La "caquille" vide

Tribune libre

Les Québécois semblent, en ce moment, de tristes naufragés prêt à se précipiter sur n'importe laquelle bouée. Ainsi va la vie pour qui doit mener une existence politique de sinistrés. Dans une situation où notre “compas sombre dans les ténèbres” *, se précipiter en panique vers un objet flottant mal identifié peut devenir un réflexe compréhensible. Cependant, il peut se révéler, lui aussi, un nouvel épave propre à entraîner encore plus bas par le fond.
La "caquille vide" de François Legault semble assurément de cette trempe. Un logo multicolore qui s'éparpille dans toutes les directions. Un logo flou comme son programme. Un logo tout éclaté avec presque rien au centre, trahissant ainsi son immense vide doctrinal.
On nous offre un ramassis d'affairistes affairés à cultiver le "on verra", un assemblage insolite de fédéralistes, d'autonomistes, de souverainistes et de "jenesaisplustropquoiistes" tous annonciateurs de paralysie assurée. Un collage suspect d'opportunistes disparates prêts à vendre leur mère pour quelques instants de griserie d'un pouvoir bancal et provincial.
Ce partie est un leurre assurée, une nuisance consommée, un fourre-tout empoisonné, une entreprise de démolition téléguidée. On veut nous faire croire qu'il nous faut faire le ménage avant de parler de souveraineté. Ça, ça veut dire que jamais il ne se passera quelque chose. L’eau sera toujours soit trop froide, soit trop chaude ou encore trop tiède pour plonger. Ne serait-ce pas justement la souveraineté qui pourrait être porteuse de grand ménage et initiatrice de l'essentielle corvée qu’on remet et qu’on remet jusqu’à s’en rendre ridicules. Faut croire que l'on aime bien ça le raccommodage de nos culottes rapiécées et les cataplasmes sur notre jambe de bois. Après une décennie de dérive libérale, avons-nous vraiment besoin d'un intermède de gestion misérabiliste, condamnés au carcan sans le moindre rapport de force.
Mais voilà, le Parti Québécois ne nous offre pas grand chose non plus. Il nous veut dans la distribution d'un film dans lequel on a déjà malheureusement joué, un film qui nous mènera dans le même cul-de-sac de l'étapisme. Ce n'est pas un changement de chef qui changerait quoi que ce soit à la situation. Difficile de soulever l'enthousiasme quand le véhicule se dirige vers l'abattoir.
Que reste-t-il à faire? D'abord, pas d’unité, pas de souveraineté. Fichu pour nous ce rêve légitime et réalisé pour plus de deux cents pays de par le monde. Très périlleuse à réaliser, cette union ne suffira malheureusement pas. Faudra aussi réinventer un nouveau discours et défricher un nouveau chemin pour accéder à l'indépendance. Les temps sont mûrs pour un grand rebrassage de cartes. “Si tu es pressé, fais un détour” nous dit un proverbe chinois mais en aurons-nous le temps? Faudrait tout de même empêcher que "les grands labours dorment sous la gelée" ** une gelée qui risque de devenir notre grande ère glaciaire.
*Une expression de Richard Desjardins dans “Le Prix de l’or”.
** Félix Leclerc

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Gilles Ouimet66 articles

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Né à Mont-Laurier en 1947. Études primaires à cet endroit. Études classiques à Mont-Laurier et Hull entre 1961 et 1968. Diplômé en histoire de l’Université Laval en 1971. Enseignant à la polyvalente de Mont-Laurier entre 1971 et 2005. Directeur d’une troupe de théâtre amateur (Troupe Montserrat) depuis 2000. Écriture pour le théâtre, notamment une pièce à l’occasion du centenaire de Mont-Laurier en 1985 (Les Grands d’ici), une autre à l’occasion du 150e anniversaire du soulèvement des Patriotes (Le demi-Lys...et le Lion) en 1987 (prix du public lors du festival de théâtre amateur de Sherbrooke en 1988 et 2e prix au festival canadien de théâtre d’Halifax la même année). En préparation, une pièce sur Louis Riel (La dernière Nuit de Louis Riel). Membre fondateur de la Société d’histoire et de généalogie des Hautes-Laurentides. Retraité de l’enseignement depuis 2005.





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