(Québec) Nous avons des vaches sacrées au Québec. Le Mouvement Desjardins, Hydro-Québec et la Caisse de dépôt sont les plus connues. Même aujourd'hui, c'est presque une hérésie de remettre en cause ces institutions ou de suggérer la privatisation d'Hydro-Québec, par exemple. Lorsque les dirigeants de ces organismes se présentent en commission parlementaire, on les accueille avec déférence, comme s'ils étaient à l'abri de l'erreur...
C'est justement là, l'erreur!S'il est un fait qui ressort des malheurs actuels de la Caisse de dépôt et placement du Québec, c'est que nos vaches sacrées sont peut-être victimes de leurs succès. Pendant des années, nous nous sommes «pété les bretelles» en vantant leur audace et leur ingéniosité. Serions-nous en train d'apprendre que leur gestion implique également des revers? C'est peut-être le début de la sagesse.
Il est dommage que le débat actuel sur la Caisse de dépôt se limite aux acteurs politiques. Avant de prendre le pouvoir, Jean Charest accusait les péquistes d'avoir dilapidé une partie de notre bas de laine en forçant la Caisse à prendre un rôle plus actif dans le développement économique du Québec. Aujourd'hui, Pauline Marois accuse les libéraux d'avoir dilapidé le même bas de laine en forçant la Caisse à miser sur le rendement. Ces débats politiques sont inévitables, mais ce n'est pas là qu'on aura des réponses et des solutions pour l'avenir.
Il y aura toujours un débat entre les objectifs de rendement ou de développement économique de la Caisse de dépôt. C'est normal. Sous les péquistes, c'est l'achat de Vidéotron et de Montréal Mode qui faisait dire aux libéraux que la Caisse avait cédé à l'interventionnisme de Bernard Landry. Sous les libéraux, ce sont les pertes dans les papiers commerciaux et à la Bourse qui font dire à Pauline Marois que Jean Charest a trop poussé sur le rendement.
À l'évidence, le juste dosage entre ces deux modèles n'est pas facile. Ce ne sont pas les politiciens, aux prises avec des luttes partisanes, qui nous donneront la voie à suivre.
Quand on y pense bien, pourquoi ne pas inviter les anciens gestionnaires de la Caisse, Jean-Claude Scraire et Henri-Paul Rousseau, à venir s'expliquer? Ils ont vécu les deux modèles de gestion. Comme c'est du passé dont il est question actuellement, il serait intéressant de les entendre. «Si ça va mal, vous me reconvoquerez puis vous me donnerez la volée que vous voulez, mais attendez d'avoir les faits avant de dire quoi que ce soit», avait plaidé M. Rousseau lorsqu'il s'était expliqué sur les papiers commerciaux, il y a 15 mois. «Arrêtez de dire que le gouvernement m'a demandé des rendements de fou, ce n'est pas vrai, avait-il ajouté. Ça ne vient pas de là. Ça vient simplement du fait que nos régimes d'assurance et de rentes font face à une démographie qui n'est pas favorable.» Il avait ajouté que la Caisse avait du «rattrapage» à faire, pour garantir les rendements de 7 % exigés par ses actionnaires comme la Régie des rentes ou la CSST. «Ça leur prend ça, selon les calculs actuariels, pour faire face à la musique.»
Bref, la Caisse a erré dans ses efforts pour satisfaire ces attentes. Il sera toujours temps de faire des débats politiques partisans sur le sujet. Mais ce qui importe avant tout, c'est de ne pas répéter les mêmes erreurs. Dans ce contexte, les lumières de MM. Scraire et Rousseau seraient utiles. Le fait que les deux hommes oeuvrent dans le secteur privé ne les exempte en rien de reddition de comptes devant les élus. Et je vous parie qu'ils s'empresseraient de répondre à une invitation des parlementaires.
Qu'est-ce qu'on attend?
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