Le Renvoi relatif à la sécession du Québec, 15 ans plus tard

Des questions toujours d’actualité

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Une décision sage qui n'a jamais fait l'affaire du fédéral et dont il cherche à minimiser la portée

L’avis formulé par la Cour suprême du Canada dans le cadre du Renvoi relatif à la sécession du Québec est toujours d’actualité. En fait foi la récente déclaration d’intervention du gouvernement du Canada dans le cadre de la contestation de la constitutionnalité de la Loi sur les droits fondamentaux du Québec. Issue du projet de loi no 99, cette dernière loi était la réplique de l’Assemblée nationale du Québec à la Loi sur la clarté adoptée par la Chambre des communes du Canada. Quinze ans après le désormais célèbre avis de la Cour suprême du Canada, l’Association québécoise de droit constitutionnel fait un bilan du Renvoi relatif à la sécession du Québec et des controverses juridiques qu’il a suscitées.
Décision fondamentale en ce qui concerne les sources non écrites du droit constitutionnel canadien, la procédure de modification de la Constitution du Canada et le droit du Québec à disposer de son avenir, l’avis du 20 août 1998 a le mérite de proposer aux responsables politiques une voie à suivre. Pour ce faire, la Cour suprême mise sur la résolution des conflits, dans le respect des aspirations politiques légitimes des composantes de la fédération, par la conciliation des principes constitutionnels pertinents et, surtout, par la négociation de bonne foi. Ainsi, la Cour suprême reconnaît la légalité et la légitimité des démarches du Québec visant à réaliser démocratiquement son indépendance politique et constate l’existence d’une obligation constitutionnelle de la part des gouvernements du Canada et de ses provinces de négocier de bonne foi les modalités d’une sécession voulue par une majorité de Québécois.
Si les enseignements de l’avis du 20 août 1998 représentent désormais une forme de « mode d’emploi » permettant, ici comme ailleurs, de concilier démocratie et primauté du droit dans le respect de la volonté des peuples, les suites auxquelles l’avis a donné lieu sont également dignes de mention. À Ottawa, comme à Québec, deux premières interventions parlementaires ont cherché à traduire les principes formulés par la Cour suprême en termes législatifs. Le Parlement du Canada a adopté la Loi donnant effet à l’exigence de clarté formulée par la Cour suprême dans son avis sur le Renvoi sur la sécession du Québec, qui, par son seul titre, démontrait l’importance accordée à l’avis. La loi énumère les facteurs et les avis à considérer dans le cadre d’un examen par la Chambre des communes du Canada de la clarté de la question et de la majorité. Elle précise en outre les circonstances dans lesquelles le gouvernement du Canada n’engage aucune négociation avec une province sécessionniste.
L’Assemblée nationale du Québec répondait par sa Loi sur les droits fondamentaux du Québec que «[l]e peuple québécois détermine seul, par l'entremise des institutions politiques qui lui appartiennent en propre, les modalités de l'exercice de son droit de choisir le régime politique et le statut juridique du Québec».
N’en déplaise à ceux ou celles qui voudraient tourner le dos à ces questions, le débat sur les suites à donner à l’avis de la Cour suprême est de nouveau d’actualité. Le Bloc Québécois, par son projet de Loi abrogeant la Loi de clarification (C-457), et le Nouveau Parti démocratique, par le projet de Loi sur la modification constitutionnelle démocratique (C-470), ont remis en question la pertinence de la Loi sur la clarté ou, dans le cas du NPD, de certaines de ses dispositions
Sur la scène judiciaire, la requête présentée par Keith Henderson en 2001 – visant à faire déclarer inconstitutionnels les articles 1 à 5 et 13 de la Loi sur les droits fondamentaux du Québec – de même que la déclaration d’intervention déposée dans cette affaire par le Procureur général du Canada le 16 octobre 2013 se fondent également sur l’avis du 20 août 1998. L’offensive judiciaire fédérale n’est d’ailleurs pas restée sans réponse politique puisque l’Assemblée nationale adoptait le 23 octobre 2013, à l’unanimité, une motion réaffirmant les principes formulés dans la Loi sur les droits fondamentaux du Québec.
Au-delà des débats internes, le Renvoi relatif à la sécession est probablement la décision de la Cour suprême du Canada ayant le plus grand rayonnement à l’étranger. L’avis du 20 août 1998 a entre autres eu un écho dans l’avis consultatif formulé par la Cour internationale de Justice le 22 juillet 2010 relatif à la Conformité au droit international de la déclaration unilatérale d’indépendance relative au Kosovo. Les principes énoncés dans l’avis ont du reste inspiré les débats entourant le processus d’accession de l’Écosse à l’indépendance et n’iront pas sans avoir d’influence sur les travaux en cours de la Commission d’étude du droit de décider instituée par le Parlement catalan. Ce rayonnement par-delà les frontières de cet avis découle probablement du caractère universaliste des principes sur lesquels il s’appuie, d’une part, et sur la pertinence de la solution proposée par la Cour, d’autre part, soit la nécessité de concilier – par la négociation et dans le respect de la volonté des peuples – démocratie et primauté du droit.
Le septième Congrès québécois de droit constitutionnel aura lieu le vendredi 6 décembre 2013 à la Faculté de droit de l’Université de Montréal et aura pour thème Le Renvoi relatif à la sécession du Québec: ses enseignements et ses suites. Pour tout renseignement : www.aqdc.org ou d@nielturpqc.org.


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