Culture

La chaîne du livre est en danger au Québec

Tribune libre

Lorsque l’on regarde, ces derniers temps, le comportement de Québécor envers ses compétiteurs dans le domaine des médias (attaquent contre Radio-Canada, Gesca et Bell), on a peur que la même chose se produise dans le domaine culturel. La très subtile députée du Parti Québécois, Agnès Maltais, a été prompte en juin dernier pour déposer un projet de loi qui sécurisait l’entente de gestion de l’amphithéâtre de Québec entre Quebecor et la ville de Québec. Elle n’a par contre jamais bougée lorsque, en septembre dernier, Quebecor a avalé la maison d’édition « La Bagnole ». Va-t-on laisser encore une fois Quebecor prendre le contrôle d’un secteur économique et culturel québécois?
On connaît déjà le problème de la concentration de la presse, qui réduit la diversité des opinions. Le Bureau de la concurrence a déjà obligé Quebecor en 2001 à se départir de Télévision Quatre-Saison (TQS) lorsque l’entreprise avait acquis Vidéotron. Le même problème est en train de se produire avec la chaîne du livre au Québec. La chaîne du livre est constituée au départ par les maisons d’édition. Celles-ci utilisent les services des diffuseurs-distributeurs pour expédier les livres dans les librairies.
Or, Quebecor possède déjà les deux plus grosses chaînes de librairies (Archambault et Renaud-Bray), une des deux plus grosses entreprises de diffusion-distribution de livres (ADP) et deux groupes de livres (Sogides et Groupe Ville-Marie) regroupant plus de 16 maisons d’édition. Pendant que le monopole se crée, il y a des indépendants qui disparaissent les uns après les autres. Les livres de nombreux éditeurs risquent de ne pas avoir une visibilité adéquate, parce que les livres du monopole auront préséance sur les autres.
Quand on voit le comportement de type « bulldoser » de Québécor, on craint que les petites maisons d’édition et les petites librairies indépendantes disparaissent. Qui osera publier un auteur inconnu? Les lois du marché dicteront les choix éditoriaux et seuls les auteurs reconnus seront publiés, car le titre d’un auteur débutant risque de ne pas faire les frais. Ainsi, les décisions éditoriales se plieront à une logique économique et non culturelle. Québécor voudra tirer le maximum de profit au pouce carré dans ses librairies et favorisera les livres publiés par ses groupes d’éditeur. Ça aura aussi pour conséquence de favoriser sa boite de diffusion-distribution. Déjà dans son empire, Pierre-Karl Péladeau a établi un système d’intégration verticale. Cette intégration verticale a pour but de tout garder dans la famille Québécor. Ainsi par exemple, un livre est publié aux Éditions Stanké, distribué par ADP dans les librairies Archambault. Ce livre reçoit une bonne critique à une émission sur TVA, dans le Journal de Montréal et dans le magazine 7 Jours. Quand on entend cet empire se plaindre que Radio-Canada n’achète pas suffisamment de publicité dans ses médias. Il faut avoir tout un culot! Une loi pour limiter le contrôle de l’édition est bien plus nécessaire qu’une loi protégeant une entente de gestion d’une aréna!


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5 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    2 mars 2012

    Le temps du livre imprimé est fini au Québec. Un: quand Renaud-Bray n'accepte pas un livre, c'est 80 à 90% du marché qui disparaît. Il reste Wal-Mart et Maxi, bonne chance! Avant, on avait une chance avec Les Intouchables de Michel Brûlé, maintenant il s'occupe seulement des vedettes de la télévision.
    La concentration est facilitée par le Fonds du livre, anciennement PADIÉ. Le Fonds du livre achète le silence, la soumission des éditeurs. Il ne reste que l'internet, c'est tout.
    Concentration ou pas, la liberté d'expression n'existe à peu près plus. C'est facile d'acheter les maisons d'éditions, le gouvernement en subventionne l'achat.
    Tant que le gouvernement subventionne, un peu plus ou un peu moins, ça ne changera pas grand chose.

  • Richard Lahaie Répondre

    21 février 2012

    Je tiens à corriger l'erreur que j'ai fait. En effet, Renaud-Bray ne faisait pas partie de la transaction lorsque Sogides est devenue propriété de Québécor en 2005. Par contre, Mme Comtois, vous voulez nous faire croire que la "Bagnole" n'est pas à Québécor, mais à Sogides. Or Sogides est une entreprise de Québécor, donc la "Bagnole" aussi. Un peu de rigueur intellectuelle, madame!

  • Archives de Vigile Répondre

    20 février 2012

    Monsieur Lahaie,
    Vos informations sont pour la plupart erronées.
    D'abord, Quebecor n'a pas "avalé" la Bagnole. Cette maison d'édition se cherchait un acquéreur, Sogides a simplement déposé une offre qui a été acceptée par les membres fondateurs.
    Ensuite, une simple recherche vous aurait permis de constater que Renaud-Bray n'appartient pas à Quebecor, mais bien à Pierre Renaud et quelques actionnaires indépendants.
    Encore une fois, quelques clics et vous auriez compris que Sogides est constitué de 3 groupes Livres (Homme, Librex et Groupe Ville-Marie)
    Le Groupe Ville-Marie Littérature remet chaque année une bourse pour le premier roman, le prix Robert-Cliche. Nous souhaitons toujours lire ces "auteurs inconnus" comme vous les appelez.
    Rigueur monsieur Lahaie, rigueur!!!
    Myriam Comtois
    Relationniste
    Groupe Ville-Marie Littérature

  • L'engagé Répondre

    16 février 2012

    Quelqu'un peut-il me dire quand Quebecor a acquis Renaud-Bray?
    Il y a bien une question de de conflit potentiel avec «Sogides» acquis par Quebecor et un gestionnaire de Renaud-Bray, mais j'ai peur que l'idée selon laquelle Quebecor possèderait les 2 chaines soit fausse...
    Si j'ai tort, quelqu'un peut-il me dire où regarder?

  • Archives de Vigile Répondre

    16 février 2012

    Ce n'est pas que la chaîne du livre qui est en danger, c'est la démocratie qui est en danger. On doit mettre en place une loi anti-trust qui brisera les Empires Médiatiques et bloquera leur formation à l'avenir. Ce qui ne sera possible que si l'on brise l'emprise disproportionel du pouvoir monétaire sur notre société.