Nous aurons tous alors une sorte d’implant numérique à l’intérieur du corps, prédit-elle. Cet implant nous aidera à «pirater» notre système nerveux et à contrôler les maladies, ou nous permettra par exemple de parler avec un «concierge numérique», dans notre cerveau, qui lira nos courriels et nous aidera à apprendre de nouvelles langues.
«L’humain et la machine ne feront plus qu’un», résume en entrevue Mme Rothblatt à l’issue de son allocution, mercredi, à la conférence «C2 Montréal», qui allie commerce et créativité. Et selon elle, cette perspective ne devrait pas nous effrayer.
Certains de ses collègues du secteur en pleine croissance de l’intelligence artificielle dépeignent un avenir plus sombre - où une super-intelligence surpasserait l’humain jusqu’à menacer tous les êtres vivants sur la planète. La vision de Mme Rothblatt est plutôt lumineuse.
Martine Rothblatt a beaucoup de cordes à son arc: PDG d’une entreprise de biotechnologie, militante pour les droits des transgenres, créatrice des services de radio par satellite Sirius XM. Son entreprise, United Therapeutics, tente de fabriquer des organes artificiels que l’on pourrait transplanter à l’humain et de créer de nouveaux traitements pour les maladies rares.
«Système d’exploitation de la conscience»
Depuis le début de l’évolution, explique-t-elle, la technologie est devenue une extension de l’humain - et cela ne changera pas, les ordinateurs devenant de plus en plus puissants. Mais elle ne craint pas une dérive incontrôlable de l’intelligence artificielle, qui mènerait à une destruction de la planète, car l’ordinateur et l’humain ne feront plus qu’un. «De la même façon que nous avons fusionné avec nos outils dans le passé, nous fusionnerons avec l’intelligence artificielle.»
Mme Rothblatt rappelle que nous compilons déjà sur des «serveurs en nuage» des tonnes d’informations sur nous-mêmes: photos, vidéos, entretiens et données diverses, qui reflètent notre personnalité. Les grandes entreprises de technologie du monde entier se font concurrence pour créer un logiciel qui colligerait et intégrerait efficacement toutes ces données pour les utiliser avec des assistants personnels comme Siri ou Alexa.
Elle prédit que ce n’est qu’une question de temps avant qu’un «système d’exploitation de la conscience» soit créé à partir de ce processus. Les humains seront alors en mesure d’interagir avec une version numérique d’eux-mêmes, téléchargée dans leur esprit, qui serait leur ami, leur guide, leur enseignant et leur moteur de recherche, soutient-elle.
Contrôler un nerf
Sa société United Therapeutics tente actuellement de manipuler le nerf vague, le plus long nerf du corps, qui contrôle des facteurs tels que la fréquence cardiaque, la transpiration, la contraction et le relâchement de l’intestin. Le nerf remonte à la surface en deux points, explique Mme Rothblatt: les deux lobes d’oreille. Des expériences ont montré que des signaux pouvaient être transmis directement au c?ur en stimulant le nerf vague au moyen d’une électrode touchant certaines parties du lobe de l’oreille.
Mme Rothblatt croit que les êtres humains pourront éventuellement télécharger une langue entière dans leur cerveau en portant simplement un casque équipé d’une électrode qui stimule le nerf vague. «Ce sont des choses qui seront omniprésentes dans 50 ans», a-t-elle prédit.
Mais ne vous attendez pas à savoir automatiquement parler chinois en stimulant simplement un nerf. «Vous aurez encore besoin de vous entraîner» afin de savoir comment utiliser les nouveaux symboles téléchargés dans votre tête, a-t-elle précisé.
«L’une des carrières les plus importantes de l’avenir sera celle de «curateurs personnels», prédit Mme Rothblatt: «des concierges qui aideront les gens à intégrer dans leur esprit de nouvelles informations numériques».
La conférence «C2 Montréal», amorcée mercredi, se poursuit jusqu’à vendredi.