Malveillant et brutal

Les décisions et les actes d'un pouvoir en place portent fortement à conséquence: ils signifient à eux seuls l'intention qui les motive.

Les Québécois finiront bien par répliquer _ au mépris des autocrates canadian


Le 25 juillet dernier, la directrice du Festival international de littérature (FIL), Michelle Corbeil, était avisée par une lettre de Patrimoine canadien qu'on lui refusait l'octroi d'une subvention de 65 000 $. Moins de deux mois avant l'ouverture de la 17e édition! Et ce, sans la moindre explication. Car ce que déclare, par l'intermédiaire de son attaché de presse, le ministre James Moore, que «le nombre total de demandes dépasse largement les fonds disponibles» et qu'on «doit faire des choix» ne saurait en tenir lieu: pas le moindre critère de sélection n'est invoqué. La décision relève donc entièrement de l'arbitraire, c'est-à-dire du bon plaisir du prince. Le ministre pousse le mépris et l'arrogance jusqu'à refuser de rencontrer la directrice du FIL: un monarque n'a pas à rendre de comptes à ses sujets.
On ne peut dénier au FIL sa remarquable réussite et la qualité de sa gestion (59 % de ses revenus sont autonomes). Ne s'agit-il pas là de «résultats mesurables et tangibles» comme on l'écrit dans la lettre envoyée à Michelle Corbeil? Le baratin ministériel ne veut rien dire, et cette «insignifiance» est à l'évidence l'effet recherché selon un dessein sans doute moins avouable.
Les décisions et les actes d'un pouvoir en place portent fortement à conséquence: ils signifient à eux seuls l'intention qui les motive. Le ministre sait parfaitement que couper à la dernière minute sa subvention au FIL équivaut à un acte de sabotage. Ce n'est pas le premier, et la liste s'allonge désormais à un point tel qu'il faudrait se boucher les yeux pour ne pas voir là, bien que mesurée au seuil de tolérance des citoyens, une politique d'assaut délibérée contre ce que la culture génère comme des espaces de libre création, grâce auxquels, on ne doit pas l'oublier, des auditeurs ou des spectateurs trouvent ressource pour stimuler leur appétit de liberté et de lucidité. Mais le clan au pouvoir à Ottawa semble promouvoir une autre conception de la culture: «sportive», militariste et bitumineuse.
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Paul Chamberland, le 8 septembre 2011


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