-l’ère...» Vraiment un beau chandail.
C’est mon gendre qui me l’a acheté et je suppose que c’est pas donné un beau chandail de même. Philou, le plus jeune de mes petits-fils, me l’a présenté comme un trésor national et pendant le souper des Fêtes, je l’ai porté pas sûr. Faut dire que je joue souvent au hockey avec les petits dans ma ruelle en arrière et ils ont tous un chandail bleu-blanc-rouge alors ? Faut vous dire aussi que lorsque le Papou est trop essoufflé, il garde les buts en disant « qu’y a pas une simonak de rondelle ou de balle qui va entrer dans mon filet, z’entendez p’tits morveux! pas une seule... !». Une fois provoqués, ils tentent par tous les moyens de me déjouer et quand ils n’y arrivent pas, ils me sautent dessus et c’est la grande chamaille bleu-blanc-rouge.
Un maudit beau chandail. Mais comme ça fait un bail que j’aime pas le rouge, hier, je l’ai décroché de son cintre et tenté de le teindre en bleu. Ç’a pas marché, Du synthétique bien sûr. Alors je l’ai étendu soigneusement sur la table de cuisine et j’ai tenté de décoller le CH avec un fer à repasser. Rien à faire! Et comme je devenais impatient, sans plus réfléchir, j’ai pris un crayon feutre noir et dessiné un gros X sur le CH. Sauf qu’après, j’ai soudainement eu peur que les petits ne comprennent pas mon geste, alors je leur ai expliqué comme y faut, et même depuis le début de ma longue carrière, quand je jouais à Maurice Richard au milieu de la rue Dezery avec ma gang, et que les rarissimes autos devaient attendre que le puck disparaisse dans un banc de neige avant qu’on daigne laisser passer le monsieur. Et l’auto. Cela a pris un long bout d'explication et une fois parti, je leur ai raconté le cheval du laitier ou du boulanger qui offrait quotidiennement ses pommes de route aux petit oiseaux du quartier qui s’empressaient de les remercier pour les boulettes fumantes :
— Pit-pit-pit... (merci beaucoup)
— Hiaaaaaaa... (pas de quoi à demain...)
Et qu’on utilisait parfois ces boulettes qui, une fois gelées dur, nous servaient à délimiter les buts ou même, dans les moments de restrictions budgétaires, de rondelle d’appoint. Les petits ont compris vite facile, les grands c’est toujours long difficile... on dirait que ça rentre pas. Je ne sais pas ce qu’ils vont retenir de mes racontars, mais ça devrait mijoter doucement...
En fait, je leur parlais d’acculturation, de durée, de l’importance de savoir qui on est et d’où on vient. De la différence entre pommes de route et gaz de shit. De déconstruction d’une société, de ses valeurs, de son patrimoine. D’entreprise de démolition systématique, de dilution des parties dans le grand tout mondial global qui nous apportera paix, bonheur, branlette universelle et prospérité. Je parlais de moi, de nous.
De multiculturalisme, de super fraises de California, de Végas en Louisiane au Nevada et de moulins à vent (ou à images). De Sir Paul, du maire Leboum, de clouwnage et d’égos gonflables. Qui de-vous-de-nous citoyens cosmiques, n’aimeraient pas descendre du ciel dans un mongolfière de la NASA avec un nez rouge en caoutchouc et une goutte d’eau perlant sur le front médiatique ? Je parle de hochets, de ce qui nous pend au bout du nez, de divertissements ga-ga, de Gilbert Rozon, de marchands de rires et de culs, de gigolos de la réclame, d’abrutissement collectif et de musique d’invasion. Barbare et saxonne la musique ! non mais pas grave man...on a du fun c’t’écoeurant pis les hot-dogs sont super, la bière hyper, fait que go-habs-go...on fait-la vague tous ensemble man... : yahoouuuuuu... envoye donc ! mange ton blé d’inde... fill et up jusqu’au Grand Rot final !!!
L’avaleur et l’avalé, ou plutôt L’avalé des avalées... Et depuis que j’ai commencé à jouer au hockey dans’ rue dans les années tranquilles, on dirait que ça rempire.
Fait qu’y faudrait peut-être commencer à changer de chandail man ? Ou accepter de se laisser en...filer.
Des buts.
André Vincent


Laissez un commentaire



6 commentaires

  • Jean-François-le-Québécois Répondre

    22 septembre 2010

    @ G. Bousquet:
    «... s’angliciser n’est pas la même chose que de devenir bilingue. Messieurs Parizeau et Lévesque étaient bilingues mais pas du tout anglicisés.»
    Mais ai-je dit un seul mot, au sujet du bilinguisme, dans mon commentaire?
    Que viennent faire messieurs Parizeau et Lévesque, là-dedans?
    Où est le rapport, monsieur Bousquet?
    Je croirais que vous tenez à lancer un faux débat... Mais dans quel but?

  • Archives de Vigile Répondre

    22 septembre 2010


    Votre témoignage m'a beaucoup touché, monsieur Haché ; je demeurais dans Hochelaga-Maisonneuve, plus à l'Est donc, mais les sentiments que nous ressentions dans nos deux maisons d'enfance étaient les mêmes.
    Nos perceptions d'aujourd'hui aussi me semble-t-il.
    Merci infiniment,
    André Vincent

  • Marcel Haché Répondre

    22 septembre 2010

    J’ai grandi en entendant parler quotidiennement et affectueusement de Maurice.
    Chez nous, Maurice—prononcé Mârisse-- était dit avec une telle simplicité, une telle chaleur, qu’on aurait pu croire que « Maurice » faisait partie de notre famille immédiate. « Mârisse » ne faisait pas partie de notre famille, évidemment, mais comme pour beaucoup de familles de tout un peuple, « Maurice » faisait partie de nos vies.
    Lorsqu’il parlait de « Maurice », mon grand-père (il demeurait chez-nous) baissait le ton et devenait sérieux. Prononçait seulement le prénom : Maurice. Cela devait suffire. Comme si « Maurice » lui était quelqu’un de familier et proche. Comme « Céline » aujourd’hui. Car Duplessis, alors, comme Céline Dion maintenant, s’était fait en plus un prénom…
    La Presse n’entrait pas chez-nous. Nous, comme de raison, c’était « Montréal-Matin ». Comme de cœur aussi. Sport et politique. Même s’il ne manquait jamais une « game », (à la radio, s.v.p.) mon grand-père n’adorait pas autant le hockey qu’il n’adorait Les Canadiens. À cette époque, le club, c’était l’armée des canadiens. Les joueurs étaient nos soldats. D’ailleurs, je me souviens très bien que mon grand-père s’identifiait comme un « canadien ». Les autres, tous les autres, c’tè les anglais (prononcé angla).Ne s’était jamais jamais perçu comme un canadien-français. Nous---Nous--- c’est Nous qui étions les « canadiens », ceux qui étaient ici les premiers, aujourd’hui québécois. Nous sommes là depuis bien plus longtemps que la Province de Québec et le Canada. Et depuis bien plus longtemps que Les Canadiens de Montréal. Depuis bien plus longtemps que les Molson ...
    Votre article m’a rappelé une anecdote de notre vie familiale. Je revois mon grand-père le dimanche soir, seul dans la p’tite cuisine de notre grand logement du 3966, écouter la « game d’hockey » à la radio. C’est ainsi, « à radio », que mon grand père accompagnait l’armée des canadiens les dimanches soir. Le CH, c’était notre armée. C’était…
    Je revenais du parc Jeanne d’Arc avec mon père, ma game pee wee jouée. Au moment d’écrire ces lignes, je revois mon grand-père, je l’entends, sur un but du CH à Boston, célébré de façon si caractéristique par Lecavalier, comme revenant soudainement de loin, d’aussi loin également que la Nouvelle-Angleterre où sa famille avait naguère été contrainte de s’exiler, puis contrainte de revenir, ti-peuple toujours contraint mais fidèle, mais fidèle, je l’entends, s’adressant à mon père et moi qui arrivions au milieu de son match, nous dire à voix basse, pas triomphante, sur le but im-men-se, fa-bu-leux et célébré de Richaaarrrd: « c’est Maurice ».
    Notre honneur était sauf !

  • Archives de Vigile Répondre

    21 septembre 2010

    M. Jean-François-le-Québécois, s'angliciser n'est pas la même chose que de devenir bilingue. Messieurs Parizeau et Lévesque étaient bilingues mais pas du tout anglicisés.

  • Archives de Vigile Répondre

    21 septembre 2010

    @ Jean-François,
    Oui, et quand je pense que c'est l'Allier qui a fait tout le travail pour faire de la ville de Québec ce qu'elle est aujourd'hui, et que c'est Leboum qui se les gonfle...
    Quant à notre bon maire à nous, c'est une honte de l'avoir reporté au pouvoir. En fait, c'est pas nous qui l'avons fait, mais les bloques du West Island ; se sont bouchés le nez et z'ont voté contre Louise Harel-la-péquiste. Faut quand même leur donner ça aux Anglais, sont capables de voter selon leurs intérêts immédiats si nécessaire, peu importe l'odeur.

  • Jean-François-le-Québécois Répondre

    21 septembre 2010

    @ André Vincent:
    «Fait qu’y faudrait peut-être commencer à changer de chandail man ? Ou accepter de se laisser en...filer.»
    «Des buts.»
    C'est que nous avons tendance à compter dans nos propres buts, pour faire une analogie avec le hockey.
    On nous a appris à ne pas aimer qui nous étions. À trouver que de s'angliciser, ça faisait «winner».
    Et nous nous trouvons, même sur le plan touristique, à nous tirer dans le pied, ce faisant, car ce qu'aiment du Québec les touristes américains, notamment, c'est que quand ils viennent à Québec, ils se sentent comme s'ils se trouvaient en Europe, tout en ayant pas changé de continent...
    Cela est quelque peu menacé, sous Régis Ier... Mais j'ai cru comprendre que les choses étaient encore pires, avec cette espèce de peigne-cul de maire Tremblay, à Montréal.