Pourquoi Wallons et Québécois échouent jusqu'ici

Chronique de José Fontaine

Christophe Traisnel a résumé l'échec wallon et l'échec québécois dans sa thèse de doctorat Le nationalisme de contestation, Le rôle des mouvements nationalistes dans la construction politique des identités wallonnes et québécoise en Belgique et au Canada défendue en 2005 à Paris et Montréal.
1) « En Wallonie, le mouvement wallon (...) peine à convaincre une population wallonne sceptique quand à l’existence d’une identité wallonne qui viendrait justifier l’existence d’une telle région, et méfiante vis-à-vis de toute forme de nationalisme. »
2) « Les souverainistes n’ont pas encore réussi à convaincre une forte majorité de Québécois d’accepter la lecture particulière qu’ils ont de l’identité québécoise et la perspective qu’elle suppose… », soit l'indépendance sous-entend Traisnel.
Un scepticisme (Wallonie) et un manque de moyens (Québec)
L'étrange c'est que malgré le scepticisme de la population wallonne, en dépit de la forte orientation belgicaine d'une majorité de la classe politique, demeurent en Wallonie des associations puissantes (les syndicats socialistes en tout premier lieu mais pas seulement), qui gardent l'espoir d'une Wallonie plus autonome et ne partagent pas le scepticisme des autres Wallons. Et, surtout! surtout! qu'existe une Wallonie qui peut être en fait considérée dans le domaine de ses compétences, comme un Etat souverain. Entendons-nous bien! Elle n'est pas considérée comme telle (même pas par ses dirigeants), mais pourrait l'être selon le Bruxellois Vincent de Coorebyter (auteur qui est pourtant à cent lieues de mes espoirs et dont le Centre d'études semble même avoir laissé tomber la Wallonie) : « Dans l'exercice de leurs compétences, les Communautés et les Régions sont souveraines. Exactement comme un Etat est tout à fait indépendant dans sa sphère de souveraineté, même s'il est par ailleurs membre d'une confédération. » Comme la Flandre veut plus d'autonomie, ses demandes trouvent des échos en pays wallon où la minorité autonomiste ou indépendantiste est peut-être, comme le montre ce sondage une forte minorité cependant moins forte que la forte minorité bruxello-belgicaine.

L'étrange c'est que malgré son profil de nation formée, avec son immense territoire sur la carte du monde qui lui donne une visibilité dont rêveraient bien des pays souverains, avec, comme récemment, sa capacité de réagir comme une nation en quelque sorte ordinaire et reconnue comme telle, même sur des questions sociales n'engageant pas nécessairement la question de l'indépendance (comme la récente grève étudiante), le Québec est encore, scandaleusement, sans véritable capacité forte et incontestée d'agir sur le plan international, de signer des traités sans veto possible d'Ottawa, de siéger dans les institutions internationales, d'y présider, comme s'il s'agissait d'un Etat souverain, des réunions de ministres et de chefs de gouvernement, de posséder un droit de veto parlementaire sur tous les accords signés par le Canada. Bref, tout ce que la Wallonie, elle, peut et fait, mais en s'en cachant le plus possible ce qui, l'essence du politique étant ce qu'elle est, annihile en partie ces réalités non assumées au bénéfice du roi, du passé, d'Elio Di Rupo et de sa Belgique qui a ruiné la Wallonie, mais à qui il va demander, par contre, de lui construire une gare inutile (et laide) en son Comté de Mons.
Le Québec avec les institutions wallonnes, la Wallonie avec le profil national de Québec
En Wallonie s'applique au sens fort, depuis 1993 « le prolongement international des compétences internes du Québec » que voulait dès 1965 Paul Gérin-Lajoie. Les dirigeants wallons tentent en fin de compte de le cacher par peur de la partie de l'opinion publique qui a elle-même peur de la liberté, même de celle qu'elle possède déjà (et d'ailleurs on ne peut jamais avoir peur que de la liberté que l'on détient, à supposer que la liberté soit quelque chose qui se possède, ce qui n'est pas le cas, mais on me comprendra).
Imaginons la Wallonie avec le profil national du Québec : même dans le cadre de l'Union européenne, même dans le cadre théorique d'une Belgique restreinte à une vague confédération, elle serait considérée comme indépendante et comme un pays souverain (ce qu'elle est pourtant à bien des égards).
Imaginons le Québec avec les capacités effectivement possédées par la Wallonie, ses dirigeants sauraient par les gestes forts à poser qui sont l'essence du politique se faire reconnaître comme l'interlocuteur international exclusif pour cette partie du Canada. Et rompre avec lui quand il le faudrait.

Pourquoi nous échouons
Ce qui bloque le Québec, au fond, c'est l'hostilité de sa minorité anglophone privilégiée qui, avec quelque 20% représente une sorte de minorité de blocage qui a fait échouer tous les référendums sur l'indépendance. Une minorité qui bloque est légitime.
Mais si elle ne fait qu'empêcher et détruire, elle pose une fameuse question.
Ce qui bloque la Wallonie, c'est le groupe de francophones qui habitent la capitale belge et qui constitue aussi quelque 20% de l'ensemble des francophones dans la Communauté française de Belgique (Wallonie et Bruxelles). Ils ne se retrouvent pas plus dans la Wallonie que les anglophones québécois ne se retrouvent dans le projet québécois d'indépendance.
Cette minorité a beau être une minorité, elle donne le ton à tout ce qui se décide en Belgique francophone, dirige à peu près tous les médias, contribuera longtemps encore, par sa vision du monde pas nécessairement hostile à la Wallonie, mais ignorante du tort immense qu'elle lui inflige (symboliquement mais aussi politiquement, économiquement), à hypothéquer (pour reprendre les mots de Traisnel) «l’existence d’une identité wallonne» qui justifierait la Wallonie. Peu importe que la Wallonie brille dans des domaines comme le cinéma, la littérature, la musique, les sciences, peu importe que son histoire sociale douloureuse, tragique et courageuse soit celle d'une nation, la métropole bruxelloise est en position d'exclure tout cela parce qu'elle a le tort de considérer que sans des Wallons réduits à leur identité belge elle est perdue. Pour que vive symboliquement Bruxelles, il faut donc que les Wallons n'existent pas.
Ils le resteront donc des Belges francophones du Sud-du-pays même quand la Wallonie disposera de 60, 70, 80 % des compétences étatiques. Le pays wallon est un pays qui ne pourrait jamais exister à l'ombre d'une capitale si tutélaire, constamment représentée dans l'exceptionnelle et talentueuse BD de François Schuyten comme une ville isolée au coeur de déserts peuplés de monstres (cela ne pose-t-il pas question?). Malgré nos immenses potentialités politiques, cette structure néfaste fait de nous, collectivement, des schtroumpfs culturels ou symboliques et les médias nous l'assènent chaque jour, relayés par les rattachistes. Il y a là quelque chose d'invraisemblable, mais de parfaitement humain. Si 20% de Québécois de langue anglaise peuvent nier le Québec, une métropole bruxelloise peut certes prétendre au même «succès».
Comment réussir? Pour un Centre d'études Québec-Wallonie
Comme personne ne le sait ni ne le peut jusqu'à nouvel ordre, je n'ai aucune honte à dire que j'e n'en sais fichtre rien.

Il m'arrive seulement de penser - mais cela demanderait tant de temps, tant d'énergie et nous habitons si loin les uns des autres! - qu'il serait bien que se mette sur pied un centre d'études commun Québec-Wallonie. Partant de l'hypothèse que j'ai faite ici et que je sais partagée par de nombreux Wallons à même de réfléchir et diffuser leurs travaux. Partant du phénomène analogue au Québec où la minorité de blocage des anglophones est une évidence plus grande encore que notre propre minorité de blocage bruxelloise. Pourquoi même ne pas mettre des anglophones du Québec et des Bruxellois francophones dans ce Centre d'études? On va voir pourquoi.
Il resterait à parler, vous, des Canadiens anglais et, nous, des Flamands. Mais nous savons aussi que nous ne pouvons leur proposer quoi que ce soit de sérieux sans nous être mis d'accord préalablement.
Cela me semblerait même nécessaire puisque notre désir si passionné d'une patrie n'est qu'un désir passionné d'humanité : «Un être humain n'est pas un destin théorique dans l'univers des principes. C'est une réalité terriblement incarnée, avec les limites que cette situation impose mais aussi dans la richesse que donne cette expérience. Sous cet aspect, chaque langue, chaque culture, chaque société dit et réalise l'humanité, l'accomplit en un lieu donné. Elle la limite aussi, mais cette limite même fait partie intégrante de la réalité et constitue une dimension de l'expérience. Quand certaines cultures ne voient ailleurs que des limites et chez elles une pure humanité sans restriction, nous sommes alors en plein impérialisme

Featured 11746605790305d4d2500c52aa75121d

José Fontaine355 articles

  • 386 651

Né le 28/6/46 à Jemappes (Borinage, Wallonie). Docteur en philosophie pour une thèse intitulée "Le mal chez Rousseau et Kant" (Université catholique de Louvain, 1975), Professeur de philosophie et de sociologie (dans l'enseignement supérieur social à Namur et Mirwart) et directeur de la revue TOUDI (fondée en 1986), revue annuelle de 1987 à 1995 (huit numéros parus), puis mensuelle de 1997 à 2004, aujourd'hui trimestrielle (en tout 71 numéros parus). A paru aussi de 1992 à 1996 le mensuel République que j'ai également dirigé et qui a finalement fusionné avec TOUDI en 1997.

Esprit et insoumission ne font qu'un, et dès lors, j'essaye de dire avec Marie dans le "Magnificat", qui veut dire " impatience de la liberté": Mon âme magnifie le Seigneur, car il dépose les Puissants de leur trône. J'essaye...





Laissez un commentaire



5 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    3 septembre 2012

    Une minorité, les anglophones du Québec? Vous rêvez?
    Une minorité au sens numérique du terme avec une consécration dans les lois canadians sur le découpage ethnique comme la loi sur le bilinguisme ou le pouvoir de dépenser. Ce sont là que deux exemples parmi des dizaines d'exemple du contournement réel d'un ensemble législatif, mais aussi financier et culturel que la "minorité" anglophone du Québec n'en est pas une, mais une antenne de la majorité canadian qui fait que même avec 82% de la population, les "francophones" du Québec sont les véritables minoritaire.
    Pour votre information petit "cousins" de la Wallonie, voici une répartition plus nuancée de la population de la province du Dominion of Canada, la province du traité de la Ville de Québec, un territoire qui n'a pas le droit d'avoir le nom et que l'on a appelé le Québec (je vous le présente ainsi pour vous donner une idée de ce qui nous pend au nez en matière d'opposition à toute forme d'émancipation pour un peuple qui est toujours le même mais qui a changé souvent de nom depuis sa conquête). Source des statistiques 2010
    Québécois identitaire (ceux qui se disent Québécois ou Québécois d'abord): 65%
    Canadien-français (ceux qui se disent canadien, mais qui ne sont ni des français ni des canadians): 17%
    Canadian (le bloc monolithique qui vote en opposition systématique à plus de 90% contre le Québec): 4%
    Immigrants canadiens (issu des politiques multiculturelles du Canada, il y a les immigrants qui vont du côté francophone, une minorité qui fini par se comporter comme l'amalgame des Québécois et des Canadien-français et la majorité des immigrants qui immigrent dans un pays unilingue anglais, le Canada): 11%
    Il y a tant d'exemples que j'aurais pu donner de tout les contournements et supercheries qu'à utilisé le Dominion pour s'assurer du contrôle du territoire et des taxes du Québec (parce que l'on s'entend ici, la population ils en n'ont cure. Mais je vais m'attarder sur deux éléments tout aussi manifestes qu'une dizaine d'autres comme le contrôle du capital, la loi sur le multiculturalisme, la formation des provinces, les lois sur les "Indians", la fonction publique canadian, etc. Mais voyons plus particulièrement la loi sur le bilinguisme et le pouvoir de dépenser.
    Le bilinguisme institué par feu PET (Pierre Eliott Trudeau) qui a un nom francophone mais qui est un anglais issu de la petite Rhodésie loyaliste britannique de Montréal. Ce n'est qu'une obligation pour les Québécois de s'adapter à l'unilinguisme du Canada à ses entreprises à charte fédérales qui exigent l'anglais pour desservir une population majoritairement francophone sous prétexte de servir une population "internationale" majoritairement anglophone, mais qui est principalement au Québec et qui refuse de s'abaisser de parler français, que ce soit comme client ou comme patron parachuté pour assurer le contrôle. Cette politique à eu pour effet de gangréner tous les processus d'embauches que ce soit auprès de l'ensemble des juridictions régionales, municipales, comme l'ensemble des entreprises et la fonction publique du Québec et surtout la fonction publique canadian au Québec. Le Québec, la population progressiste (58%), majoritairement québécoise à toujours été pour l’accueil des immigrants mais essayez donc d’être attrayant quand le message est que si l’on veut travailler il faut avant tout parler anglais. Le chômage endémique d’immigrants « francophone » comme on la retrouve dans la communauté haïtienne ou nord africaine est symptomatique de l’agressivité et du « containment » à l’égard de tout ce qui est québécois ou qui s’en approche un peu trop.
    Par contre, quand on observe le pendant des minorités francophones au Canada, dans le ROC (Rest of Canada), la réalité est toute autre. La loi sur le bilinguisme ne s’applique que là ou le nombre le justifie. Sur un territoire immense, les provinces du Dominion crées pour minoriser la menace des Canayens papistes (plus tard appelé Habitants Canadiens, puis Canadien-français, mais qui sont pour une bonne partie les Québécois d’aujourd’hui), ont le beau jeu de n’offrir aucun service en français (puisque cette loi fut faite sur mesure pour encadrer les anglophones et loyalistes occupant le territoire québécois). Du coup, on peut bien ne pas s’étonner du haut taux d’assimilation des francophones hors Québec. Mais ce n’est pour les exilés canadien-français qu’un bénéfice marginal pour Ottawa, pour une politique visant l’affaiblissement culturel et économique du Québec. Là est la finalité de la loi sur le pseudo bilinguisme institutionnelle.
    Un autre pan symptomatique de l’exercice de la ségrégation canadian, source d’inspiration du régime d’Apartheid Sud-Africain est lié à son contrôle de l’argent par un élément fondamental du pouvoir canadian, le pouvoir de dépenser. Un pouvoir qui s’appui sur son pouvoir d’imposition et de taxation (60% des impôts et taxes que génère le Québec allant à Ottawa). Un pouvoir qui permet de faire fit de toute forme de constitution (ou de non appartenance à une quelconque constitution), permettant à des groupuscules de négocier, de noyauté des sommes folles pour l’entretien de réseaux sociaux parallèles, affaiblissant toutes formes d’influences de la société civile québécoise et générer des ghettos visant encore là, la fragilisation de la société québécoise, de favoriser les remise en question et entretenir un état du chacun pour soi un fondement de la société anglo-américaine de l’individualisme dérivant vers l’égoïsme sociale, l’idéal libéral sectaire communautariste. A ce jour le réseau médical anglophone est en proportion 2 à 3 fois mieux financé que le réseau francophone et le réseau scolaire des garderie aux université et centres de recherches anglophone (surtout financé par Ottawa) qui sont jusqu’à 5 à 6 fois mieux financé en proportion que le réseau scolaire francophone (ou que l’on doit identifier comme LE réseau québécois). En aucune façon, le pouvoir de dépenser du Canada ne s’est appliqué pour aider les francophones du Canada qui ne peuvent compter sur aucune Université francophone, tout au plus des université « bilingues », là ou des communautés francophones se sont mobilisé pour combattre le bulldozer du projet assimilationniste de l’Acte de l’Amérique du Nord Britannique (AANB).
    Alors voilà petits « cousins », je ne pense pas qu’il ait beaucoup de rapport entre ce à quoi les Québécois doivent faire face pour expliquer les innombrables raisons qui expliquent qu’ils ne soient pas encore « libres ». Mais je parierais sur une certaine dépossession de l’exercice de la souveraineté par quelques élites, principalement financière, proches d’un pouvoir qui n’a de représentatif que le nom et qui n’est d’aucune façon des régimes démocratique.
    Il faudrait également ajouter pour le Québec que la taille et la localisation de son territoire, particulièrement stratégique augmente de beaucoup le besoin de certains groupe à garder le contrôle et à tout mettre en œuvre pour que ce contrôle demeure effectif et ce par tout les moyens. Aussi il n’est pas étonnant qu’une région, comme celle de Québec ou siège l’Assemblée Nationale du Québec soit majoritairement fédéraliste. La corruption et la médiocrité ont frappé et frappe plus fort là ou les symboles sont éloquent, ce sont des éléments fondateurs essentiels au maintien du Québec dans le giron canadien, même si le Québec n’est plus signataire de la constitution canadienne depuis 1982 et que la séparation fut confirmer lors du référendum pan-canadien portant sur les ententes de Charlottetown, même si la population du Québec est contre tout rattachement politique avec ce qui est le pays des loyalistes orangistes du Dominion du Canada.

  • José Fontaine Répondre

    3 septembre 2012

    Merci à Andrée Ferretti et à Pierre Cloutier pour leurs commentaires.
    A Claude Bariteau, je dirais que j'ai fait cette comparaison "à la grosse louche". D'ailleurs lorsque l'on compare, c'est autant pour montrer les ressemblances que les différences.Ce qu'il est important de dire c'est que Bruxelles et la Wallonie sont deux entités fédérées distinctes mais qui parlent la même langue (en gros), sans se situer cependant de la même façon par rapport à la Belgique (et il faudrait bien cerner cette différence), dont Bruxelles est la capitale. Mais cette vision des Bruxellois a un grand poids dans la manière dont les Wallons se positionnent eux-mêmes. Il y aurait beaucoup de choses à creuser, tant dans nos pays respectifs que dans la comparaison qu'on ferait des deux. Mais l'idée de "minorité de blocage", c'est une expression qui a été déjà utilisée par un homme politique intelligent et important, Jean-Maurice Dehousse. Et je redis qu'une minorité a des droits mais que la question qui se pose, c'est de savoir si elle a ce droit d'empêcher indéfiniment. Comme les Québécois anglophones le font sans doute plus clairement encore que les Bruxellois.

  • Archives de Vigile Répondre

    3 septembre 2012

    José Fontaine, je vous salue.
    J’ai apprécié votre analyse, bien que j’aie quelques réserves sur les assises de votre argumentation.
    Il est vrai que la minorité anglophone constitue environ 20 % de la population de Montréal, où elle est concentrée au Québec. J’ai par contre de la difficulté à la concevoir comme l’alter-ego des franco-bruxellois appartenant à la communauté franco-belge (plus de 80 % à Bruxelles). Pour ce faire, il faudrait concevoir la minorité anglo-montréalaise comme l’avant-bras du Canada au Québec. Ce qui change la perspective. Sous cet angle, cette minorité ne se définit pas en niant au Canada anglais le pays qu’il constitue, voire la nation qu’il valorise. Au contraire, cette minorité au Québec partage l’idée de ce pays et de cette nation, car, historiquement, elle y a fortement contribué.
    Cela étant, il est vrai, comme vous le dites, que cette minorité anglophone existe par la négation de la nation ethnoculturelle canadienne-française. Par contre, il existe à Montréal, mais aussi au Québec, des francophones, probablement à la hauteur de 20-30 %, qui s’affichent d'abord canadiens en rejetant tout projet d’indépendance pour la nation politique québécoise. Leur existence, comme francophones, s’inscrit, je pense, dans la même logique que la minorité franco-belge de Bruxelles qui contrôle de nombreuses institutions culturelles. Et, comme les franco-bruxellois qui rejettent toute idée de nation politique pour la Wallonie, ces francophones du Québec banalisent toute conception civique du Québec. Ils conçoivent le civique au Canada, car, au Québec, ils ne peuvent survivre comme Canadiens qu'en faisant la promotion d'une nation ethno-culturelle qui leur sert de tremplin.
    Cela étant, que la minorité anglophone du Québec s’exclut du projet d’indépendance des ethno-nationalistes, cela va de soi. Qu’elle fasse la promotion du projet canadien, cela va aussi de soi. Comme va de soi qu’elle vise à promouvoir ses intérêts. Elle le fait en attaquant le projet ethno-nationaliste d’indépendance non pas parce qu’elle en tire avantage, plutôt parce qu’elle voit en lui son rejet du Québec. Il y a là une différence majeure entre les la majorité franco-bruxelloise et la minorité anglo-montréalaise. Dans le premier cas, les franco-bruxellois ne peuvent s’affirmer qu’en niant tout projet sécessionniste wallon tandis que les anglo-montréalais y arrivent au Québec non pas en contrant tout projet d’indépendance mais plutôt en se protégeant d’un projet d’indépendance à saveur fortement identitaire.
    Cela dit, l’idée d’un forum pour approfondir ces points m’apparaît heureuse, ne serait-ce que pour mieux éclairer les divergences et cibler les différences entre les conceptions ethno-nationales et civiques de la nation.
    Salutations amicales,
    Claude Bariteau

  • Archives de Vigile Répondre

    2 septembre 2012

    Cela me semblerait même nécessaire puisque notre désir si passionné d’une patrie n’est qu’un désir passionné d’humanité.
    C'est exactement cela.
    Tout le reste n'est que superflu et lamentable chicane.
    Je n'en dirai pas plus, même si votre correspondant précédent mériterait une belle dégelée, à ce sujet.
    Andrée Ferretti

  • Archives de Vigile Répondre

    1 septembre 2012

    Avec l'Internet, la distance n'est plus un obstacle. Un Institut d'études sur le Québec et la Wallonie peut parfaitement être créé et fonctionné "en ligne" sans aucun problème.
    Ainsi, j'ai mis sur pied récemment, sans un sou, un Centre de recherche et de documentation d'Option nationale (le CRDOP) formé de militants chercheurs bénévoles réunis en réseau par courriel è l'aide des simples Groupes Yahoo.
    Option nationale, soit dit en passant, est un nouveau parti indépendantiste dirigé par Jean-Martin Aussant, ex-député péquiste de Nicolet-Yamaska. Voir ici :http://www.optionnationale.org/
    Si le Parti Québécois prend le pouvoir mardi le 4 septembre 2012, votre suggestion pourrait peut-être prendre forme et recevoir l'appui de ministère des affaires internationales du Québec. On ne sait jamais.
    Pierre Cloutier ll.m
    avocat à la retraite