Le conseil de la colère

Québec 2007 - ADQ


Ce travailleur qui a confronté Jean Charest jeudi exprimait un sentiment plus répandu qu’on ne le pensait : la colère. Pas seulement contre M. Charest. Contre le PQ (ce travailleur était jusqu’ici un électeur péquiste). Contre les politiciens, les fonctionnaires, les taxes, Montréal, le débat référendaire…

Cette colère pousse de plus en plus de Québécois à rejoindre l’Action démocratique de Mario Dumont. C’est en tout cas ce qu’indiquent les résultats du sondage Léger Marketing publiés hier par le Journal de Montréal et TVA. Les trois principaux partis recueillant chacun un tiers des intentions de vote, tout peut arriver le 26 mars. Tout, y compris l’élection d’un gouvernement adéquiste. Un scénario d’autant plus plausible que M. Dumont est désormais considéré comme celui qui ferait le meilleur premier ministre.
La grogne de l’électorat québécois, on l’avait vue poindre en 2002, alors que les appuis à l’ADQ avaient explosé. Mais devant l’improvisation évidente du programme de l’ADQ, devant les erreurs tactiques du chef aussi, les Québécois s’étaient résignés à revenir à leurs deux bercails traditionnels. Voici que contre toute attente, leur frustration resurgit. L’ADQ, qu’on disait (y compris dans cette colonne) morte et enterrée, ressuscite. La plate-forme électorale du parti n’est pas mieux ficelée, Mario Dumont a une équipe beaucoup plus faible qu’en 2003, et il sort d’une semaine difficile. Peu importe, il continue de grimper dans les sondages.
Pourquoi ? Pourquoi maintenant ? Peut-être parce que beaucoup de gens sont las de voir les « vieux partis » refuser d’aborder des questions qui les préoccupent (les accommodements raisonnables) ou de régler les problèmes simples qui les agacent (des bulletins chiffrés, s.v.p. !). Peut-être parce qu’ils veulent juste brasser une cage qui rouille sur place depuis un quart de siècle, notamment le sempiternel débat entre fédéralistes et souverainistes. Jean Charest a voulu éloigner les Québécois du PQ en parlant de référendum ; plusieurs semblent croire que la meilleure manière d’éviter cela, c’est de se débarrasser non pas d’un mais des deux camps !
Il est sain que cette colère s’exprime. Sain aussi que cette mouvance nationaliste et conservatrice, depuis trop longtemps intimidée par le « consensus québécois », ait enfin une place significative à l’Assemblée nationale. Mario Dumont aura alors en main les outils nécessaires à la construction d’un parti capable d’offrir une solution de rechange crédible à un prochain scrutin.
Toutefois, il ne faudrait pas que la frustration des Québécois les amène à accorder tout de suite une pluralité de sièges à l’ADQ. Même les adéquistes conviennent qu’ils ne sont pas prêts à former un gouvernement. Les organisateurs du parti ont toutes les misères du monde à trouver des candidats montrables à la télévision, comment M. Dumont s’y prendrait-il pour former un conseil des ministres compétent ?
En cette période cruciale pour l’avenir du Québec, les Québécois prendraient un risque énorme en élisant un gouvernement d’amateurs. Le jour du vote, ils devront se rappeler qu’aussi justifiée soit-elle, la colère est presque toujours mauvaise conseillère.

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André Pratte878 articles

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[une chronique intitulée « Tout est pourri » (critique de Anne-Marie Gingras) ->http://books.google.fr/books?id=EZWguAMXAtsC&pg=PA27-IA27&lpg=PA27-IA27&dq=pratte+Tout+est+pourri&source=bl&ots=MUti9NTQuH&sig=h2zgJlLgOg844j5ejxnUl4zH2_s&hl=fr&sa=X&ei=73RrT8aQEqnh0QHuh4GyBg&ved=0CEEQ6AEwBQ#v=onepage&q=pratte%20Tout%20est%20pourri&f=false]

[Semaine après semaine, ce petit monsieur nous convie à la petitesse->http://www.pierrefalardeau.com/index.php?option=com_content&task=view&id=30&Itemid=2]. Notre statut de minoritaires braillards, il le célèbre, en fait la promotion, le porte comme un étendard avec des trémolos orwelliens : « La dépendance, c’est l’indépendance ». « La soumission, c’est la liberté ». « La provincialisation, c’est la vraie souveraineté ». « La petitesse, c’est la grandeur ». Pour lui, un demi-strapontin à l’Unesco est une immense victoire pour notre peuple. C’est la seule politique étrangère qu’il arrive à imaginer pour le peuple québécois. Mais cet intellectuel colonisé type n’est pas seul. Power Corp. et Radio-Cadenas en engagent à la poche.





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