Nomination de Jacques Frémont

Les amis de nos amis ne sont pas toujours des amis...

Chronique de Louis Lapointe

Je l’ai souvent écrit, ce n’est pas le «Quoi» qui importe lors de nominations politiques, c’est le «Qui» ?
Personnellement, il y a longtemps que je sais que je ne serai jamais appelé pour une nomination.
J’ai eu le malheur d'accomplir la tâche de refuser l’admission tardive d’un étudiant dont le père sous-ministre, "un ami du Barreau", est devenu un des plus influents hauts fonctionnaires des deux derniers gouvernements du Parti québécois.
En fait, j’ai refusé "d’influencer", comme on me le demandait, la décision du conseil d’administration de l’École du Barreau et j’ai défendu cette décision lors de toute la chaîne des recours judiciaires et quasi judiciaires portés contre l’École, même si les plus influentes forces politiques internes du Barreau souhaitaient le contraire.
J’ai même eu l’audace de brandir l’article 3.05.09 afin que cesse le harcèlement dont j’étais l’objet. On m’a alors menacé de congédiement si je portais plainte au syndic du Barreau.

3.05.09. a) L’avocat qui occupe une fonction publique ne doit pas (…) tirer profit de sa fonction pour obtenir ou tenter d’obtenir un avantage pour lui-même (…) lorsqu’il sait ou s’il est évident que tel avantage va à l’encontre de l’intérêt public ;
3.05.09. b) L’avocat qui occupe une fonction publique ne doit pas (…) se servir de sa fonction pour influencer ou tenter d’influencer un juge ou un tribunal afin qu’il agisse en sa faveur (…) ;

Comme tout se sait dans les hautes sphères de l’administration publique, j’ai signé mon arrêt de mort professionnel ce jour-là, quittant l’École du Barreau trois ans plus tard en raison d’épuisement professionnel.
J’ai alors été étiqueté pour toujours comme étant un « loose cannon » qui a refusé de suivre les ordres.
J'ai dit «non».
***
Beaucoup de lecteurs de Vigile se sont demandé pourquoi le PQ avait recommandé la nomination de Jacques Frémont au poste de président de la Commission des droits de la personne.
Le «Qui» nous indique qu’il a côtoyé tout au long de sa carrière des gens crédibles associés à la famille du Parti québécois qui ont certainement pu témoigner de sa compétence.
Entre autres, Daniel Turp et Jacques Yvan Morin à la faculté de droit de l’Université de Montréal, Pierre Noreau et Guy Rocher au Centre de recherche en droit public de l’Université de Montréal et Jean-François Lisée au Centre de recherche et d’études de l’Université de Montréal, aujourd'hui au gouvernement.
Le PQ aurait probablement préféré nommer Daniel Turp ou Pierre Noreau à cette fonction, mais comme cette nomination nécessitait un vote unanime de l’Assemblée nationale, le gouvernement a préféré choisir un ami des proches plutôt qu’un proche. Comme Noreau, Turp et Lisée ont probablement soutenu sans réserve cette nomination de Frémont, les jeux du «Qui» étaient alors faits.
Par la suite, en raison de ses brillants états de services, l’ancien doyen et vice-recteur de l’Université de Montréal a pu facilement recevoir l'aval du secrétaire général du gouvernement qui a la responsabilité de l'embauche des plus hauts fonctionnaires de l'État avant d’être unanimement désigné par l’Assemblée nationale.
Compte tenu de mon histoire personnelle, je trouve pour le moins ironique que Jacques Frémont ait tenu tête au gouvernement après être passé à travers tout le processus habituel de nomination...
Les amis de nos amis ne sont pas toujours des amis...soumis.
***
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L'auteur a été avocat, chroniqueur, directeur de l'École du Barreau, cadre universitaire, administrateur d'un établissement du réseau de la santé et des services sociaux et administrateur de fondation.





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2 commentaires

  • Claude Girard Répondre

    24 octobre 2013

    Il semble donc que ce soit encore un coup fourré de JF Lisée, l'omniministre. Deux chums de l'UdeM... Beau résultat!

  • Ouhgo (Hugues) St-Pierre Répondre

    21 octobre 2013

    J'ai souvent remarqué, pour ma part, que les cocus épousent de préférence les femmes adultères.
    Alphonse Allais