La dérive linguistique

Dans cet esprit, pourquoi Weinstock, spécialiste de la religion, n’organiserait-il pas bientôt un grand colloque international tout en anglais sur l’oeuvre de Fernand Dumont ?

Weinstock - la mondialisation comme fétichisme intellectuel destiné à la destruction de la conscience nationale!


Gabriel Gagnon - La fin de semaine dernière se tenait à Montréal un colloque international en hommage au philosophe Charles Taylor, organisé par le département de philosophie de l'Université de Montréal, en collaboration avec d'autres institutions, dont l'Université McGill, et financé par le gouvernement du Québec. Comme Robert Dutrisac l'a fait remarquer dans votre édition du vendredi 30 mars, 26 des 27 communications retenues étaient présentées en anglais.
Comme Charles Taylor est un grand philosophe québécois parfaitement bilingue, ancien professeur à l'Université de Montréal, traduit et commenté au Québec, en France et à l'intérieur de la francophonie, il est insultant pour lui de se voir assimilé ici, par ignorance ou sectarisme, au seul monde anglo-saxon alors qu'en France, l'Université Paris III organise elle aussi un colloque, tout en français, sur l'oeuvre du grand philosophe. Les étudiants et le public francophones québécois ont ainsi été privés d'un contact privilégié avec sa pensée.
Loin de s'excuser, le principal organisateur de l'événement, le professeur Weinstock, prétend mettre le Québec sur un piédestal avec son colloque, étant donné que, pour lui, à l'avenir, les colloques internationaux organisés à l'Université de Montréal, même en lettres, en philosophie et en sciences humaines, devraient être tenus uniquement en anglais. Il se réjouit de cette évolution qui fait «qu'on peut se comprendre entre chercheurs des quatre coins de la terre». Dans cet esprit, pourquoi Weinstock, spécialiste de la religion, n'organiserait-il pas bientôt un grand colloque international tout en anglais sur l'oeuvre de Fernant Dumont?
Si nous voulons continuer à être la «plus grande université francophone en Amérique», il faut enrayer rapidement cette dérive qui s'attaque directement à notre identité de chercheurs et d'intellectuels.
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Gabriel Gagnon, professeur honoraire, département de sociologie, Université de Montréal - Le 31 mars 2012


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