L'école du vivre ensemble?

Accommodements - Commission Bouchard-Taylor

L'école est le meilleur lieu pour apprendre à vivre ensemble, faisaient valoir hier, devant la commission Bouchard-Taylor, les représentants de différentes commissions scolaires. Mais est-ce toujours le cas?

Vous vous rappelez sans doute le tollé suscité par la décision du gouvernement Charest de financer à 100% des écoles privées juives, en janvier 2005. Le tollé avait été tel que le gouvernement avait dû faire volte-face. Cette affaire avait soulevé des questions essentielles sur le financement public des écoles ethnoreligieuses au Québec, qui isolent des proportions importantes d'enfants de certaines communautés. Questions qui sont vite tombées dans l'oubli, malheureusement. La controverse s'est envolée et ce non-sens qu'est le financement public d'écoles qui pratiquent la séparation ethnique et religieuse est resté.
Près de trois ans plus tard, la controverse envolée réatterrit aux audiences de la commission Bouchard-Taylor, même si elle fait bien sûr moins de bruit que d'autres questions jugées plus brûlantes. Et on se prend à espérer que les commissaires, dans le rapport qu'ils remettront au premier ministre le 31 mars prochain, puissent enfin sonner le glas du financement des écoles ethnoconfessionnelles au Québec.
Une école qui n'est pas ouverte à tous ne devrait pas avoir de financement public, faisait valoir devant la commission, lundi, Louis Rousseau, professeur au département de sciences des religions de l'UQAM. Il a bien raison, même si, devant cette salle quasi vide du Palais des congrès où se déroulent les travaux de la Commission cette semaine, on avait l'impression qu'il prêchait dans le désert.
On a choisi de laïciser le système scolaire en l'an 2000. On a choisi de refuser le modèle «communautarien». On a choisi de faire de l'école le creuset par excellence d'une culture citoyenne commune. On a choisi de remplacer l'enseignement religieux confessionnel par un programme d'éthique et de culture religieuse. Il faut donc être conséquent. Il faut que cela se reflète dans toutes les politiques publiques et que l'on cesse de financer des écoles réservées aux membres d'une communauté particulière.
Et les écoles privées catholiques, alors? Bonne question. Serons-nous placés devant un autre cas où la laïcité prônée le serait uniquement pour les groupes minoritaires? Louis Rousseau a proposé une réponse intéressante à cette question en suggérant de tenir compte du critère de «l'exclusivisme». Sous cette loupe, les écoles privées catholiques ne posent pas problème, dans la mesure où il ne s'agit pas d'écoles réservées aux membres d'une seule communauté. Car le but visé, rappelons-le, n'est pas de mettre à la porte toute trace de passé religieux, mais bien de faire de l'école le vecteur par excellence d'une culture commune.
«L'école publique est le lieu privilégié pour l'intégration des élèves immigrants qui la fréquentent», faisait valoir avec justesse, lundi, le Syndicat de l'enseignement de l'ouest de Montréal. «L'existence même de ces écoles est un non-sens, va à l'encontre du principe même d'intégration et ne contribue aucunement à l'harmonisation des cultures. Bien au contraire, ces écoles favorisent davantage la ghettoïsation et parfois l'intolérance», lit-on dans le mémoire soumis à la commission. En fait, le non-sens, c'est surtout le financement public de ce type d'école. Il est illogique que l'État encourage la fréquentation d'écoles communautaristes qui vont à l'encontre des grandes orientations qu'il s'est données. Il ne peut faciliter la ségrégation scolaire pour les uns et vanter les mérites de l'école commune pour les autres. Si un parent tient à tout prix à envoyer son enfant dans une école juive ou grecque ou musulmane, c'est bien sûr son droit. Mais l'État n'a pas à payer pour ce choix.
Entendu à la Commission...
Cette phrase qui m'a fait sursauter: «Dans les écoles de quartiers pauvres, on ne donne pas d'examens à la fin du mois parce que les enfants ont faim...
- Pouvez-vous le répéter plus fort?» a demandé le commissaire Gérard Bouchard à Denyse Lacelle, du Conseil communautaire de Côte-des-Neiges/Snowdon.
Comme quoi, oui, oui, il y a sans doute un peu plus criant que le problème du vote en burqa au Québec.
La question qui tue...
En fin de journée hier, une jeune femme de 18 ans, Sarah Assoum, se présentant comme une Québécoise musulmane de Boucherville qui lit Michel Tremblay, qui aime le Québec et qui veut comprendre l'origine de la crise des accommodements, s'est adressée à Charles Taylor avec une certaine candeur.
«Vous ne trouvez pas que c'est de la généralisation? a-t-elle demandé, en faisant référence à la diabolisation de l'islam.
- Les gens sont très ignorants. Il faut combattre ça.
- Comment on peut combattre ça?»
- source


Laissez un commentaire



Aucun commentaire trouvé