PARTI QUÉBÉCOIS

Lisée rappelé à l’ordre

Le livre à venir et les prises de position du député sur la charte et Péladeau déplaisent

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Le faux-frère

Le député-blogueur Jean-François Lisée s’est retrouvé dans le collimateur de ses confrères et consoeurs péquistes. Ulcérés par ses derniers coups d’éclat médiatiques, ils lui ont longuement reproché jeudi avant-midi d’avoir brisé le serment de discrétion auquel sont tenus les anciens ministres, en plus d’avoir mis Pierre Karl Péladeau dans une position délicate.

Après avoir été sermonné, le député de Rosemont s’est engagé à remettre au cours de la journée un exemplaire de son Le journal de Lisée : 18 mois de pouvoir, mes combats, mes passion à tous ses collègues. À environ trois semaines de sa sortie en librairie « tout le monde voulait voir le livre ». « C’était unanime », a indiqué une source du Devoir présente lors du caucus péquiste.

Après avoir lu en boucle les quelques lignes ayant filtré dans les médias, les élus péquistes — et tout particulièrement les anciens ministres du gouvernement Marois — craignent le pire. Sylvain Pagé, le président du caucus de l’opposition officielle, a ainsi demandé à M. Lisée de démontrer sa volonté à « travailler en équipe » en levant le voile sur tout le contenu de l’ouvrage à paraître. Celui-ci a acquiescé.

Dans son livre-événement, l’ex-ministre des Relations internationales révèle avoir marqué à plusieurs reprises son opposition à l’égard de la charte de la laïcité auprès de ses collègues. À moins de l’inclusion d’une clause de droits acquis, le député de Rosemont aurait voté contre le projet de loi controversé, quitte à renoncer à ses fonctions ministérielles, écrit-il.

Un ancien ténor du gouvernement Marois reproche à M. Lisée d’avoir brisé le serment de discrétion relatif au secret des délibérations du conseil exécutif afin de se distancier de la charte des valeurs québécoises avant de plonger dans la course à la chefferie du Parti québécois. « Il s’est mis à dos le caucus », a-t-il fait valoir au Devoir.

À première vue, il n’existe aucune punition à infliger à un élu ayant fait entorse à cette convention après avoir quitté le Conseil des ministres, a fait remarquer le secrétaire général de l’Assemblée nationale, Michel Bonsaint, croisé dans les couloirs de l’Assemblée nationale par Le Devoir.

Le député de Lac-Saint-Jean, Alexandre Cloutier, a invité ses collègues à s’abstenir d’« attaqu[er] de plein fouet des propositions ou des positions individuelles qui pourraient avoir été prises au Conseil des ministres » afin de maintenir l’unité au sein du PQ. « Les Québécois s’attendent à ce que les éventuels candidats à la chefferie proposent ce qu’ils jugent être le mieux pour le Québec et laissent tomber les références aux collègues », a-t-il affirmé à La Presse canadienne.

Malgré d’épars appels à l’exclusion de M. Lisée, les élus péquistes forment « un groupe solide », a fait valoir le chef intérimaire, Stéphane Bédard, à la sortie du caucus des élus péquistes. « On est une belle équipe ! »

Le député de Chicoutimi a dit ne « pas encore » avoir pu parcourir le livre. « Nous le lirons. Par la suite, si j’ai des commentaires à faire, je les ferai. Voilà ! » a-t-il ajouté avant de filer vers le Salon bleu.

De son côté, M. Lisée s’est dit heureux d’être avec sa « famille » politique au terme d’une rencontre qui « s’est bien passé ». « Je suis avec mon équipe. […] Je suis content d’être là », a-t-il dit lors d’un bref échange avec des journalistes, avant de gagner à son tour le Salon bleu où il a été appelé, comme tous les autres élus, à se prononcer sur la « motion PKP ». Appelé à commenter durant la journée la teneur des échanges avec ses collègues, il a insisté : « Les discussions du caucus sont confidentielles. Heureusement. »

Motion

Comme prévu, tous les élus de l’Assemblée nationale, à l’exception des députés péquistes, ont adopté la motion, présentée par la Coalition avenir Québec, qui demande au gouvernement de modifier la loi sur le Code d’éthique et de déontologie des parlementaires afin qu’il prévoie « qu’un député, ou un membre de sa famille immédiate ne puissent d’aucune façon détenir directement ou indirectement la majorité des actions ou une position de contrôle dans une entreprise médiatique ».

Le député de Rosemont, Jean-François Lisée, qui a voté contre la motion même s’il avait affirmé trouver problématique la situation de Pierre Karl Péladeau — qualifié de « Berlusconi » à la sauce québécoise par le ministre Gaétan Barrette —, a été ovationné par des libéraux et caquistes moqueurs au moment de son vote.

Or le premier ministre Philippe Couillard a indiqué que « ce n’est pas un projet de loi qui va régler la question », tranchant avec l’attitude va-t-en-guerre de son leader parlementaire, Jean-Marc Fournier. Lors du débat sur la motion mercredi, celui-ci avait indiqué que son gouvernement devait modifier la loi sur le code d’éthique, mais aussi possiblement la Loi sur l’Assemblée nationale et la Loi sur l’exécutif.

« L’enjeu va se régler de façon politique », a dit le premier ministre. Selon lui, le choix revient à Pierre Karl Péladeau. « La réalité politique est telle qu’il devra choisir. Et son choix sera l’objet d’un jugement par les militants du Parti québécois et la population », estime-t-il.

À son avis, il serait « irresponsable » de présenter un projet de loi « où on va s’attaquer mutuellement ». Les lois qui régissent les parlementaires sont adoptées « normalement » à l’unanimité, a rappelé Philippe Couillard. L’unanimité « si possible, parce que sinon ça va finir par un déchirement partisan qui va laisser les citoyens assez amers ».

Les libéraux comptent sur la commission parlementaire, qui portera sur l’indépendance des médias contrôlés par un parlementaire, pour ouvrir les yeux des péquistes sur cette question. « Le débat de démocratie qui se soulève dans la population, je crois qu’il va happer aussi M. Bédard et le PQ », a prédit Jean-Marc Fournier.

Pour le chef de l’opposition péquiste, Stéphane Bédard, les modifications envisagées à la loi « ne visent qu’un seul individu en particulier pour le priver de ses droits démocratiques ». Il estime que « toute modification aux règles déontologiques [des élus] doit faire l’objet d’une unanimité ».


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