L’”avidité” du secteur financier est due à la fin de l’étalon-or

Ensuite… l’histoire fait son retour. Puis la révolution arrive.

Révolution - le retour d'une grande oubliée

Version anglaise originale
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▪ L’être humain présente deux aspects, selon les Grecs anciens. Il y a “l’appétit” — l’esprit rationnel cherchant comment obtenir ce qu’il souhaite. Et il y a “l’esprit” — qui s’occupe de choses intangibles comme l’honneur, le statut, la religion et ainsi de suite.

C’est peut-être l’appétit qui construit la richesse… mais c’est l’esprit qui nourrit les révolutions. Les gens ont un sens inné de ce qui est bon ou pas… de ce qui est juste et injuste. Lorsqu’ils se sentent floués, ils font la révolution.
La presse explique comment les riches sont devenus plus riches aux Etats-Unis. Dans le Washington Post :
“Entre 1973 et 1985, comme le démontrait en 2009 Simon Johnson, ancien économiste en chef du Fonds monétaire international, les banques américaines ne gagnaient jamais plus de 16% sur l’ensemble des profits des entreprises nationales. Au milieu des années 2000, ce chiffre était passé à 41%. Il en est allé de même pour les salaires : durant plus de trois décennies, de 1948 à 1982, les niveaux de salaire dans la finance atteignaient en moyenne entre 99 et 108% de la moyenne du secteur privé. En 2007, ils étaient à 181%”.


Mais pourquoi ? Comment ?
“A cause de l’avidité des banquiers”, répondent à la fois les indignés et la presse. Attendez une minute. Les banquiers étaient tout aussi avides lorsqu’ils représentaient 10% des profits des entreprises. Les banquiers sont toujours avides — comme tout le monde.
Ce n’est pas l’avidité financière qui a fait basculer le monde en faveur des riches. Non : ce sont les autorités.
Le système monétaire post-1971 basé sur le dollar a permis une explosion du crédit — ce qui a naturellement profité directement au secteur du crédit, et indirectement à l’ensemble de l’investoriat détenant des actifs financiers. Aux dépens des classes basses et moyennes. En d’autres termes, l’expansion de crédit causée par un régime monétaire flexible et extensible a mis le feu à l’économie toute entière. Les classes moyennes et plus pauvres se sont lourdement endettées pour acheter des choses. Les “riches” — du moins ceux qui possédaient des actions et des obligations — sont devenus plus riches, à mesure que les dépenses de consommation illuminaient le monde économique, en particulier le secteur financier lui-même. Les profits de ce secteur ne représentaient que 10% environ du total des profits à Wall Street en 1970. Lorsque la bulle du crédit a éclaté en 2007, ils étaient passés à 40%.
Les salaires pour le travailleur moyen ont stagné pendant 40 ans. Mais les salaires à Wall Street ont grimpé en flèche. En 1970, le salaire moyen dans le secteur financier était à peu près égal à ceux de postes équivalents dans le reste de l’économie. Une fois le 21e siècle arrivé, les salaires de Wall Street étaient presque deux fois plus élevés.
Ceux qui se plaignent des dirigeants “avides” et des riches sont à côté de la plaque. Les gens — riches ou pauvres — sont tous avides. Mais ils n’ont pas toujours un système monétaire qui encourage la dette et favorise les investisseurs aux dépens des travailleurs. Ce système monétaire a été créé en 1971 par l’administration Nixon, qui ne savait probablement pas ce qu’elle faisait… et a ensuite été perfectionné par les présidents de la Fed qui lui ont succédé.
▪ En plus de creuser le fossé entre les riches et les pauvres, le système monétaire non-appuyé à l’or a eu une autre conséquence notable. Il a sapé la capacité des travailleurs à faire concurrence dans le monde moderne. Il y est parvenu en faisant passer une part de plus en plus grande de la production vers les marchés émergents.

Durant l’ère pré-1971, les pays devaient solder leur balance commerciale. C’est-à-dire que lorsqu’un pays vendait plus à son voisin qu’il n’y dépensait, le pays en surplus terminait avec un excès de devises de son voisin. La facture était réglée en transférant de l’or — la devise réserve à l’époque — du pays en déficit vers le pays en surplus.
Ce transfert d’or avait un effet effroyable sur l’économie du pays déficitaire — soit parce que les investisseurs faisaient grimper les taux d’intérêt, soit parce que la Banque centrale s’en chargeait. Cela causait un ralentissement de la croissance économique et une baisse des dépenses, corrigeant ainsi la fuite de fonds vers le voisin.
C’est précisément ce mécanisme d’auto-correction que les autorités étaient décidées à supprimer lorsque l’administration Nixon a “fermé la fenêtre de l’or” au département du Trésor US en août 1971. Les Etats-Unis avaient trop dépensé pour la guerre du Vietnam. Les banques françaises, encore très actives au Vietnam, étaient généralement destinataires de l’argent… qui allait ensuite à la Banque de France. Les Français, anticipant un problème avec le dollar, voulurent échanger leurs billets verts contre de l’or. C’était là la cause immédiate de la réaction de l’administration Nixon — un véritable défaut sur ses obligations financières. C’était également la cause de la hausse du prix de l’or qui s’ensuivit… après quoi arriva par un krach du métal jaune… puis par un gigantesque boom durant lequel les Américains ordinaires furent poussés à s’endetter et attirés dans la pauvreté.
Les riches devinrent plus riches, les pauvres devinrent plus pauvres. Les classes moyennes aussi devinrent plus pauvres. Entre 1975 et 1992, le patrimoine des 1% les plus riches des Etats-Unis passa de 22% du total de la richesse des ménages à 42%. Pourquoi ? Les plus riches étaient-ils plus productifs ? Etaient-ils devenus plus intelligents ? Bien sûr que non… La partie avait été truquée en leur faveur.
▪ Les Ciompi se sont révoltés au 14e siècle. Il s’agit des cardeurs de laine de Florence… le poppolo minuto — le petit peuple — sans pouvoir ni argent. Ils se sont soulevés en juin 1378, attaquant les bâtiments gouvernementaux ; en juillet, ils étaient aux commandes du gouvernement.

D’autres corporations devinrent jalouses. En août, les bouchers les attaquèrent sur la Piazza della Signoria. Le pouvoir des Ciompi déclina… jusqu’à ce que les choses reviennent à la normale.
Ce n’est là qu’un exemple parmi les nombreux soulèvements qui se sont produits en Europe parmi les basses classes. En France, un paysan appelé Jacques a mené une révolte contre les autorités au 14e siècle — la Grande Jacquerie. C’était le début d’une longue liste d’émeutes qui n’ont pas pris fin avant le 18e siècle.
L’une des idées les plus fallacieuses de tout le 20e siècle nous vient de Francis Fukuyama, qui a demandé — apparemment avec le plus grand sérieux — si nous étions à “la Fin de l’Histoire”. Selon lui, la démocratie et le capitalisme modernes avaient atteint une telle perfection après la chute du Mur de Berlin qu’aucune amélioration n’était possible. L’histoire avait pris fin.
Les Jacqueries, pensait-il, n’étaient plus nécessaires. Parce que la démocratie moderne s’adaptait naturellement aux défis qu’elle rencontrait. Si les gens avaient des griefs, il leur suffisait de faire signe à leurs élus. Les politiciens discuteraient du sujet et trouveraient une solution, n’est-ce pas ?
Ha ha ha… Fukuyama a mal compris l’ensemble de la situation. La démocratie. Le capitalisme. L’histoire. La politique. Tout. A mesure qu’une institution mûrit, petit à petit, elle perd de vue son but d’origine et commence à servir les desseins de ceux qui la contrôlent. Elle devient rigide — s’obstinant à résister à tout changement qui diminuerait le pouvoir et la richesse des groupes qui la dirigent. Plus l’institution reste immobile, plus elle devient parasite et arthritique. Elle monopolise les ressources de la production honnête, les redirigeant vers les sangsues privilégiées.
Ensuite… l’histoire fait son retour. Puis la révolution arrive.

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Bill Bonner5 articles

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Bill Bonner est le fondateur et président d'Agora Inc., une maison d'édition publiant des lettres d'information confidentielles – probablement l'une des plus brillantes au monde. Auteur de la lettre e-mail quotidienne The Daily Reckoning (450.000 lecteurs... ), il intervient également dans La Chronique Agora, directement inspirée du Daily Reckoning.

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