Avant-hier, Pierre Falardeau sont morts du cancer. N'ayez crainte, je ne fais pas d'erreur de français et je ne massacre pas ma langue. J'écris «sont» de façon délibérée.
UN ARTISTE MULTIPLE
Car il y avait plusieurs Pierre Falardeau.
Le cinéaste, fan de Gillo Pontecorvo (La bataille d'Alger), qui nous a donné deux films de combat mémorables: Octobre et 15 février 1839.
L'ethnologue, émule de Jean Rouch (Moi, un Noir), qui, avec Speak White, Pea Soup et Le temps des bouffons, a jeté un regard sans concession sur l'aliénation révoltante des pauvres et l'arrogance grotesque des riches.
Le satiriste populiste, qui, tel que le Pasolini du Décaméron et des Contes de Canterbury, n'hésitait pas à sombrer dans la scatologie pour faire passer son message (voir Elvis Gratton 3: Miracle à Memphis, une farce «hénaurme» qui se terminait dans un déluge de merde).
Et le militant nationaliste qui déchirait sa chemise et crachait son fiel dès que quelqu'un osait remettre en question la pertinence du projet souverainiste.
Si je vais m'ennuyer des trois premiers Pierre Falardeau, je dois dire en toute franchise et en toute honnêteté (deux valeurs qui tenaient particulièrement à coeur à l'auteur de La liberté n'est pas une marque de yogourt) que le quatrième ne me manquera pas une seconde.
UN OBSTACLE À LA CAUSE
Car, au risque de me faire lancer des pierres par ses amis patriotes, je suis de ceux qui croient que le nationalisme revanchard de Pierre Falardeau, loin d'aider la cause séparatiste, lui a au contraire beaucoup nui.
Avec sa fâcheuse propension à insulter tous ceux qui ne pensaient pas comme lui et à voir dans chaque souverainiste mou (ou dans chaque fédéraliste dur) un fossoyeur de la nation et un ennemi mortel du Québec, le père d'Elvis Gratton apportait de l'eau au moulin de tous ceux qui associent automatiquement indépendance et intolérance, nationalisme et racisme.
Les indépendantistes avaient beau avancer les meilleurs arguments pour vanter les mérites de leur cause, il suffisait pour les Jan Wong de ce monde de sortir le dernier chapelet d'insultes que Falardeau venait de proférer à la télé pour discréditer le combat du PQ et faire passer les tenants du Oui pour une bande d'hystériques.
LA HAINE
Vous trouvez ma chronique dure? À côté de la lettre immonde que Falardeau a écrite au lendemain de la mort de Claude Ryan (un ramassis d'insultes qui se terminait par un «Salut, pourriture» impardonnable, qui avait fait honte à tous les militants indépendantistes), mes critiques sont douces et empreintes de décence.
J'ai rencontré Pierre Falardeau à de nombreuses reprises. En personne, il était l'être le plus attachant du monde. Poli, timide, drôle, capable de vous réciter l'oeuvre complète de Gaston Miron, une larme au coin des yeux. Mais dès que le sujet de l'indépendance du Québec se pointait le bout du drapeau, je ne sais pas ce qui se passait, mais les fils se touchaient, les «gaskets» sautaient et l'intellectuel érudit se transformait en chef guerrier.
Tout juste s'il n'avait pas de l'écume sur le bord des lèvres.
LA FIN D'UNE ÉPOQUE
Falardeau est mort après un combat courageux contre le cancer.
Ses films, j'en suis convaincu, traverseront le temps. Mais, j'espère que cette façon particulièrement odieuse et contreproductive de combattre les adversaires de l'indépendance du Québec sera enterrée avec lui.
Car, la haine, le mépris et la colère sont les pires moteurs que l'on puisse imaginer pour faire avancer une cause.
----
Un déluge d'insultes
29/09/2009
Dimanche, dans ma chronique, j'ai dit que si je respectais beaucoup Falardeau le cinéaste, le militant nationaliste me plaisait moins.
Je n'aimais ni son intolérance, ni sa fâcheuse habitude d'insulter ceux qui ne pensaient pas comme lui.
LA RAGE
Cette critique m'a valu de nombreux compliments de ses fans:
«Crétin», «traître», «lâche», «ignorant», «dégoûtant personnage», «fédéralisse», «pourriture», «médiocre», «hypocrite», «nombriliste», etc.
Que les militants indépendantistes qui déplorent la disparition du «dernier esprit libre du Québec» se consolent: d'autres grands intellectuels semblent prêts à reprendre le flambeau et à marcher dans les pas du grand Timonier, au grand plaisir des défenseurs du fédéralisme, qui adorent associer «indépendance» et «intolérance».
UN ENNEMI DE LA CAUSE
Heureusement, les gens qui ont réagi à ma chronique n'ont pas tous l'écume aux lèvres. Prenez cette lettre de Gui Lavoie:
«J'étais indépendantiste bien avant Falardeau (je le suis toujours), et j'ai toujours été en désaccord avec sa façon immonde de terrasser ceux qu'il considérait comme des adversaires.
«Je pense que Falardeau a beaucoup nui à la cause indépendantiste en s'associant à des groupes fascistes et néo-felquistes qui prônent la division et attisent notre goût pour la victimisation.
«Je déplore à l'avance le fait que d'autres essaieront de le remplacer ou, pire, de l'imiter.»
Vous ne pensiez pas si bien dire, monsieur Lavoie!
Cela dit, il est quand même intéressant de voir que Falardeau avait le droit de chier sur le cadavre encore chaud de Claude Ryan, mais que personne n'a le droit d'émettre le moindre petit bémol au lendemain de son décès.
Ça en dit long sur les valeurs «humanistes» qui motivent ses adeptes...
UN RÉGIME, S'IL VOUS PLAÎT !
Parlons d'économie, maintenant.
Le gouvernement Charest s'apprête à hausser les tarifs des différents services publics offerts par l'État: hydroélectricité, frais de scolarité, postes de péage, nouvelles taxes sur l'alcool et la malbouffe - mettez-en, c'est pas de l'onguent.
Puis-je poser une petite question?
Avant de nous presser une fois de plus comme des citrons, et de gruger encore plus notre chèque de paie, pourquoi n'essaie-t-on pas de réduire la taille de l'État?
Après tout, quand le prix de l'essence grimpe, on change notre gros char pour un petit, non?
Pourquoi ne ferait-on pas de même avec l'appareil gouvernemental?
GROS JAMBON
C'est bien beau, payer davantage, mais je ne sais pas pourquoi je délierais les cordons de ma bourse pour donner un salaire à des fonctionnaires et à des bureaucrates qui se pognent le beigne à quatre mains en actualisant leur statut Facebook.
Les médecins disent que l'obésité constitue la plus grande menace à notre santé. Que dire de l'obésité de l'État?
L'État québécois est tellement gros que des départements entiers se cachent sous ses bourrelets! Vous levez un pli, et vous trouvez cent fonctionnaires!
Ne me dites pas qu'on ne pourrait pas le faire maigrir, le sacrer dans un sauna ou l'envoyer chez Weight Watchers!
LA FAUTE DES ANGLAIS
Selon Falardeau, tous les problèmes qui accablaient le Québec étaient causés par les maudits Anglais d'Ottawa.
C'est de la faute des maudits Anglais si notre service de santé est tout croche, si le CHUM ne va ouvrir ses portes qu'en 2018, si nos jeunes ne connaissent rien à l'Histoire, si on ne sait plus écrire, si notre système d'éducation est plein de trous, si notre État est obèse et si on croule sous les structures?
Poser la question, c'est y répondre.
----
«Ce n'est pas la même chose»
05/10/2009 08h07
Certaines personnes m'ont roulé dans la boue cette semaine pour avoir OSÉ critiquer l'intolérance crasse de Pierre Falardeau au lendemain de son décès.
«C'est dégueulasse, m'a écrit une dame. On ne fait pas ça à un homme qui vient de mourir.»
Et Falardeau qui avait traité Claude Ryan de pourriture et de vidange au lendemain de son décès, c'était correct, ça?
C'était acceptable?
«Ce n'est pas la même chose, car Ryan était vraiment une pourriture», m'a répondu un indépendantiste.
Wow. C'est toute une réflexion, ça, mon homme! Avec des bolles comme toi, c'est à se demander pourquoi l'option indépendantiste ne fait pas des bonds de géant...
LES DEUX PÉDOS
C'est toujours la même histoire.
Quand un ami de la go-gauche fait des bêtises, il faut balayer son crime sous le tapis et défendre sa réputation coûte que coûte. Mais quand une personne associée à la droite fait la même chose, c'est une vermine qu'il faut punir et dénoncer.
Un prêtre catholique viole un enfant de 13 ans? C'est un déviant sexuel qu'il faut emprisonner pour le reste de ses jours.
Un cinéaste européen fuit la justice après avoir violé une fillette de 13 ans? C'est une victime du puritanisme américain qu'il faut défendre et protéger.
Les deux hommes ont commis EXACTEMENT le même crime. Mais l'un (qui a la mauvaise idée de porter un col romain) est un écoeurant fini, alors que l'autre (qui a la bénédiction du clergé intellectuel et artistique) est un pauvre martyr persécuté.
LES DEUX MENTEURS
Idem pour Michael Moore.
Le réalisateur de Sicko et de Capitalism: A Love Story est connu pour travestir la réalité. Ses films sont bourrés de mensonges honteux et d'approximations douteuses. Mais ça ne fait rien, car il est «du bon bord». C'est un pamphlétaire, et un pamphlétaire n'est pas censé respecter les faits.
Mais dès qu'un réalisateur que l'on considère «à la solde des médias de droite» utilise le même stratagème, on dénonce ses méthodes et on voue son film aux gémonies.
Pourquoi? C'est le même crime, non? La même mythomanie, la même malhonnêteté?
LA FIN ET LES MOYENS
Eh bien non. Voyez-vous, dans le merveilleux monde de la go-gauche, la fin justifie les moyens.
Des fédéralistes qui insultent des séparatistes, c'est inacceptable, mais des séparatistes qui insultent des fédéralistes, c'est correct. Des cadres qui harcèlent des travailleurs, c'est inacceptable, mais des travailleurs qui harcèlent des cadres, c'est correct.
Des employés qui paralysent une entreprise par une grève, c'est correct, mais un patron qui déclare un lock-out, c'est inacceptable.
Cela, même si ces deux «outils» (la grève ET le lock-out) sont tous les deux légaux et protégés par le Code du travail.
Ça ne fait rien: TOUT ce que les travailleurs font est défendable et TOUT ce que les patrons font est abject.
Pourquoi? Mais parce que les patrons sont tous des trous du cul, voyons! Vous ne le saviez pas?
À BAS LES ÉGLISES
Je sais que mes prises de position en choquent plusieurs. Je m'en fous. Je vais continuer à dire franchement ce que je pense, que cela m'attire des insultes ou pas.
Je déteste les églises -TOUTES les églises, qu'elles soient laïques ou non.
Un pédophile est un pédophile, qu'il soit artiste ou pas. Un menteur est un menteur, qu'il soit de gauche ou de droite. Et un harceleur est un harceleur, qu'il soit employé ou patron.
Laissez un commentaire Votre adresse courriel ne sera pas publiée.
Veuillez vous connecter afin de laisser un commentaire.
Aucun commentaire trouvé