ANNABELLE BLAIS - Depuis les débuts du Parti québécois (PQ), la direction du parti détourne le projet indépendantiste au profit d’ambition électoraliste. De René Lévesque à Pauline Marois, le livre de Me Pierre Cloutier démontre comment le PQ a trahi ses militants. Métro a rencontré l’auteur, un avocat à la retraite et militant au sein du parti pendant 35 ans.
Depuis la fondation du PQ en 1968, plusieurs mesures pour atteindre l’indépendance du Québec ont été votées lors des congrès du parti. Et pourtant, plusieurs chefs ne respectent pas ces dispositions. Comment expliquez-vous cela?
Le PQ, comme n’importe quelle organisation politique, est une organisation pyramidale. Une fois au sommet, une personne possède le langage, la culture du parti, et surtout un réseau, ce qui lui permet de faire ce qu’elle veut. Il y a un déficit démocratique.
Quel chef a fait le plus mal au PQ?
Pauline Marois. En 2005, pour la première fois en 40 ans dans l’histoire du PQ, on demandait à toutes les instances du PQ de préparer et de présenter un projet de pays à la prochaine élection et Bernard Landry, qui était chef, était d’accord.
Landry a démissionné et le chef suivant, André Boisclair, n’a pas préparé le projet de pays, mais un programme électoral provincial. C’est comme inviter quelqu’un à souper sans lui préparer le repas. Pauline a fait pire que ça. Elle a décidé de changer le programme. Le but n’était plus de réaliser la souveraineté, mais de défendre les intérêts du Québec en attendant un référendum. Elle a envoyé le projet de pays à la poubelle et le référendum dans les limbes.
Le seul qui n’a pas violé le programme est Landry. Déjà en 1973, René Lévesque a décidé qu’un vote pour le PQ n’était pas un vote pour l’Indépendance, mais pour un bon gouvernement. On se retrouve dans une situation ou en 42 ans, ils [les chefs] n’ont jamais mis un projet de pays sur la table. C’est quand même extraordinaire!
De quoi a peur le PQ?
Ils veulent se faire élire. À partir du moment qu’ils sont députés, c’est une carrière pour eux. Après ils rêvent d’être ministres et comme Pauline, ils rêvent d’être premier ministre du Québec. Pour se faire élire, ils émoussent leurs positions, font des promesses électorales provinciales plutôt que des promesses sur l’indépendance.
Peut-on blâmer Mme Marois de ne pas mettre de l’avant l’indépendance alors que François Legault, ancien péquiste, qui met la question de côté avec la CAQ, mène dans les sondages?
Il y a tellement une soif de changement chez le peuple, que François Legault apparaît comme une nouveauté. Regardez ce qui s’est passé au fédéral avec le NDP, ils [les Québécois] ont élu 58 poteaux au Québec, car ils s’imaginent que c’est le changement. Les gens indépendantistes doivent avoir le courage de se présenter à une élection en disant : « si vous votez pour moi, on fait l’indépendance ». Point final. C’est LE vrai changement. Sinon, ce ne sont que des changements cosmétiques.
Pensez-vous qu’une majorité de Québécois souhaitent l’indépendance du Québec?
Oui. En 2005, 54 % des gens souhaitaient la souveraineté et aujourd’hui, malgré tous les problèmes du PQ, l’option est encore à 43%. C’est le double du taux de popularité du PQ. La seule façon de rendre l’indépendance attrayante c’est de faire une démonstration du pays. De montrer aux citoyens ce qu’il y aura de concret et d’emballant dans ce projet. Il faut sortir de l’abstraction de la souveraineté ronronnante et mollassonne. Ce sont des discours de politicien. Il ne faut pas avoir peur de parler d’indépendance.
Quelles sont les chances que l’indépendance soit un thème du PQ au cours de la campagne de 2012?
Zéro chance. Ils vont en parler de façon cosmétique, d’un référendum dans la semaine des quatre jeudis.
Y a-t-il une personne dans le paysage politique actuel qui peut défendre l’indépendance?
Jean-Martin Aussant est très rafraichissant. Je suis optimiste. Il y a des gens comme lui qui sont capables de mettre le pays en avant en étant transparents. De gros canons peuvent encore se joindre à lui.
Indépendance : Le PQ a trahi ses militants, éditions Scheider
Souveraineté - entrevue avec Pierre Cloutier
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