Pendant que Zelaya risque sa vie, Radio Canada met la priorité sur Barbie

Tribune libre

Pendant que Zelaya risque sa vie, Radio Canada met la priorité sur Barbie
Pendant que l'Amérique latine vit une crise, Radio Canada préfère nous présenter les 50 ans de Barbie plutôt que nous informer sur les événements en cours en Amérique centrale.
C'est tout de même hallucinant!
En effet, on nous a annoncé que demain, l'émission hebdomadaire de grands reportages et d'actualité qui met à profit les reporters «sur le terrain», «partout dans le monde», Dimanche Magazine [1], nous présentera un reportage «spécial» sur les 50 ans de Barbie (suivi d'un reportage culinaire [La venue d'une nouvelle cuisine québécoise.] ainsi que le retour de la police autochtone). Il semble qu'on ne dira mot sur la crise démocratique qui sévit au Honduras.
De plus, il semble que «LE» spécialiste de l'Amérique latine, Jean-Michel Leprince, ait été mis à la retraite (probablement en vacances).
La situation est déplorable. Jamais un événement de cette importance n'a été si peu couvert par «nos» journalistes radio-canadiens. Le régime Harper qui ferme peu à peu Radio Canada pour éliminer cette précieuse (jadis) source d'information semble avoir déjà atteint, en bonne partie, son but. La qualité de l'information de «notre» société d'État se dégrade à vue d'œil. On en arrive même à conclure que sa fermeture ne serait pas une "grosse perte" pour l'information et pour la survie de notre culture.
Il n'y a qu'à voir la qualité des discussions offertes sur les pages d'information pour constater que Radio Canada a totalement glissé vers le genre "Radio poubelle".
Comme aucune information approfondie n'est livrée, le niveau des discussions est au plus bas. Radio Canada nous sert des repiquages d'Agences de presse internationales (surtout AFP). La DÉSINFORMATION (le pourquoi de la crise) et la SUPERFICIALITÉ associée à l'anonymat des signataires de discussions (favorisé par Radio Canada) alimente le préjugé et une forme de stupidité dont les radios poubelles nous ont malheureusement habituées. Radio Canada qui se targue d'avoir une «nétiquette» pour maintenir la qualité (sic) des propos, se sert de ce règlement pour faire de la censure (mes propos sont régulièrement censurés). À lire l'information et les commentaires qui en découlent, les René Mailhot, Louis Martin et René Lévesque doivent se retourner dans leur tombe en se bouchant les yeux et les oreilles pour ne pas voir et entendre à quel point la qualité de «leur» institution s'est dégradée.
Pendant que Radio Canada nous parle de Barbie (est-ce un reportage financé par Mattel?), l'Amérique latine vit la pire crise démocratique de son Histoire récente. En effet, présentement un président ÉLU et soutenu par la population (ainsi que par la communauté internationale) tente de rentrer dans son pays. Sa liberté et même sa vie sont en péril. L'événement est hors du commun et dépasse largement la simple fraude électorale.
Les événements se déroulant présentement au Honduras peuvent se dérouler partout en Amérique latine. Partout où les gouvernements progressistes abaisseront leur niveau de vigilance.
Radio Canada aurait dû rapidement mettre à la disposition du public, un dossier pouvant nous permettre d'approfondir l'Histoire et l'actualité de l'Amérique centrale en général et du Honduras en particulier.
On s'entête plutôt à maintenir la cause iranienne en premier plan en lui accordant une visibilité démesurée par rapport à l'importance de sa "crise" (en bonne partie fabriquée médiatiquement, nous verrons dans six mois).
Honduras, retour sur les événements.
Le 28 juin, aux premières lueurs du jour, des militaires masqués (cagoules) forcent l'entrée de la résidence du Président à l'aide de salves de mitraillettes. La demeure du Président est rapidement envahie et saccagée. Le Président est arrêté brutalement. On ne lui permet même pas de se vêtir et on l'entraîne hors de son habitation pour aller le mettre dans un avion. Aucune information ne lui est donnée, ni pour son arrestation illégale, ni pour la destination vers laquelle on l'expulse.
C'est un Coup d'État.
Il y avait longtemps qu'un Coup d'État avait eu lieu en Amérique centrale. Le dernier en Amérique latine fut au Venezuela le 11 avril 2002. Le Coup d'État échoua après 48 heures de pouvoir putschiste. La population qui avait sorti massivement dans les rues aidées par une forte partie de l'armée refusant les ordres des putschistes a rapidement permis à Hugo Chávez de reprendre les rênes du pouvoir qu'il avait acquis démocratiquement.
Dans la nuit du 29 juin, j'écrivais:
« J'AI PEUR QU'ON NOUS EXPLIQUE TOUT LE BIEN-FONDÉ DE CE COUP D'ÉTAT » [2]
Effectivement, mes peurs se sont malheureusement "réalisées ".
On nous a expliqué la "légalité" (sic) de ce geste foulant au pied la démocratie. La légalité (sic) de l'armée cagoulée qui arrête et expulse en pyjama un Président ÉLU. Puis on s'est appliquée à l'aide d'une bonne dose de désinformation, de nous présenter le Président ÉLU comme coupable d'un manquement à la constitution et en lui attribuant de façon diffamatoire des intentions sournoises et allant à l'encontre du bien-être de la population.
Depuis 28 jours la population hondurienne réclame le retour de la démocratie et le retour de son Président ÉLU. Depuis 28 jours, la censure sévit au Honduras, depuis 28 jours les couvre-feux briment les libertés individuelles, depuis 28 jours la population risque sa vie face aux mitraillettes pointées sur elle.
Malgré l'unanimité de l'ALBA, du groupe de Rio, du CARICOM, de l'OEA, de l'UE et de l'ONU [3], bref l'unanimité mondiale, les médias ont persisté à nous présenter le Président ÉLU comme étant fautif et coupable d'un coup fourré.
Une DÉSINFORMATION sans précédent s'enclenche.
Le clergé oligarchique hondurien lance le bal (les évêques étaient aussi présents à Miraflorès au Venezuela lors de l'auto-assermentation de Pedro Carmona en avril 2002 [4] )
« la Conférence épiscopale du Honduras, ouvertement hostile à son projet de prolongation de mandat, lui a demandé de renoncer à rentrer dimanche pour éviter un « bain de sang ».
Depuis, nous assistons à une campagne de DÉSINFORMATION constante et soutenue. Quotidiennement depuis 28 jours, dans pratiquement tous les communiqués et toutes les nouvelles concernant la crise démocratique du Honduras, on dit et répète que Zelaya voulait illégalement prolonger son mandat. Ce qui est un grossier mensonge.
La technique du nazi Goebbels consistant à faire d'un mensonge une vérité en le répétant plusieurs fois est mise à profit. Depuis le 28 juin, nous avons pu lire et entendre des centaines de fois que Zelaya a été renversé parce qu'il voulait prolonger son mandat.
Je dois encore préciser ce que le bulletin devant servir à la consultation populaire prévue le jour du renversement par les armes du Président ÉLU, Manuel Zelaya, disait :
Pour voir le bulletin de votation prévu pour cette consultation:
http://img20.imageshack.us/img20/2605/encuestan.jpg
« Êtes-vous d’accord qu’aux prochaines élections générales de 2009, une 4e urne soit installée pour permettre au peuple de se prononcer sur la convocation (création) d’une assemblée nationale constituante ? OUI ou NON »
C'est-à-dire que les élections prévues en novembre et servant à élire le nouveau Président (1) (Zelaya ne se pouvait pas se présenter), les députés (2) (législative), et les représentants locaux (3) (mairies, alcaldias) pourraient inclure une QUATRIÈME urne. Si la population disait OUI lors de la consultation prévue le 28 juin, il y aurait eu une QUATRIÈME (4e) urne qui aurait servi à savoir si la population désirait la création d'une assemblée constituante pour réviser la constitution.
Cette révision aurait été faite pendant de nombreux mois et proposée par référendum à la population pour son acceptation éventuelle.
La consultation populaire prévue le 28 juin dernier était uniquement "consultative" et "non-contraignantes". C'est-à-dire qu'absolument rien ne changeait dans la constitution du pays, ni dans la durée du mandat du Président Zelaya.
La dictature met des vies en jeu.
Aujourd'hui, le Président ÉLU, Manuel Zelaya, est à la frontière de son pays. Les États-Unis (H. Clinton) et le Canada disent être contre l'idée du Président ÉLU, Zelaya, de rentrer chez lui. On le tient responsable des violences qui peuvent surgir de son initiative.
Zelaya qui a été expulsé illégalement à la pointe des mitraillettes par des gens cagoulés entre dans son pays, sans armes, en invitant ses concitoyens à manifester pacifiquement (Zelaya un partisan de la non-violence de Gandhi) est considéré comme le responsable de la possible violence. C'est le monde à l'envers.
Au lieu de mettre en garde la dictature et de les menacer de représailles si ses sbires font un carnage, on fait la leçon au Président ÉLU qui a le courage d'affronter, à mains nues, une armée de putschistes.
Pendant que Zelaya risque sa vie et que plusieurs de ses partisans risquent aussi leur vie pour le retour de la démocratie, Radio Canada nous parle de Barbie.
Comment expliquer une telle aberration?
Serge Charbonneau
Québec
[1] http://www.radio-canada.ca/actualite/v2/dimanchemag/index.shtml
[2] « Une leçon de démocratie »
http://www.ledevoir.com/2009/06/29/commentaires/0906290257747.html
[3] Vidéo de l'acceptation de la résolution de l'ONU condamnant unanimement (192 pays) le Coup d'État et discours de Zelaya devant l'Assemblée générale des Nations Unies.
http://www.radiomundial.com.ve/yvke/noticia.php?27505
[4] «Lors de la prise de pouvoir du nouveau président, un décret est signé qui abolit toutes les instances démocratiques légitimement élues et instaure un pouvoir dictatorial ; il est signé en premier par le Cardinal Velasco de Caracas»
http://www.alterinfos.org/spip.php?article1346
«Il s'agissait d'instaurer un pouvoir dictatorial abolissant toutes les instances légitimement élues. Le mouvement était mené par les grands patrons vénézuéliens, avec l'appui d'autres personnalités dont le Cardinal Vélasco de Caracas»
http://pagesperso-orange.fr/fpf/prieres/sem2002/s39.html
Implication du clergé dans les Coups d'État:
«Manuel du parfait coup d’État en Amérique latine»
http://www.oulala.net/Portail/spip.php?article440


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4 commentaires

  • Laurent Desbois Répondre

    26 juillet 2009

    Et dire que les libéraux ont choisi d'appuyer ce type de gouvernance et lui laisser le pouvoir!
    Déplorable!
    Ce n’est pas une affaire de libéral vs conservateur ! C’est du pareil au même !
    Le vrai problème c’est que le canada anglais n’a pas besoin de CBC… Ils sont plus à l’aise avec NBC et ABC. Les cotes d’écoute le confirment!!!
    Ce n’est que le vrai visage du Canada qui sort en plein jour.

  • Marcel Haché Répondre

    26 juillet 2009

    Si le gouvernement américain ne réagit pas fort au remplacement de la démocratie par un semblant de démocratie au Honduras, par quelque chose qui va rapidement montrer son visage de dictature, c’est que les gouvernements américains, quels qu’ils soient, prennent leurs aises avec la démocratie elle-même. À une époque récente, une élection de G.W.Bush avait été quelque chose de pas très glorieux.

    Pas certain que Barak Obama y changera beaucoup. Rien n’est moins sûr.
    Le monde « latino » semble bouger en direction de plus de démocratie par le moyen du référendum. Cela réfère alors rapidement aux affaires constitutionnelles. Le monde politique anglo-saxon est pour le moins circonspect, pour ne pas dire étranger, aux affaires constitutionnelles.
    Mais vrai aussi que Barak Obama est un spécialiste de la constitution. C’est lui, pas encore élu, qui avait dénoncé le référendum voulu par le président Tandja, du Niger, qui voulait par là prolonger ses possibilités de mandat, ce que lui interdisait la constitution. Les putschistes du Honduras ont peut-être vu là un signal…à prendre au vol.
    Il sera intéressant de voir si le regard de Barak Obama, qui porte aussi loin que les pays africains, pourra porter aussi près que le Honduras, qui est dans la cour des États-Unis.
    Et si le Honduras est dans la cour américaine, où serait donc maintenant, éventuellement aussi, le Québec et le Canada ?
    Vous pouvez compter sur Radio tralala pour appuyer discrètement partout, tous les mouvements, partis et gouvernements, qui luttent contre les mouvements « séparatistes », les peuples en « minorité », en difficulté, leur propre peuple même, et pour nous susurrer que partout en Europe, les nationalismes sont travaillés « fatalement » par le facisme.
    Radio tralala est en mission : celle que lui avait rêvée Réal Caouette, lui-même un grand canadien-français…


  • Archives de Vigile Répondre

    26 juillet 2009

    "Comment expliquer une telle aberration ?" dites-vous ?
    Depuis qu'ils ont mis en ondes (et quotidiennement en plus) leur propre Barbie....(i.e. Lisa Frulla)et son émule, Marie Grégoire.
    "Aberration" vous dites ? le mot est faible.

  • Archives de Vigile Répondre

    25 juillet 2009

    Le seul intérêt à aller visiter Gesca, Québécor média, Le Devoir, Radio Canada, c'est pour y analyser le travail de désinformation.
    Le reste c'est chiens écrasés, info-commerciaux, potinages, le cancer provoqué par l'épaisseur du papier de toilette, et la "petite politique" à scandales.
    Il y a tellement d'excellents médias indépendants en ligne, partout dans le monde.
    Réseau Voltaire, American Free Press, etc...
    Et des centaines de blogues.
    Michel Collon l'Info Décodée
    La Banlieue S'exprime
    Union Populaire Républicaine
    Etc.. etc...