L’hypercapitalisme c'est l’hypergauche

Il n'y a plus ni gauche ni droite, seulement le souverainisme contre le globalisme


La campagne présidentielle, l’élection de Donald Trump, les remous et l’incertitudes de l’interregnum à Washington, bref USA-2016 ne cesse de faire sentir et sortir ses effets. Tenant compte de ce que jusqu’ici Trump a été indiscutablement dans une posture antiSystème qu’on peut qualifier d’authentique, on notera parmi les effets de USA-2016 celui-ci, qui n’est pas rien, d’une révision nécessaire et décisive, et urgente, de qui est Système et qui est antiSystème dans les étiquettes convenues de “droite” et “gauche” que l’on continue à utiliser malgré l’usure formidable du temps et la contrainte écrasante des conformismes, – usure et contrainte mises en évidence par le système de la communication. USA-2016 nous a en effet informé d’une façon impérative et irréfragable que le capitalisme de notre temps postmoderne, – nommons-le hypercapitalisme à cause de ses caractères extraordinaires, – est complètement, absolument et sans réserve “de gauche”, – nommons-là hyper-gauche, sinon “hypergauche”, cette gauche postmoderne où se trouve l’hypercapitalisme, pour ne pas chagriner quelques âmes sensibles mais tout de même avertir quelques esprits égarés. Cela ne fait pas de ce qu’on nomme “la droite” un parangon de vertu antiSystème, – son cas à elle est plutôt de la confusion et du désordre, – mais cela fait de ce qu’on nomme “la gauche”, non pas l’“idiote utile” du Système mais une composante absolument évidente et confirmée du Système.


(Accessoirement, cela confirme pour la nième et nième, et nième fois que ces étiquettes autocollantes, “droite“ et “gauche”, dont la colle ne fixe plus rien, sont totalement vidées de leur sens, de leur signification... Leur sens est absence de sens.)


Un nommé “Virgil”, – sans doute s’agit-il d’un parent de l’honorable Virgile de nos chères études enfuies dans le passé archaïque, – fait un très, très-long article sur Breitbart.News, sur cette situation de l’hypercapitalisme par rapport à USA-2016. Aucun pool de journalistes et d’éditorialistes du New York Times, du Guardian, du Monde et Cie, ne serait capable d’écrire un tel texte, même si on les libérait de leur goulag psychologique qu’est la presse-Système. Plus encore, l’argument opérationnel est tout trouvé, il est même impératif : la grande multinationale de tout ce que vous voulez, Kellogg’s, basée à Battle Creek, dans le Michigan, a annoncé le 29 novembre qu’elle annulait toutes ces insertions publicitaires sur Breitbart.News, essentiellement selon l’appréciation idéologique des “valeurs“, celles que défendrait Kellogg’s et que bafouerait Breitbart.News. (C’est au nom de ces mêmes “valeurs” que les babies-milliardaires de Silicon Valley, les Facebook, Tweeter & Cie, ont entrepris une vaste campagne de censure évidemment vertueuse, contre tout ce qui approcherait Trump, de près ou de loin.) Breitbart.News a aussitôt riposté en lançant une campagne de boycott de Kellogg’s, avec une pétition ayant réuni 250.000 signatures en deux jours (et 320.000 dans le cours du 3ème jour).


Ce que nous montre superbement Virgil, c’est simplement que cette idéologie que nous désignerions comme de l’hypergauche est loin d’être un faux-nez du Corporate Power, mais bien au contraire son idéologie fondamentale. Cette modification de perception fait alors de la gauche postmoderniste, ce que nous désignons également volontiers comme le progressisme-sociétal dont le centre d’intérêt est tout entier concentré sur les valeurs sociétales (minorités de genre, minorités ethniques, multiculturalismes, “frontières-ouvertes” ou accueil non contrôlé des migrations massives, etc.), non pas une “idiote utile” attirée par des sirènes trompeuses mais une complice, une associée à part entière, et l’aile marchante de l’hypercapitalisme qui devient alors composite : Corporate Power + progressisme-sociétal, formule du Bonheur postmoderne, et “la gauche” effectivement recomposée en une hypergauche embrassant la “gauche postmoderniste”.


Pour autant, cette évolution n’est pas précisément une surprise. Elle s’est déjà accomplie disons en une sorte de prototype ou de banc d'essai, ces 20-30 dernières années, d’une façon absolument affichée et structurelle au niveau de l’“art” devenu “Art Contemporain” [AC], dont l’absence du moindre intérêt pour les dimensions esthétique, transcendantale et non-mercantiliste est compensée par une union complète avec le capitalisme en voie de devenir hypercapitalisme, au travers du soutien financier sans compter de très grands groupes capitalistes, inscrit pompeusement dans la rubrique “mécénat”-corporate. Mais la spécificité du domaine pouvait encore laisser à penser qu’il ne s’agissait que d’une exception, d’un accident, même chiffré en $milliards et €milliards ; ce qui s’est passé, ou qui est venu à jour durant USA-2016, et que Virgil nous détaille, montre que l’accident était en réalité l’apparition d’une nouvelle substance qui s’est désormais étendue et, si l’on peut dire, “globalisée” à l’ensemble du capitalisme devenu hypercapitalisme. Désormais, ceux qui se disent “de gauche” peuvent commencer à enquêter sur eux-mêmes et sur ce qu’ils sont devenus, et finalement sur ce que cela signifie aujourd’hui que de se dire “de gauche”.


Bien entendu, comme il n’est pas question de dénoncer dans la logique de ce qui précède tout ce qui est “de gauche”, il est par contre plus que jamais question de mettre en cause l’usage de ces étiquettes non seulement dépassées mais désormais faussaires, trompeuses sinon inverties, qui emprisonnent l’esprit par disons le “sloganisme” et le déterminisme-narrativiste qui en découle bien plus que par la dialectique qui est complètement ignorée, étiquettes qui pulvérisent désormais la liberté de penser et la liberté de juger. Il faut se tourner vers d’autres définitions, d’autres catégories, comme globalisme versus souverainisme, ou, mieux encore selon notre point de vue, comme Système versus antiSystème. Dans ce cas et dans ce cadre, effectivement, il est nécessaire pour chacun de réfléchir à cette problématique (“Désormais, ceux qui se disent “de gauche” peuvent commencer à enquêter sur eux-mêmes et sur ce qu’ils sont devenus...”) ; dans cette logique, on placerait comme illustration de cette exhortation à laquelle poussent les événements, « [c]e commentaire de Jean-Pierre Le Goff, à propos de son livre Malaise dans la démocratie : “On est à la fin de ce cycle historique... On voit très bien que les fractures sont là, qu’on ne peut plus continuer sur cette espèce d’hégémonisme de ce que j’ai appelé le gauchisme culturel qui est battu en brèche.. On ne voit pas forcément sur quoi tout cela va déboucher...” »


Sans surprise, si l’on considère la tribune où il écrit et le parti qu’il défend, Virgil rappelle que, parmi les PDG des cent premières compagnies, ou conglomérats des USA, classés par Fortune, aucun n’a fait de donation à Trump, alors que les donations à Clinton n’ont évidemment pas manqué ; bien plus que d’intérêts stratégiques, bien plus que de choix économiques même si les uns et les autres y sont contenus, il s’agit d’une véritable nouvelle culture, – ou “corporate culture” sans aucun doute à prétention révolutionnaire... (« Given this new kind of corporate culture, it’s no wonder that during the 2016 presidential election, The Wall Street Journal surveyed the CEOs of the 100 biggest American companies, finding that while Hillary Clinton had plenty of support, none of them—zero—backed Donald Trump. ») Dans ce cas et dans ce cadre là aussi, et plutôt que chercher des explications complexes et pleines de sous-entendus, on considérera que Trump est une sorte d’exception par rapport à la psychologie régnante dans le Corporate Power, qu’il est l’oiseau rare, l’incompréhensible et l’inexplicable, à qui d’ailleurs nul ne sait ce qu’il arrivera et nul ne sait ce qu’il nous réserve ; mais surtout, on constatera, ce qui explique la terrifiante colère qui se déchaîne et ne cesse de se déchaîner contre lui, que Trump est donc littéralement incontrôlable alors qu’il s’affirme pourtant défenseur de références qui sont tout de même à bien des égards celles du capitalisme américain (encore plus, bien plus qu’“américaniste”).


C’est désormais de ce point de vue très large de la culture que se détermine la position et l’inflexion de l’hypercapitalisme, ou du Système si l’on veut, et non plus comme on le fait très souvent encore, par exemple selon la référence des réactions de la Bourse qui ne sont plus que des spasmes témoignant de la folie de ses humeurs et de sa psychologie hystérique, tout cela sans rapport avec la réalité, – et d’autant plus aisément qu’on sait par ailleurs qu’elle (la réalité) n’existe plus en tant que telle. Les divers spasmes de la Bourse ne nous disent rien sur un Trump après son élection ou sur un Fillon lorsqu’il est désigné candidat des républicains, mais le soutien haut et fort du président directeur général (CEO) de Goldman Sachs pour le mariage des homosexuels nous dit beaucou


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