Remaniement ministériel: nos Spin Doctors se prononcent

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Beaucoup de bruit pour rien

Le remaniement ministériel annoncé mercredi à Québec était attendu. Rompus à ces manœuvres et observateurs chevronnés de la politique, nos Spin Doctors vous disent ce qu’ils en ont pensé.              


Sylvain Lévesque : Presque autant de chefs, que de soldats


«Le gouvernement libéral comptera 31 ministres, si j’inclus le premier ministre Philippe Couillard. Un très lourd cabinet, mais tout de même 5 de moins que le record de 36 lorsque Bernard Landry du PQ était chef du gouvernement québécois.»


1. Le gagnant : André Fortin (ministre des Transports)


Le plus jeune député libéral aura pour responsabilité de diriger le ministère le plus casse-gueule du présent mandat. Tout un vote de confiance du premier ministre. On le dit travaillant et il devra l’être pour réussir là où Jacques Daoust et Laurent Lessard ont lamentablement échoué. Il n’y a pas de demi-mesures pour lui. Soit il brise sa carrière politique, soit il deviendra un dauphin à la succession de Philippe Couillard. Meilleur des chances, Monsieur Fortin.


2. La perdante : Lise Thériault (ministre de la Protection des consommateurs et de l’Habitation)


La députée d’Anjou-Louis Riel était perçue, il n’y a pas si longtemps, comme une candidate potentielle à la succession de Jean Charest. Aujourd’hui, son étoile est plus pâle que jamais. Madame Thériault a été dépossédée de la condition féminine et de son symbolique titre de vice-première ministre. On a inventé un titre pour elle, la retourner sur les banquettes arrière aurait été trop drastique. Misère.


3. Le grand oublié : Guy Ouellette (Chomedey)


Cet ex-policier, spécialiste du crime organisé, est articulé, compétent et expérimenté. Néanmoins, remaniement après remaniement, il est laissé de côté par ses patrons (Charest et Couillard). Il est vrai qu’il n’a pas la langue dans sa poche et il est parfois sorti des rangs pour s’exprimer librement. Force est d’admettre que son avenir politique est plutôt pâle chez les libéraux, dommage.


4. Chanceuse d’être encore là : Stéphanie Vallée (ministre de la Justice)


Je suis tombé en bas de ma chaise lorsque j’ai appris que Stéphanie Vallée demeurait ministre de la Justice. Cette adepte de Candy crush a beaucoup de difficultés dans tout ce qu’elle touche. Rien sur l’arrêt Jordan, incapable de négocier avec les juristes de l’État et que dire de la gestion des projets de loi 59 et 62. Le minimum aurait été de la retirer de la justice, voire même l’envoyer sur les banquettes arrière. À n’y rien comprendre.


Jonathan Trudeau : Mi-figue, mi-raisin


«Un remaniement qui laisse une impression mi-figue mi-raisin. Bien qu’il faille souligner l’arrivée de nouvelles figures incarnant un certain renouveau, on peut déceler un manque de courage. Certains vieux meubles auraient dû être mis de côté, mais on a choisi de ne pas blesser certains égos bien gonflés.»


1. Le gagnant : André Fortin (ministre des Transports)


Wow. On disait le « voir dans notre soupe », mais c’est vraiment tout un défi qui est confié à ce jeune député. Cadeau de grec ou marque de confiance ? Le temps le dira. J’ai eu l’occasion de travailler avec lui lorsque nous étions collègues au cabinet de Jean Lapierre, alors ministre des Transports fédéral. Une bonne tête, un bon communicateur. Il a tous les atouts pour réussir.


2. Le perdant : David Heurtel (ministre de l’Immigration)


En voulant faire plaisir à un ministre qu’il semble être le seul à apprécier, Philippe Couillard pourrait bien avoir contribué à exposer au grand jour les faiblesses de David Heurtel, qui n’a jamais rien cassé à l’Environnement (sauf les oreilles de ses clientèles et de ses employés...). Bien honnêtement, je n’ai jamais rien entendu de positif sur son style de gestion et sur sa personnalité. 


3. Le grand oublié : Germain Chevarie (Îles-de-la-Madelaine)


Encore une fois, l’ancien haut placé de la SQ, Guy Ouellette, devra ronger son frein. Mais cela n’est pas surprenant, il a passé son tour tellement de fois. Par contre, on remarquera que la région de la Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine demeure sans véritable représentant, alors que Germain Chevarie est député aux Îles depuis de nombreuses années. Une pilule qui doit être difficile à avaler pour le fier madelinot. 


4. Chanceuse d’être encore là : Stéphanie Vallée (ministre de la Justice)


Avec David Heurtel, c’est la décision que je m’explique le moins. Une ministre qui a eu des difficultés à tous les points. La neutralité de l’État, les ratés de l’IVAC, les délais du système de justice. Il me semble que le bilan parlait de lui-même.


Claude Villeneuve : une opération cosmétique


«Une opération essentiellement cosmétique pour Philippe Couillard, qui scelle la landrysation de son gouvernement. Comme en 2002, il grossit son conseil des ministres et invente des portefeuilles futiles pour ne pas créer de mécontents en faisant de la place aux jeunes. Avec Arcand au Trésor, il n’effectue qu’un seul changement dans le top 5 des positions les plus importantes de son cabinet, dont aucune femme ne fait partie.»


1. Le gagnant : Gaétan Barrette (ministre de la Santé)


Ministre le plus impopulaire du gouvernement, ses réformes ont généré un coût politique important, sans amener les résultats escomptés. La Santé est la partie la plus faible du bilan libéral. Pourtant, personne n’a envisagé de toucher un seul cheveu de sa tête. Il doit être mort de rire. Avec le départ de Rita de Santis, récupère son titre de ministre qui fait le plus souvent parler de lui pour de mauvaises raisons.


2. La perdante : Kathleen Weil (ministre de la Réforme des Institutions démocratiques et de l’Accès à l’information)


Qu’a fait l’ancienne ministre de la Justice pour mériter un secrétariat mineur ? Que l’on confie la responsabilité des règles électorales à une championne du clientélisme ethnique a également quelque chose d’inquiétant. Avec sa collègue Lise Thériault, qui perd des morceaux à chaque remaniement, elle se demandera sans doute si sa présence est encore désirée.


3. Le grand oublié : Marc Tanguay (Lafontaine)


Pourtant fidèle à Philippe Couillard, l’ancien président du Parti libéral continuera d’afficher très ouvertement sa peine de ne pas être ministre dans les couloirs de l’Assemblée nationale. Membre du Barreau, il doit se dire qu’il ne pourrait pas faire pire à la Justice que notre prochaine lauréate.


4. Chanceuse d’être encore là : Stéphanie Vallée (ministre de la Justice)


À tous ceux qui espèrent que ce gouvernement s’occupera enfin des questions de Justice, Philippe Couillard avait un message très clair : ça ne l’intéresse pas. En laissant en place une ministre qui ne livre pas et qui est critiquée par les libéraux de sa propre région, le premier ministre ne rend service à personne. À commencer par Mme Vallée.


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Claude Villeneuve137 articles

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L’auteur est blogueur au Journal de Montréal et au Journal de Québec. Il a été président du Comité national des jeunes du Parti Québécois de 2005 à 2006 et rédacteur des discours de la première ministre Pauline Marois de 2008 à 2014.