La panique Jordan revisitée

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Un droit fondamental en jeu

L'arrêt Jordan a déjà entraîné la mise à mort de divers procès criminels. Mais pas un très grand nombre. Et pas dans les causes les plus importantes. Si on le lit comme il faut, il n'y a pas lieu de paniquer. Il y a plutôt lieu d'y voir un électrochoc pour moderniser un système poussiéreux.
On a beaucoup insisté sur les limites mathématiques imposées à la poursuite pour faire juger un accusé - 18 mois pour une cause sommaire, 30 pour une cause devant jury, sauf « circonstances exceptionnelles ».
On a moins dit que cette décision radicale rendue en juillet comporte un astérisque : elle s'applique pour le futur dans toute sa rigueur, mais elle prévoit un certain compromis pour les causes déjà dans le système.
C'est ainsi que deux des opérations majeures de ce qui est devenu l'UPAC ont été sauvées la semaine dernière.
D'abord, dans l'affaire du Faubourg Contrecoeur, qui implique l'ancien numéro deux de la Ville de Montréal Frank Zampino et le promoteur immobilier Paolo Catania, le juge Yvan Poulin a jugé qu'un délai de 61 mois n'était pas déraisonnable, compte tenu de l'attitude de la défense, à qui il impute 20 mois, et de la complexité de l'affaire. Il tient compte aussi de la maladie de l'ex-collecteur de fonds Bernard Trépanier.
Le juge Poulin ne s'arrête pas là : même si le délai lui était apparu déraisonnable, il aurait appliqué la « mesure transitoire exceptionnelle » prévue dans le jugement Jordan. Cette mesure est prévue pour les causes inscrites plusieurs années avant la décision de juillet. Dans la mesure où tous les acteurs du système se conformaient à une certaine façon de procéder, à des délais jugés somme toute acceptables, il serait injuste de faire tomber le couperet sans avertissement, avait dit en substance la Cour suprême.
Bref, en appliquant la règle stricte de Jordan, sans même utiliser cette mesure exceptionnelle, une affaire qui aura duré plus de cinq ans passe le test de Jordan.
Il est ici « évident » qu'un arrêt des procédures dans cette affaire serait contraire à l'intérêt de la justice, écrit le juge Poulin, de la Cour du Québec, dans un jugement à la fois pédagogique et convaincant.
***
Dans l'affaire de Mascouche, baptisée par la police Opération Gravier, l'arrêt des procédures a également été refusé malgré la requête de certains accusés dans ce dossier qui implique l'entrepreneur Tony Accurso - qui ne réclamait pas cet arrêt. Les accusations ont pourtant été déposées il y a bientôt cinq ans ! La juge Sandra Blanchard, encore là, a estimé que la complexité de l'affaire rendait les délais raisonnables dans le contexte « pré-Jordan ».
Un accusé mineur a été libéré.
***
Les 368 requêtes « Jordan » déposées au Québec depuis le mois de juillet ont donné lieu à 37 jugements, selon des données publiées par la directrice des poursuites criminelles et pénales hier. De ce nombre, 22 ont obtenu un arrêt des procédures. Le nombre peut paraître élevé. Une seule cause « zappée » du système, c'est une cause de trop. Mais il s'agit des cas les plus évidents, et dans des affaires qui ne sont généralement pas les plus graves.
L'arrêt Jordan a été rendu à cinq juges contre quatre - événement devenu rare à la Cour suprême. Je penche du côté de la minorité, qui se méfie des règles mathématiques trop rigides. Je me souviens très bien du premier jugement sur les délais déraisonnables de la Cour suprême (Askov), qui avait entraîné l'abandon par la poursuite en Ontario de près de 50 000 causes.L'arrêt Jordan a déjà entraîné la mise à mort de divers procès criminels. Mais pas un très grand nombre. Et pas dans les causes les plus importantes. Si on le lit comme il faut, il n'y a pas lieu de paniquer. Il y a plutôt lieu d'y voir un électrochoc pour moderniser un système poussiéreux.
On a beaucoup insisté sur les limites mathématiques imposées à la poursuite pour faire juger un accusé - 18 mois pour une cause sommaire, 30 pour une cause devant jury, sauf « circonstances exceptionnelles ».
On a moins dit que cette décision radicale rendue en juillet comporte un astérisque : elle s'applique pour le futur dans toute sa rigueur, mais elle prévoit un certain compromis pour les causes déjà dans le système.
C'est ainsi que deux des opérations majeures de ce qui est devenu l'UPAC ont été sauvées la semaine dernière.
D'abord, dans l'affaire du Faubourg Contrecoeur, qui implique l'ancien numéro deux de la Ville de Montréal Frank Zampino et le promoteur immobilier Paolo Catania, le juge Yvan Poulin a jugé qu'un délai de 61 mois n'était pas déraisonnable, compte tenu de l'attitude de la défense, à qui il impute 20 mois, et de la complexité de l'affaire. Il tient compte aussi de la maladie de l'ex-collecteur de fonds Bernard Trépanier.
Le juge Poulin ne s'arrête pas là : même si le délai lui était apparu déraisonnable, il aurait appliqué la « mesure transitoire exceptionnelle » prévue dans le jugement Jordan. Cette mesure est prévue pour les causes inscrites plusieurs années avant la décision de juillet. Dans la mesure où tous les acteurs du système se conformaient à une certaine façon de procéder, à des délais jugés somme toute acceptables, il serait injuste de faire tomber le couperet sans avertissement, avait dit en substance la Cour suprême.
Bref, en appliquant la règle stricte de Jordan, sans même utiliser cette mesure exceptionnelle, une affaire qui aura duré plus de cinq ans passe le test de Jordan.
Il est ici « évident » qu'un arrêt des procédures dans cette affaire serait contraire à l'intérêt de la justice, écrit le juge Poulin, de la Cour du Québec, dans un jugement à la fois pédagogique et convaincant.
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Dans l'affaire de Mascouche, baptisée par la police Opération Gravier, l'arrêt des procédures a également été refusé malgré la requête de certains accusés dans ce dossier qui implique l'entrepreneur Tony Accurso - qui ne réclamait pas cet arrêt. Les accusations ont pourtant été déposées il y a bientôt cinq ans ! La juge Sandra Blanchard, encore là, a estimé que la complexité de l'affaire rendait les délais raisonnables dans le contexte « pré-Jordan ».
Un accusé mineur a été libéré.
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Les 368 requêtes « Jordan » déposées au Québec depuis le mois de juillet ont donné lieu à 37 jugements, selon des données publiées par la directrice des poursuites criminelles et pénales hier. De ce nombre, 22 ont obtenu un arrêt des procédures. Le nombre peut paraître élevé. Une seule cause « zappée » du système, c'est une cause de trop. Mais il s'agit des cas les plus évidents, et dans des affaires qui ne sont généralement pas les plus graves.
L'arrêt Jordan a été rendu à cinq juges contre quatre - événement devenu rare à la Cour suprême. Je penche du côté de la minorité, qui se méfie des règles mathématiques trop rigides. Je me souviens très bien du premier jugement sur les délais déraisonnables de la Cour suprême (Askov), qui avait entraîné l'abandon par la poursuite en Ontario de près de 50 000 causes.
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